Si la police de San Francisco ne remet pas immédiatement 200 000 dollars à un homme qui vient de commettre un crime, il recommencera au rythme d'un assassinat par jour. L'inspecteur Harry Callahan est sur ses talons.
Bon, est-il besoin de présenter Clint Eastwood, acteur et réalisateur majeur d’Hollywood dont on ne compte plus les chefs-d ’œuvres à son actif : « Gran Torino » (2008), « Million Dollar Baby » (2004), « Josey Wales Hors la loi » (1976), ou encore « Le Bon, La Brute et le Truand » (1966) de Sergio Léone ? Est-il besoin également de présenter « L’inspecteur Harry » (1972) de Don Siegel (L’Evadé d’Alcatraz) qui marqua un tournant dans la carrière de l’acteur ? Le duo Acteur réalisateur n’est pas sans se connaître, car ils ont déjà travaillé sur trois films, trois westerns qui forgeront plus la légende de l’acteur que celle du réalisateur, du moins dans le cœur du public.
Pourtant, le choix du duo n’était pas le premier pour le studio. En effet, le script passe entre les mains de Paul Newman, qui le refusa, puis entre celle de Frank Sinatra qui ne pu s’y engager pour cause médicale. C’est Irvin Kerschner (Star Wars V : L’Empire Contre-Attaque). C’est lorsque Clint Eastwood reçu le scénario qu’il proposa à Don Siegel avec qui il avait travaillé, notamment, sur « Les Proies » en 1971, de le réaliser. Le duo s’empare donc de ce qui va devenir une licence. Car quatre autres films sortiront dans les années suivantes. « L’Inspecteur Harry » marquera un tournant pour Clint Eastwood qui va passer du western au film policier avec un personnage qui fera beaucoup parler de lui, que ce soit pour ses méthodes expéditives que pour son racisme.
Basé sur des faits réels, notamment l’Histoire du « Zodiac » tueur en série qui ne fut jamais identifié, le scénario signe une intrigue efficace qui ne laisse que peu de répit aux spectateurs qui se laisse embarquer dans une histoire sombre où le tueur qui se fait appeler « Scorpio » menace de tuer des gens si la ville ne lui paye pas 200 000 Dollars. Un tueur insaisissable, qui, contrairement à celui qui l’a inspiré va commettre quelques erreurs et permettre à l’Inspecteur Harry e pouvoir arriver au bout de son enquête et de devenir le nouveau héros. Sans, tout à fait jouer la carte de la recherche du criminel pour le public, le scénario va s’amuser à créer une sorte de jeu du chat et de la souris avec un ton volontairement noir et digressif avec un héros moins propre et moins lisse que ce que nous proposait le cinéma américain de cette époque.
Et c’est en premier lieu la mise en scène de Don Siegel, qui, veut également, comme toute une génération de réalisateur des années 70 et 80, en finir avec le cinéma de « Papa », et livrer des œuvres bien plus sombres que ce qui se faisait avant. Ici, la mise en scène se focalise sur la dualité entre les deux personnages dont les différences sont assez fines au point que l’on a du mal à savoir qui est réellement le méchant de l’histoire. Et c’est bien ce qui est payant, car plus la frontière est fine plus il parle à notre instinct primaire. En revanche, si Clint Eastwood a essayé par la suite de faire oublier les penchants racistes de son personnage ont refait surface lorsque l’acteur a décidé de s’engager pou un candidat républicain lors de la campagne présidentielle 2016 et particulièrement lors de son soutien à Donald Trump en 2016.
Mais, il faut bien le reconnaitre, l’acteur s’empare de l’écran et sa prestation toute en froideur colle à un personnage hors des conventions qui arrive à ses fins par des méthodes plutôt expéditives. Eastwood fait preuve d’une grande maitrise et arrive à lisser son personnage pour n’en faire ressortir que majoritairement la noirceur qui le caractérise. Le comédien réalisateur est à un tournant de sa carrière, et il le sait, il donne ainsi toute sa force et joue en permanence de la mobilité ou de la rigidité de son corps pour donner plus de force à son personnage. La musique de Lalo Schifrin (Bullitt) n’est d’ailleurs pas étrangère à la réussite du film tant elle lui donne toute sa nuance et toute sa puissance narrative en soulignant de thèmes parfois agressifs pour mieux nous installer dans un fauteuil de tensions.