L’histoire
Alejandro Jodorowsky revisite son enfance dans la ville de Tocopilla au Chili.
Critique
Tourné quasiment en secret, La danza de la realidad effectuera sa première mondiale lors du Festival de Cannes 2013 (Quinzaine des réalisateurs). A cette occasion, Alejandro Jodorowsky sera introduit par Nicolas Winding Refn (Drive) en ces termes élogieux : « Voici un homme que j’aimerai devenir un jour ». La formule est puissante.
Il faut dire qu’Alejandro Jodorowsky est un être à part. Un réalisateur mythique à qui l’on doit quelques œuvres mémorables (El topo, La montagne sacrée, Santa sangre). Un personnage hors-norme et multifacettes (rappelons que Jodo est réalisateur, scénariste, acteur, mime, romancier, essayiste, poète, scénariste de BD et spécialiste du tarot divinatoire). Le voir repasser derrière la caméra après une absence de plus de vingt ans (son long-métrage précédent, Le voleur d’arc-en-ciel, date de 1990) a quelque chose d’inespéré et de magique.
Eminemment personnelle (les trois fils et l‘épouse de Jodorowsky ont participé à l’aventure), La danza de la realidad est une œuvre autobiographique. Alejandro Jodorowsky retourne ici dans le village chilien de son enfance (Tocopilla) et revisite sa vie sur un mode fantasmagorique. Une expérience touchante à travers laquelle Jodo revient notamment sur une relation compliquée avec son père et exorcise le poids écrasant de la dictature. Ne se bornant pas à une simple thérapie familiale (que le réalisateur qualifie de « psychomagie »), le film s’avère à la fois « intime et universel » pour reprendre les mots de Brontis Jodorowsky.
Exercice intéressant, La danza de la realidad est une œuvre saugrenue et bourrée d’idées. Le film est d’ailleurs beaucoup plus audacieux que bien des œuvres de jeunes réalisateurs. Bizarre, poétique et métaphysique, le titre est « jodorowskien » en diable. Et s’il accuse bien certains défauts (un côté bordélique et épuisant, des longueurs), ceux-ci sont en partie gommés par une profonde humanité qui le rend attachant. L’aspect « film testament » permet également de passer outre ces quelques maladresses.
Verdict
A quatre-vingt-quatre ans, Alejandro Jodorowsky démontre que les années n’ont pas émoussé sa créativité. Il reste un réalisateur passionnant capable de proposer un cinéma différent. Un artiste précieux.