Jef Costello, dit le Samouraï est un tueur à gages. Alors qu'il sort du bureau où git le cadavre de Martey, sa dernière cible, il croise la pianiste du club, Valérie. En dépit d'un bon alibi, il est suspecté du meurtre par le commissaire chargé de l'enquête. Lorsqu'elle est interrogée par celui-ci, la pianiste feint ne pas le reconnaître. Relâché, Jeff cherche à comprendre la raison pour laquelle la jeune femme a agi de la sorte.
Parti d’une vision de Jean Pierre Melville dans lequel il voyait un homme seul allongé sur un lit, avec un bouvreuil (comprenez un oiseau) à ses côtés, « Le Samouraï » est un film noir dans la plus pure tradition de l’époque. Avec un personnage principal taciturne, des intervenants avec des « Gueules », comme on en voyait beaucoup à l’époque. Et puis surtout, c’est un film qui met en place le style « Melville ». Comme dit Philippe Labro dans la section bonus, c’est le film qui signe la naissance d’un génie du cinéma Français. Que ce soit pour sa longue introduction, sans dialogue, sa manière de faire tourner Alain Delon, déjà une star à l’époque, ou encore cette façon si particulière de prendre son temps d’étendre le temps et l’espace dans lequel évolue son personnage principal.
Melville et son co-scénariste Georges Pellegrin (Cartouche) signent ici un scénario qui sort des sentiers battus, avec un tueur qui dés le départ est accusé et qui ne va pas tout faire pour ne pas se faire prendre ! Non, il va être innocenté par une pianiste, qui l’a pourtant reconnue le soir de son méfait, et va alors essayer de comprendre pourquoi elle n’a rien dit. Le film n’use pas de dialogues à foison, mais garde seulement l’essentiel pour mieux amener le public à comprendre que dans un film le plus important ce sont les silences, dés qu’il y a des mots, il n’y a plus grand-chose à voir. Alors le réalisateur prend son temps et écrit une histoire singulière, avec un Delon qui va prendre de l’épaisseur et, surtout, se découvrir dans un personnage qu’il va ensuite (Un eu comme Tom Cruise maintenant) développer de toutes les manières possibles, jusqu’à devenir, à de rares exceptions, son unique style de rôle.
Et pour la mise en scène Jean-Pierre Melville, à l’instar de sa scène d’ouverture, film les espaces, même les plus inutiles, et joue des perspectives pour mieux étirer le temps et ainsi laisser ses personnages prendre la place doucement, mais la prendre mieux que n’importe quelle coupe qui donnerait un rythme plus saccadé, plus rapide et créerait une ambiance qui ne correspondrait pas à ce sentiment que veut partager le réalisateur avec son public. « Le Samouraï » est un personnage solitaire, quoi de mieux d’un long couloir froid et vide où il apparaît tranquillement en montant les marches pour lui faire prendre toute la place qu’il doit occuper ? Et puis quoi de mieux que les bruits la voie ferrées se trouvant en dessous, pour masquer en partie les dialogues dans une scène devenue mythique, celle sur la fameuse passerelle Boulevard Massena qui fut détruite en 2004.
« Le Samouraï » est un film qui signe la naissance d’un très grand réalisateur qui deviendra ensuite une source d’inspiration pour de nombreux cinéastes français mais surtout partout dans le monde : John Woo (Qui reprendra l’idée de la vision de Melville dans « A toute Epreuve » en 1992), Jim Jarmusch (Ghost Dog), Quentin Tarantino (Kill Bill), Joel Coen (Bienvenue à Suburbicon), Michael Mann (Heat) ou encore Johnnie To (Office).