Philippe Fournier, dit Paco, décide de ne pas ramener ses fils de 6 et 7 ans à leur mère qui en avait obtenu la garde. Enfants puis adolescents, Okyesa et Tsali Fournier vont rester cachés sous différentes identités. Greniers, mas, caravanes, communautés sont autant de refuges qui leur permettront de vivre avec leur père, en communion avec la nature et les animaux. Traqués par la police et recherchés sans relâche par leur mère, ils découvrent le danger, la peur et le manque mais aussi la solidarité des amis rencontrés sur leur chemin, le bonheur d'une vie hors système : nomades et libres. Une cavale de onze ans à travers la France qui va forger leur identité.
Voilà typiquement fait pour le cinéma ! Celle d’un homme déterminé à conserver ses droits parentaux quitte à pousser à l’extrême sa vision du combat en soustrayant ses enfants à leur mère. Pendant plus de onze ans, ils vivront cachés, sous de fausses identités, vivant d’une existence semi-nomade, chez des particuliers ou dans des lieux collectifs.
Cedric Kahn aime les sujets de société qu’ils soient évidents ou sous-jacents, commun ou hors du commun, ces événements lui permettent de tirer des portraits précis d’une partie de la société parfois oubliée, parfois hors normes mais souvent mise de côté. Ce fut le cas, par exemple, de « Une vie meilleure » qui traitait du surendettement. Cette fois-ci il s’inspire du livre biographique de Xavier Fortin qui a voulu donner sa vérité des faits qui lui ont été reprochés, notamment le fait qu’il n’est pas rendu ses enfants à sa mère et qu’il se soit caché avec eux pendant onze, durant lesquelles ils ont vécus en clandestinité sous de faux noms de camps en refuges, etc…
Alors bien sûr le film regorge de bonnes idées de mise en scène notamment lorsqu’il concerne les enfants dont la liberté de jeu permet de belles choses, particulièrement lorsque l’on parle de la partie clandestine. Le réalisateur signe une image très simple, très épurés et en même temps d’une grande complexité pour coller au plus prêt de la vie de ses héros. Mais c’est du côté du scénario que l’on peut forcément se poser des questions sur la démarche réelle du film.
Car, oui le livre de Xavier Fortin est une aventure formidable pour le cinéma, oui il y a message qui concerne le rôle du père lorsque l’on parle de famille, oui il y a la parole de l’enfant au cœur de la déchirure parentale. Mais n’y a-t-il pas d’autres questions à poser ? Le père se pose en victime, mais qu’en est il de la mère ? Onze années sans voir ses enfants ! Des enfants abreuvés des idées de leur père qui ne se gêne pas pour porter la mère en bourreau, sans jamais parler de ses erreurs ! Le scénario garde un certain parti pris gênant pour un film qui veut raconter une histoire en éludant l’autre peut-être cinématographique mais tout autant chargée en émotion. Si la démarche du père pouvait être compréhensible en début de film, elle devient de moins en moins justifiable à mesure que les années passent. Seule un réplique s’interroge sur les enfants : « Que décide-t-on à 6 et 7 ans ? », mais passé cette réplique le film reprend le déroulé d’une histoire plus complexe et qu’il aurait été bon de traité avec plus de recul et moins d’implication.
En conclusion, « Vie sauvage » est un film parfaitement maîtrisé par le réalisateur, seulement le scénario adoptant le parti du père, manque de recul et de finesse pour un sujet qui posait certaines questions mais que la réponse paternelle égoïste et excessive vient totalement fausser.