Jean Doucet, l'instituteur d'un petit village, est accusé du viol de Catherine, l'une de ses élèves. Alors qu'il clame son innocence, d'autres accusations l'accablent.
Le premier film de Jacques Brel, fut une véritable révélation. Le chanteur y apparait avec beaucoup de fragilité, il met tout son talent dramatique, déjà bien appuyé dans l’interprétation de ses chansons, au service d’une histoire sombre où de jeunes filles accusent leur instituteur d’attouchements. Et toute la sensibilité du comédien apparait au grand jour pour donner toute la difficulté de son personnage face à une situation qu’il ne parvient plus à gérer.
Ce qui est intéressant dans le film, ce n’est pas tant le mensonge des jeunes filles qui sème inévitablement le doute, mais surtout, la différence de traitement des victimes entre une époque et l’autre et la manière dont la population finit par se retourner contre celui qu’elle considérait quelques jours auparavant comme un élément important et intouchable de leur microcosme. Lorsque la première jeune fille porte ses accusations, le maire commence par remettre en doute ses propos (une situation qui ne pourrait être acceptée de nos jours) et tente de l’influencer pour qu’elle ne fasse pas de vague. Puis face à la déclaration des deux autres, l’action policière se met en place, et la rumeur populaire commence son travail de destruction, avec les insultes, les menaces, les parents qui croient aveuglément les déclarations de leurs enfants pour ne pas imaginer qu’elles puissent avoir quelque chose à cacher.
La mise en scène est parfois un peu brutale, notamment dans le jeu des comédiens ou dans le montage même du film, mais il garde une certaine vision particulièrement réaliste de la société dans laquelle il fut tourné, avec les rumeurs qui enflent sans commune mesure, les regards des voisins inquisiteurs et surtout, plus que tout, l’avidité du scandale qui détruit une réputation en un instant. La mise en scène d’André Cayatte (Justice est faite) si elle manque de mesure parfois a tout de même le mérite de laisser parler les silences, en ne forçant le trait ni sur les uns, ni sur les autres exceptés les habitants du village qui veulent absolument faire entendre leurs jugements.
Le scénario du réalisateur insiste principalement sur le travail de la justice, et notamment sur l’absence de présomption d’innocence, en l’occurrence avec le juge qui instruit à charge, n’hésitant pas à poser des questions suggestives aux filles, pour les guider à charge, sans prendre les déclarations de l’instituteur pour vérité.
En conclusion, « Les risques du métier » est certainement l’un des films les plus réussit sur les méandres de la justice et notamment sur la présomption d’innocence, à travers une affaire qui suscite toujours la révoltes des uns et des autres. Jacques Brel y est magnifique.