Bien avant X-Men et Superman Returns, Bryan Singer a signé, avec Usual Suspects, un thriller surprenant dont le scénario original déroule une intrigue particulièrement efficace. Cette édition Blu-Ray proposée par MGM est de très bon aloi pour un film tourné au milieu des années 1990 et permet de redécouvrir en haute définition ce chef d’œuvre qui ne peut laisser personne indifférent.
Keyser Sausage ?
Au sud de Los Angeles sur les docks de San Pedro alors qu’un navire embarquant près de 91 millions de dollars de cocaïne est à quai, une énorme explosion pulvérise tout aux alentours faisant 37 morts. Seul survivant à ce déluge de feu, Verbal Kint, une petite frappe infirme, est alors mis en examen et interrogé par l’Agent Spécial David Kujan qui mène l’enquête sur cette catastrophe. Acculé, Kint commence alors le long récit qui retrace méticuleusement les faits depuis leur origine six semaines auparavant.
A cette époque et à la suite d’un hold-up qui avait mal tourné, cinq individus furent arrêtés par les autorités pour interrogatoire sans que la police ait l’ombre d’une preuve de leur culpabilité : Dean Keaton (Gabriel Byrne), un ex policier passé du côté des truands, Michael McManus (Stephen Baldwin), Todd Hockney (Kevin Pollak), Fred Fenster (Benicio Del Toro) et Verbal Klint (Kevin Spacey). A la lumière du témoignage de Kint, l’agent Kujan comprend que ces 5 individus avaient alors décidé de se lancer dans une opération de grande envergure pour de se venger de l’affront de la police.
Lors de son interrogatoire par les agents fédéraux, Verbal Klint lâche enfin l’identité du vrai cerveau de cette opération: Keyser Soze, dangereux criminel jamais appréhendé par la police. L’inspecteur Kujan en charge de l’enquête prête alors une oreille toute attentive à ce témoignage, d’autant que désormais, il tient le seul témoin capable d’identifier le légendaire Keyser Soze.
Narration man
Tandis que la narration progresse, Usual Suspects captive de plus en plus l’intérêt du spectateur à travers l’habileté personnelle de Bryan Singer à raconter les histoires. Elle consiste ici, après avoir donné une masse d’informations en début de film, à ne révéler que petit à petit les bribes manquantes nécessaires à la poursuite de notre raisonnement, chaque pièce du puzzle démontant les hypothèses de départ ou apportant son lot de questions supplémentaires grâce au jeu des allers-retours entre le passé et le présent. Un film qui nécessite toute l’attention du spectateur qui ne doit en aucun cas faire une pause en direction des toilettes ou du frigidaire au risque de perdre le fil d’une intrigue odieusement bien ficelée.
A travers ces flashbacks, le réalisateur nous dépeint le principal suspect au cours du jeu des questions-réponses entre le policier implacable et son témoin. Usual Suspects se transforme alors en un film d’atmosphère qui jongle avec le passé et le présent sans respecter aucune règle et entretient la confusion pour donner au film une fraicheur et une énergie que les acteurs nous servent dans le pur style des films noirs des années 50, à travers des personnages aux caractères tortueux.
Quand la parité n'existait pas
Usual Suspect bénéficie d’un casting solide, rugueux, n’hésitant pas à utiliser certains acteurs à contre emploi : Kevin Pollak dans un personnage au sang froid, Kevin Spacey lâche et boiteux, Gabriel Byrne énigmatique et opaque, Stephen Baldwin en maniaque absolu et Benicio Del Toro dont le seul accent indéchiffrable amuse. Si l’on ajoute à cette brochette impressionnante d’acteurs Giancarlo Esposito, Dan Hedaya et Pete Postlethwaite, on obtient un plateau surchargé de testostérone que seule Suzy Amis vient modérer.
Toutes ces « gueules » de porte bonheur du cinéma américain n’ont pas empêché le réalisateur de saupoudrer un peu d’humour dans sa narration, du moins suffisamment pour éviter une certaine lourdeur. L’enquête très classique de début du film se transforme peu à peu en une quête, celle de Kaiser Soze, dont la cruauté et la brutalité font réfléchir a deux fois les individus les plus endurcit s’ils ont à croiser son chemin.
Alors que le film de Singer s’achemine inéluctablement vers son dénouement tout en entretenant un insoutenable suspens qui torture l’esprit du spectateur, la présence de Kaiser Soze se fait de plus en plus pesante, dérangeante et menaçante. Le cinéaste joue ainsi avec nos neurones pendant plus d’une heure et demie à travers cette œuvre extrêmement prenante.
Conclusion
Bénéficiant d’une distribution aussi riche que charismatique, cette édition Blu-Ray de Usual Suspects permet de redécouvrir, dans un confort haute définition optimisé, une histoire au scénario suppliciaire. Brillamment interprété et retranscrivant assez fidèlement l’ambiance des films noirs, Usual Suspects tient en éveil le spectateur jusqu’à la dernière seconde.