Non loin de Tombouctou tombée sous le joug des extrémistes religieux, Kidane mène une vie simple et paisible dans les dunes, entouré de sa femme Satima, sa fille Toya et de Issan, son petit berger âgé de 12 ans. En ville, les habitants subissent, impuissants, le régime de terreur des djihadistes qui ont pris en otage leur foi. Fini la musique et les rires, les cigarettes et même le football… Les femmes sont devenues des ombres qui tentent de résister avec dignité. Des tribunaux improvisés rendent chaque jour leurs sentences absurdes et tragiques. Kidane et les siens semblent un temps épargnés par le chaos de Tombouctou. Mais leur destin bascule le jour où Kidane tue accidentellement Amadou le pêcheur qui s'en est pris à GPS, sa vache préférée. Il doit alors faire face aux nouvelles lois de ces occupants venus d’ailleurs…IMAGE : Dans l’ensemble l’image est de bonne tenue avec des couleurs bien pesées et des contrastes qui donnent une véritable profondeur à l’ensemble. Les différences de qualités voulues par le réalisateur qui joue sur plusieurs textures pour donner plus de résonnance à son film sont parfaitement bien retranscrites dans cette édition de qualité.
On dit souvent que Cannes peut-être influencé par un environnement politique fort. Plusieurs exemples en ont fait échos comme les récompenses décernées aux films « Fahrenheit 9/11 » du polémiste Américain Michael Moore, en pleine crise irakienne, ou alors « Persépolis » en pleine crise iranienne, etc… cette fois-ci et à juste titre c’est « Timbuktu » du Mauritanien Abderrahmane Sissako qui cristallisa les esprits. D’abord, parce qu’il s’agissait de l’unique film en langue africaine sélectionné, mais aussi par la teneur de son sujet : Un village sous oppression djihadiste.
Alors, bien sûr, le sujet est particulièrement d’actualité, mais l’intérêt de ce film va bien au-delà d’une simple corrélation avec l’actualité proche et obsédante du moment, d’autant que le sujet fut écrit par la réalisateur en réponse au silence des médias internationaux face à la barbarie de la lapidation d’un couple au Mali pour le seul fait d’avoir eu des enfants hors mariage. Mais ce qui donne tout l’intérêt au film, c’est l’intelligence et la simplicité qui en ressort. Le scénario ne se lance pas dans une diatribe imbuvable des djihadistes, il laisse aller les choses, il présente les faits, en expose les incohérences, mets ces hommes face à leur propres contradictions, pour mieux mettre en avant l’horreur de ce pouvoir opprimant. Ainsi, on entend un homme hurler dans un mégaphone toutes les interdictions du jour, à commencer par celle de fumer, mais le chef djihadiste se cache dans les dunes pour en « griller une », on parle de pureté des âmes, mais on force une jeune fille à épouser un homme sans le contentement de sa famille.
Abderrahmane Sissako dresse un portrait sans concession de ce village aux mains des djihadistes, mais n’en rajoute pas, les images suffisent, et le réalisateur va même plus loin, il insuffle quelques instants de poésies, il trouve même le moyen de faire rire le spectateur avec quelques réflexions cocasses. A des années lumières d’un traitement hollywoodiens qui a tendance à en mettre des tonnes pour mieux appuyer son discours, le réalisateur préfère la simplicité et la force des visages, des mots et des couleurs pour que le message passe.
Pour cela il s’appuie sur une distribution, pas forcément professionnelle, qui fait beaucoup plus de ravage que n’importe quelle star du grand écran. Le jeu est juste, simple mais d’une très grande efficacité. Tout en retenue, mais pourtant si pointue dans chacun des dialogues, les acteurs portent le film avec talent, comme Ibrahim Ahmed qui joue certainement la scène la plus sincère et la plus émouvante du film.
En conclusion, « Timbuktu » est un film passionnant, simple et rigoureusement percutant qu’il faut voir absolument pour la qualité de son scénario, et l’intelligence de sa réalisation.