Un couple d’Anglais, Tom et Evelyn, débarque dans la station balnéaire de Benavis pendant les festivités d’été. Préférant fuir la foule, ils prévoient de partir le lendemain pour la petite île d’Almanzora. Dans ce lieu ignoré des touristes, les Anglais auront tout à loisir de se reposer pendant leurs deux semaines de vacances, en particulier Evelyn qui est enceinte. Mais à leur arrivée, ils découvrent un village totalement abandonné de ses habitants. Bientôt, des enfants au comportement étrange font leur apparition. Et s’ils avaient quelque chose à voir avec la disparition de la population adulte ?
Voilà l’exemple type d’une traduction ridicule d’un titre qui en disait suffisamment sur l’atmosphère dans lequel allait baigner le film. Car « Les Révoltés de l’an 2000 » n’a rien à voir du tout avec le contenu du film proposé par le réalisateur espagnol Narciso Ibanez Serrador. Car l’action ne se situe aucunement en l’an 2000, et aucun « Révolté » à repérer dans le moindre plan, si ce ne sont ces enfants qui semblent souffrir d’un virus qui réveille un instinct meurtrier chez ces petites têtes blondes. Car c’est bien de cela dont il s’agit, un film qui se rapproche du « Village des Damnés » que des « Révoltés du Bounty ». Le réalisateur Espagnol, qui ne signa que deux longs métrages dans toute sa carrière, mais acquit sa popularité et fit sa légende à la télévision, notamment dans une émission hebdomadaire dans laquelle il présentait des films d’horreur ou d’épouvante, avec une grande part pour les films de la Hammer, signe ici un film âpre, à l’ambiance pesante. Un « Survival » qui rappelle « La Colline à des yeux » avec ses couleurs très claires, son éclairage très lumineux et ses personnages en permanente suspension.
Grand amateur du genre, Serrador parvient à insuffler une ambiance pesante qui se lève crescendo et joue constamment entre insouciance et moments graves. L’arrivée sur l’île est l’une des images parfaites qui reflète cette idée. Le couple arrive léger, ravi de voir des enfants, puis c’est le regard de l’un d’eux qui vient justement donner le ton inquiétant du film. Loin d’être un film à part dans un cinéma ibérique peu connu, « Les révoltés de l’An 2000 » vient rappeler que dans les années 70 et même encore maintenant, les espagnoles savaient magner le genre horrifique avec une maestria qui leur fut copié par les américains eux-mêmes. Avec des réalisateurs phares et inventifs tels que Bigas Luna (Angoisse), Vicente Aranda (La Mariée Sanglante) ou encore Amando De Ossorio (le Monde des Morts-Vivants), Narciso Ibanez Serrador aura permis à un style plaqué entre le survival et le faussement réel, de se découvrir des formes narratives qui prendront encore plus de sens avec des productions américaines ou Italiennes à l’instar de films tes que « Cannibal Holocaust » de Ruggero Déodato (1981)ou « La colline a des yeux » de Wes Craven (1977).
Pour les amateurs du genre, « Les Révoltés de l’An 2000 » est une leçon de cinéma d’horreur, par un réalisateur qui préféra promouvoir sa passion à la télévision que de se perdre d’entre d’autres réalisations, qui auraient pu être moins réussit, nous ne le saurons jamais. Narciso Ibanez Serrador aura dans tous les cas, grâce à ce film, posé les bases d’une nouvelle manière de raconter la peur et l’angoisse, et cette question, effacée par le titre français ridicule et hors sujet : « Qui peut tirer sur un enfant ? » portée par une séquence d’ouverture difficile, dans laquelle le réalisateur accumule des images de conflits meurtriers en se focalisant sur les enfants, pour mieux donner une raison à cette folie meurtrière.
Le réalisateur aura donné naissance à des grands noms du cinéma espagnol tels que Guillermo Del Toro (L’Echine du Diable (2002)), Juan Antonio Bayera (L’Orphelinat (2007)) ou encore Alejandro Amenabar (Les Autres (2001)). En deux films et particulièrement « Les Révoltés de l’an 2000 », Serrador ce sera imposé comme la pierre angulaire du cinéma de genre horrifique, en signant un film d’une tension puissante et d’une écriture remarquable.