Le CES est le plus grand salon sur le secteur de l’électronique, au sens le plus large du terme. Mais au-delà de l’impressionnante surface du salon, c’est surtout le rassemblement des décideurs des grands groupes ou de simples PME qui est important. De leurs discussions, décisions, accords signés ou de principe, va se construire le marché des prochains mois. Bien sur, je n’ai pas eu la possibilité d’écouter à travers les parois des salles de réunions mais, de couloirs en couloirs et au travers de nombreuses discussions, il est possible de dessiner le marché d’aujourd’hui et les tendances de demain. La convergence numérique est assurément présente dans tous les secteurs.
De notre envoyé spécial à Las Vegas, Bruno Orrù
Convergence. Voilà un mot qui est utilisé quasiment tous les jours lorsque l’on parle du marché de l’électronique, que ce soit sur le secteur pro ou grand public. Cette idée de convergence est déjà appliquée depuis quelques années à certains produits mais rarement aux secteurs d’activités. En effet, les acteurs sur les différents marchés restent le plus souvent sur leur marché principal, passant parfois quelques accords transversaux mais peinent à construire de réels partenariats. Pour autant, du coté de la téléphonique notamment, les produits font nécessairement appels à des compétences technologiques diverses et variées. Par exemple, lorsque vous achetez un téléphone multimédia dernier cri vous pouvez bien sur l’utiliser pour téléphoner (cela fait toujours du bien de rappeler la fonction première d’un téléphone) mais pour écouter de la musique, prendre des photos, faire un film vidéo, trouver son chemin avec le module GPS intégré, consulter son agenda sur un véritable système d’exploitation… il est évident que Messieurs Nokia, Sony Ericsson, Motorola et autres ne possèdent pas l’ensemble des compétences technologiques. La convergence technologique se double par conséquent d’une convergence financière et stratégique.
La convergence c’est aussi une nouvelle vue sur la compétition. Si je reprends mon exemple d’un constructeur de téléphones, ce dernier se trouve à une époque ou les challenges se multiplient. Il faut proposer le bon produit, à la bonne cible clientèle et au juste prix. Une affaire qui n’est pas simple car notre opérateur téléphonique se retrouve à naviguer en terres inconnues, avec en face de lui des acteurs puissants qui vont tout faire pour garder leur compétitivité et la séduction de leurs produits, souvent de fonctionnalités plus réduites. En 2007, quel produit prendra le plus de photos ? Un APN ou un téléphone ? A en croire Nokia, en 2006 il aura été plus pris de photos depuis un téléphone que depuis un appareil photo. Troublant mais révélateur de la convergence des centres d’intérêts des utilisateurs d’un téléphone, qu’il soit un professionnel, un jeune étudiant ou une mère de famille !
Convergence et partage
La convergence c’est bien entendu le partage du cœur numérique de nombreux accessoires. Mais ce partage se doit d’être sécurisé et, surtout, compatible d’un appareil à un autre. Le CES 2007 a prouvé que si des normes se mettent en places au travers d’accords ponctuels entre certains constructeurs, aucune norme transversale totalement commune n’est en place, ce qui peut gêner fortement le développement de toutes ces convergences. C’est d’autant plus dommage que le grand public commence à découvrir, et à comprendre, l’intérêt de ces échanges entre appareils de salon traditionnels, accessoires informatiques, ordinateurs, téléphones et bien sur, les nouvelles consoles de jeu.
Microsoft avec sa déjà bien ancrée XBOX360 (entre 10 et 11 millions d’unités vendus) et Sony avec sa nouvelle Playstation 3 mettent particulièrement en avant le potentiel multimédia de leurs consoles, au-delà du bien fondé attrait de jeu. Le potentiel de la PS3 en France reste officiellement reporté au mois de mars prochain bien que des rumeurs persistantes dans les couloirs du CES dont état d’un nouveau report. J’ai à l’opposé entendu de la bouche même des officiels Sony que la mise à disposition de 1 million d’unité est toujours prévue pour l’Europe. La XBOX360 est déjà bien installée partout dans le monde et, en France, le meilleur exemple de communication transversale est l’accord avec Canalplay qui permet de récupérer du contenu VOD directement depuis la console, sans passer par la case ordinateur. Bien sur ce service est encore embryonnaire et l’on espère qu’il va être étendu aux services HD que vient de lancer Canalplay. Sur le plan mondial, la conférence d’ouverture de Bill Gates a également été sous le signe de la convergence, notamment par l’annonce du support par la XBOX360 de services d’IPTV. Ce type de service est d’ailleurs déjà la réalité pour les abonnés français de Club-Internet qui profitent via la Box de l’opérateur des programmes TV via cette plateforme Microsoft. Un vrai challenge pour Microsoft puisque Bill Gates espère que dans le monde près de 70 millions de personnes seront abonnés à ce type de service IPTV ! Une prétention qui se base sur la quantité importante de XBOX360 déjà en service et sur les 100 millions de téléchargement de jeu constatés durant les dernières fêtes de fin d’année.
Pour autant Bill n’est pas bête et il sait très bien que les joueurs sont beaucoup plus nombreux sur PC que sur console de jeu, c’est pourquoi le succès du module Xbox Live, ce dernier va être étendu au monde du PC et là ce sont potentiellement plus de 200 millions de personnes qui sont concernées. En espérant que les serveurs tiennent le coup lors de l’arrivée de nouvelles démos de jeu !
L’aspect HD des nouvelles consoles de jeu est certainement la meilleure aide à la démocratisation de la vidéo Haute définition. En effet, aussi paradoxalement que cela puisse paraître, c’est du coté du secteur du jeu vidéo que la notion de Haute définition visuelle est la plus forte aujourd’hui, notamment par manque de communication claire du coté du secteur vidéo sur le potentiel de la haute définition.
Le partage c’est beau mais cela demande de la ressource système, autant dire que l’arrivée des processeurs Intel Core 2 Quad peut représenter une belle bouffée d’air. En effet, le partage est souvent gourmand en mémoire vive et puissance brute, ce ne sont pas ceux qui ont branchés sur XBOX360 à leur PC qui vont me dire le contraire. Bien sur ces puces vont rester de prix élevé dans les prochains mois mais dès l’année prochaine chacun pourra monter sans crainte un réseau chez soi, d’autant plus que parallèlement Microsoft aura mis sur le marché son offre Windows Home Server. Avec ce module spécifiquement prévu pour un usage privé, la mise en réseau devrait être simple et rapide d’après son géniteur. Et la simplicité, c’est assurément la certitude de rassembler et d’intéresser.
Convergence et simplicité d’usage
C’est au détour d’une grande conférence sur le thème de la convergence que l’on a pu entendre les principaux acteurs confirmer leur souhait d’écouter le consommateur et de lui proposer un service de communication aussi simple que possible. Le danger de la convergence c’est en effet de rester à l’écart du grand public en imposant des protocoles de communication complexes et dès lors réservés aux habitués des produits numériques. Pour être convainquant mes éditeurs de contenu doivent savoir s’adapter aux nouveaux outils. Ainsi, il est de moins en moins rare de constater que les programmes proposés sur téléphones sont adaptés à la bande passante et aux dimensions réduites des écrans. Que ce soit du coté des opérateurs téléphoniques ou des éditeurs de contenu Télévisuel, les parts de marché sur les nouveaux vecteurs mobiles sont prometteuses mais soumises à des investissements importants. Le danger, comme déjà dit, est de se cantonner sur des protocoles propriétaires ou de rater la voie édicter par les pouvoirs politiques de chaque pays.
Convergence et politique
Cette notion de pouvoir politique décisionnaire est bien entendu importante et les grands constructeurs d’électroniques soupirent souvent devant l’attentisme imposé. Dans de nombreux stands on peut s’émerveiller devant de nombreux accessoires de mobilité permettant de profiter de programmes TV en déplacement mais la plupart ne sont malheureusement pas adaptés au marché français.
Convergence propriétaire
Certains souhaitent développer l’idée de la convergence mais en gardant la main sur tous le circuit, bref en ne souhaitant pas partager les bénéfices commerciaux qui découlent du succès. Apple est le champion toute catégorie sur le sujet et cela en chatouilles beaucoup, à commencer par Microsoft qui a du mal à se cantonner à ses 20% de part de marché sur la mobilité musicale là ou l’Ipod recueille 80% des suffrages. La convergence quand elle ne passe pas par le téléphone passe aujourd’hui par les baladeurs qui permettent, en plus d’écouter de la musique, de regarder – et partager – des photos ou vidéos. Le marché est juteux, tant sur la vente des baladeurs que des accessoires associés et Microsoft avec son nouveau concept / baladeur Zune espère bien reprendre des parts sur ce marché. D’ailleurs, le visiteur du CES se voyait proposer une offre bien alléchante qui a surement tenté ceux qui souhaitent utiliser les fonctions Wifi du baladeur et qui attendent la mise en service du module Zune Live, similaire au Xbox Live. Les capacités de 30 ou 60 Go des baladeurs permettent en effet de réaliser nombre de téléchargements. Bien malheureusement, la crainte d’échanges non contrôlés limite l’intérêt de ces fonctions (compatibilité avec les vendeurs en ligne actuels très limités + limite temporelle de 3 jours pour les téléchargements…). Finalement que ce soit du coté Apple ou Microsoft, la convergence à ses limites et chacun souhaite conserver la main sur les ouvertures proposées.
En conclusion
Si la convergence est bien réelle et réellement en route, elle est pour autant bousculée par le manque de normes ou, à l’opposé, par une volonté marquée de garder la main sur les technologies utilisées. D’un concept simple et élégant, l’année 2007 risque encore de voir les idées de convergence complexes et ternies par la gourmandise affichée ou masquées des différents intervenants. La convergence en 2007 risque bien de rester l’apanage des plus passionnés d’entre nous.
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