Ma Part de Gaulois
Sortie:
31/01/2024
Pays:
FR
Genre:
Durée:
91 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Ma Part de Gaulois

Verdict: Bon

par: Emmanuel Galais



Destiné à un CAP Mécanique, Mourad se retrouve finalement en cursus général grâce aux stratagèmes de sa mère. Objectif : le bac ! Une formalité pour les « Français » du centre-ville mais un événement sismique pour Mourad et son entourage : le premier de la cité à aller jusqu'au bac ! Dans son lycée général, séparé de ses copains du quartier, il rencontre de nouveaux amis qui lui font découvrir la musique. Avec en fond sonore les rumeurs accompagnant l’arrivée au pouvoir de Mitterrand au printemps 1981, la Mère avait tout imagine´, sauf que son Mourad soit totalement indifférent au sacro-saint baccalauréat, en assumant sa Part de Gaulois.


Inspiré du livre quasi autobiographique de Magyb Cherfy, membre du groupe Zebda, dans lequel il racontait son histoire dans une France des années 70 et 80, qui va voir naitre une nouvelle génération : Celle des enfants d’immigrés qui ne veulent plus être regardés comme des étrangers mais comme des Français. Une époque qui raisonne bien étrangement, maintenant, alors que plusieurs générations plus tard, l’effet est inverse et que les enfants et petits-enfants cherchent à retourner vers leurs racines, à défaut d’avoir reçu la reconnaissance que le pays leur devait. Ce qui a pour effet de nous interroger : A quel moment les politiques et le pays ont fautés pour ces enfants ne se reconnaissent pas comme français à part entière et que l’on en soit toujours à les différencier ou à les stigmatiser pour une religion ou une origine ?


Passée cette interrogation, il est temps de se pencher sur ce film réalisé par Malik Chibane, à qui l’on doit notamment : « Les Enfants de la Chance ». Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce film qui sent la liberté de ton et la simplicité, ne se veut pas complètement revendicatif, il lève un voile sur une période charnière d’une société qui veut apparaître propre, mais ne l’est toujours pas, avec des déclarations dans les journaux télévisés et radiophoniques, dans lesquels des « Français » n’hésitaient pas à dire : « Il faut nettoyer la France ». Mais le réalisateur est plus malin que cela, et il va nous montrer le quotidien de ce jeune à qui l’on ne donne, pour principe, pas beaucoup de chances d'évolution scolaire, sinon la voie d’un CAP, sans imaginer que le gamin puisse avoir le bac. Il va nous montrer la dualité qui existait, à l’époque, au sein des familles issues de l’immigration, celle entre la volonté que les enfants soient identifiés comme Français, mais qu’ils portent également les valeurs d’une culture venue d’un pays plus ou moins lointain. Entre fatalisme et détermination, le scénario expose avec subtilité ces tiraillements qui persistaient dans les familles, entre ceux qui ne voulaient pas déranger les français et acceptaient comme une fatalité un destin de métier de « Manutentionnaire », par exemple et la mise en case définitive de leurs conditions et de l’autre côté ceux qui voulaient que leurs enfants réussissent pour encore plus de fierté, quitte à s’endetter, pourvue que cela aide les enfants à changer de niveau social. Et puis, bien sûr, il y a cette génération qui veut être regardée comme « Française » et non plus comme : « Enfants d’Immigrés ».


Si la direction d’acteurs est parfois chaotique, comme certains passages qui semblent avoir été doublés, mais mal synchronisés, la mise en scène de Malik Chibane est surprenante, par sa fraicheur et sa fausse simplicité, notamment en créant des scénettes amusantes où les duos ou trios s’échangent leurs idées et leurs arguments. Un choix narratif rafraichissant qui donne à « Ma Part de Gaulois », une fraicheur qui évite toute lourdeur revendicative, sans pour autant dénaturer le propos de Magyb Cherfy qui signe la chanson du film. Une mention spéciale au passage concernant l’élection de Mitterrand, considérée par les Français de l’époque comme une grande source d’espoir, mais qui ne fut pas vécue de la même manière par les familles d’immigrés.