Un portrait bien documenté, avec des images inédites et mises en couleur, d’une personnalité historique à la fois admirée et détestée : Joseph Staline.
Un seul mot suffirait à résumer « Apocalypse » : Exceptionnelle. La série réalisée par Isabelle Clarke et Daniel Costelle adopte le parti de narrer de manière brut et sans concession, l’histoire de ce dictateur et de ceux qui le façonnèrent autant que ceux qui le craignirent. Un politicien qui ne reculait devant aucune barbarie tant qu’elle lui permettait d’assouvir sa soif de pouvoir. Une suprématie faite du sang de son peuple, d’assassinat de ses opposants et de la création de camps tristement célèbres : Les goulags. Mais Staline c’est également la lutte acharnée et sans merci contre Hitler, qui le fit passer pour un héros aux yeux du monde entier, alors que la face cachée de Staline laissait des millions de russes affamés, réprimés et sacrifiés à son désir de pouvoir et de vengeance.
« Apocalypse », n’est pas seulement un documentaire sur Staline, c’est une nouvelle vision de cette part de l’histoire de la Russie, où rien n’est oublié, qu’il s’agisse de l’influence de Lénine et de la jalousie envers Trotsky, des goulags, mais également des mensonges d’états, de la famine qui ravagea bien trop souvent ce pays persécutés en premiers par ses propres dirigeants, ou encore des moments que l’histoire a gardé comme des symboles et qui cachait tellement de vérités honteuses. Ne cherchant jamais à sur-diaboliser les faits, les réalisateurs se sont attelés à rendre le plus proche de nous possible, le règne de ce dictateur considéré comme l’un des plus sanguinaires de l’histoire de son pays, en restaurant l’image autant que le son, en y rajoutant des couleurs ou en impactant différentes sonorités, pour mieux imprégner le spectateur de l’ambiance dans laquelle furent tournées les images.
Et bien sur, parfois cela fait mal, cela dérange ou rebute, tant la cruauté de certaines images est parfois insoutenable, mais le règne de Staline, ce n’était pas seulement « les défilés officiels » ou « les sourires discrets », c’était surtout une période où les flammes de l’enfer ravageaient les populations, aux noms d’idéaux absurdes et malsains. Et cela les réalisateurs l’ont bien compris et « Apocalypse : Staline » sort subitement du lot des documentaires traditionnels. Ici les regards humidifient les yeux et la détresse fait couler des rivières de larmes matinées de honte. Car même installé confortablement dans notre fauteuil, on ne parvient pas à retenir une certaine honte d’oublier parfois cette blessure profonde dans l’histoire de l’Europe que l’on oublie trop souvent encore.
Et même si la narration de Mathieu Kassovitz se fait parfois en retrait, elle parvient à nous faire comprendre, l’état d’esprit de l’époque, les raisons et les choix des généraux, la honte infligée à Trotsky tout en remettant en perspective les idéaux de ce dernier qui fut assassiné dans d’atroces conditions, puis la deuxième guerre mondiale et cette lutte acharnée pour sauver l’URSS qui cachait une guerre d’ambitions, et enfin la vie personnelle aussi terrifiante que cynique de Staline. Le texte sobre, contraste avec la férocité des images mais finit très vite par capter l’intérêt du spectateur.
En conclusion, « Apocalypse Staline» est un documentaire exceptionnel qu’il faut se procurer d’urgence, afin que la mémoire ne s’efface pas et qu’au contraire, elle parvienne à nous rappeler qu’Hitler ne fut le seul monstre sanguinaire de la seconde mondiale et à quel point le peuple russe eut à souffrir de l’influence d’un tel homme. Une superbe leçon d’histoire, qui agit en miroir avec nos contemporains.