1893. Malgré leurs quatorze ans d’écart, Gabrielle Sidonie Colette, jeune fille à l’esprit rebelle, épouse Willy, écrivain aussi égocentrique que séducteur. Grâce à ses relations, elle découvre le milieu artistique parisien qui stimule sa propre créativité. Sachant repérer les talents mieux que quiconque, Willy autorise Colette à écrire – à condition qu’il signe ses romans à sa place. Suite au triomphe de la série des Claudine, il ne tarde d’ailleurs pas à devenir célèbre. Pourtant, tandis que les infidélités de Willy pèsent sur le couple, Colette souffre de plus en plus de ne pas être reconnue pour son œuvre…
Alors c’est sûr, qu’à première vue, la vie et l’œuvre d’une des auteurs les plus emblématiques de la littérature française, réalisée par Wash Westmoreland (Still Alice) et interprétée par Keira Knightley (Love Actually) prête à sourire ou à hurler au scandale, tant s’attaquer à « Colette » dans un film en langue anglaise est certaine un crime de lèse-majesté. Parce qu’enfin, des auteurs de cet acabit se devraient de n’être traités que par des productions françaises, même si celle-ci s’enferme dans une sorte de classicisme pesant ou se retrouvent dans des programmes TV aux budgets ultra serrés.
C’est bien évidemment une aberration, que d’avoir de telles pensées, surtout après avoir visionné ce « Colette », anglo-saxon, qui tourne autour de la personnalité, mais également de l’œuvre en mutation, d’une société où la femme n’avait aucun droit de revendiquer une œuvre quelle qu’elle fut, mais aussi l’émancipation d’une jeune femme qui veut assumer sa différence et passe ainsi un pacte avec son mari, pour vivre ses amours « interdite ». Car si Colette est devenue au fil du temps, un symbole du féminisme, cela ne fut pas forcément le cas dans son parcours de femme comme d’écrivain, puisqu’elle accepta, dans un premier temps, de sacrifier ses écrits aux profits de son mari. Du coup « Claudine à l’école » fut, d’abord, signée par Willy, pour ensuite être revendiquée par son véritable auteur.
Et le réalisateur et ses scénaristes Richard Glatzer (Still Alice) et Rebecca Lenkiewicz ( Ida), ont la judicieuse idée de faire un parallèle entre l’œuvre emblématique de l’auteur, à travers son personnage emblématique, Claudine et la vie de sa créatrice. Claudine est une créature qui agit comme un miroir de la vie sentimentale de l’auteure et de son mari, chaque femme qui passe se revendique comme Claudine et devient le fantasme des deux, tout en étant également le symbole assumé d’une liberté de penser et de vivre ses sentiments. Mais tout cela à un prix et Colette ne tarde pas à l’apprendre. Du coup le scénario est intéressant car il livre une analyse assez pertinente de l’œuvre de Colette tout en faisant une critique de cette société patriarcale qui impose tant de restrictions aux femmes, jusqu’à les considérer comme des citoyens de secondes zones.
Et Keira Knightley d’imposer un charme et une force que l’on peut retrouver dans beaucoup d’actrice de cette génération. Des actrices qui jouent sur le charme autant que sur la force de s’opposer au masculin. L’actrice ne cherche pas la surenchère, elle interprète une Colette, d’abord intégrée aux traditions de l’époque, aux codes imposés puis se découvre une envie de s’émanciper et de trouver enfin sa voie, lorsque sa plume supplante tous les auteurs masculins. Face à elle, on retrouve
Dominic West plus sobre que dans «
Genius » par exemple, mais toujours aussi sensible, en homme guidé par ses sentiments mais aussi par son appétit sexuel.
En conclusion, « Colette » est un film qui reprend avec intelligence la vie de « Colette » pour faire un parallèle avec son œuvre.