Depuis leurs lointains débuts, les Dead MaKabés ont pour
habitude de performer durant toutes les périodes estivales dans d’obscurs festivals
européens.
Le temps qui passe, les différents et les obligations de
chacun finissent par avoir raison des 3/4 de ces participants … s’apprêtant à
avouer au leader l’envie de splitter, ce dernier les devance en leur annonçant
leur participation inespérée au prochain Hellfest Summer Open Air, THE
rendez-vous annuel des adeptes de métal et ses dérivés !
«Allez, un dernier et on n’en parle plus» se promettent le
quatuor parti briller une ultime fois devant une grosse foule en délire, une
vraie. Mais comme ce ne serait pas marrant si tout se passait bien …
LE DERNIER CHANT DU MÉTAL
HURLANT
Une comédie sur des métalleux en France : voilà qui
n’est pas banal pour une première réalisation, d’autant que l’intention de
Martin Le Gall comprend tout de même 2 genres pas qu’un peu blindés d’à priori(s) -
la comédie française (qui, même si on connaît, ne fait pas toujours rire) et le
Métal hexagonal (qui, si on connaît pas bien, peut faire un peu flipper).
Impensable de financer une telle chimie sans faire fuir les
2 cibles ? Il s’agit de trouver dans un premier temps quelques points d’amarrage
afin de contenter le plus grand nombre : ici on tombe sur 4 compères en
crise sur des sujets endémiques (passer le cap de la trentaine où de plus en
plus de choix et leurs répercussions seront à assurer) compromettant à hauteurs
variables la pratique de leur passion. Du coup on a :
* Ceux qui jouent par habitude mais sont mentalement plus
focalisés sur des intérêts familiaux ou professionnels (JP le bassiste (Grégory
Gadebois) bon papa ou Pascal le batteur (Jonathan Cohen) ambitieux patron du
restaurant asiatique le Bonheur-Fu).
* Celui qui continue à vivre avec un sens disproportionné des
réalités, très intéressé par la femme sans pour autant avoir envie de se
stabiliser. Erik le Guitar Hero (Yacine Belhousse) est un peu plus concerné par
ses talents à la gratte, avec à terme le souhait de jouer solo.
* Celui qui est tellement à fond dedans qu’on dirait
une parodie … Il ne désespère pas de voir briller l’étoile de la Gloire au dessus de leurs
têtes quitte à commettre tous les sacrifices, toutes les bassesses … Artiste
incompris et impulsif, il pique sa grosse colère autant face à la médiocrité que
l’approximation … : on comprend sans peine qu’à part le Black Métal et sa mère-grand
souffreteuse, le chanteur Alexandre (Julien Doré) n’a rien d’autre dans la
vie.
Bien que résumant les hauts et les bas de la vie d’un groupe
de musicos méconnu, ils sont avant tout montrés comme une bande de potes de
longue date au détour d’une sacrée histoire : en effet, afin d’être au top
pour le Hell’, Alex a programmé un petit
échauffement-surprise dans un restaurant pour public non averti. L’enchaînement
va finir de bien tragique manière amorçant une traque impitoyable avec les
forces de l’ordre de province.
Là on alterne sur une partie plus conventionnelle où
investigue Martine (Audrey Fleurot). Parallèlement à cela elle éduque seule sa
fille Julia (Délia Espinat-Dief), adolescente distante, boudeuse et fugueuse demeurant
néanmoins important car s’agissant de la seule âme de Saint-Peperac à
affectionner cette catégorie musicale.
Des jeunes en proie au doute et au satanisme, des gendarmes
d’un patelin un peu décontenancés par l’aspect des suspects, une halte dans une
commune célébrant leur fête annuelle où s’opposent noir/cuir/clous avec couleurs/sucre/fraises
… Ce choc culturel alimente une comédie souvent grossière mais pas vulgaire prétexte
à de la gentille pique affective, jouant sur les clichés et le décalage sans
jamais chercher à offenser quiconque. Pour preuve (quasiment) tous les personnages
ont un bon fond, l’ambiance est toute en décontraction, même le background
social est vu de manière légère.
Justement, au titre du film et son avancée, un peu de
variétoche française des 70/80’s mais surtout pas mal de pop baba cool vont
prendre une telle importance que son intégration dans le métal sera (vue
comme) salutaire ! Damnation !! Ce n’est pas aujourd’hui que les adeptes
de cornes avec l’index et l’auriculaire pourront crier justice, bien qu’un
passage amusant démystifiera dans les grandes lignes les sous-genres du métal.
Le montage est bizarre : structure interchangeable (permutez
nos gugusses qui se rendent au Hellfest par des cosplayeurs qui se font la
Japan Expo ou des fans de cyclisme qui
visent la finale du Tour de France aux Champs-Élysées, c’est pareil), chaque séquence
est une scénette construite comme les sketches diffusés avant ou après les
infos sur les chaînes nationales. D’une certaine finesse, les bouches sortent
des dialogues co-fignolés par Alexandre Astier qui, héritant de l’indirectement
comique Chef de la Section
de Recherche pas content, renforce cette impression d’enchaîner plusieurs épisodes
TV où il (ré)interprétait Arthur Pendragon. Autant dire qu’un tiers de votre
temps partira à la corbeille si sa trogne, ses méthodes et son humour ne vous
reviennent pas.
Remarque identique pour Julien Doré : bien qu’embaucher dans
des long métrages des ressortissants du showbizz ou du 4e art peut s’avérer périlleux
(opportuniste ?), la nouvelle star n’en est pas à son coup d’essai et
livre une prestation correcte. Davantage convaincants dans leurs rôles
respectifs, Yacine Belhousse, Jonathan Cohen et Grégory Gadebois concourent
beaucoup à rendre la relation amicale très crédible. Les quelques présences féminines
principales sont réduites à de la belle mise en valeur et une utilité restreinte
à quelques bons mots (mention spéciale pour Michèle (Magali Miniac) l’épouse de
JP).
Mis en scène un peu mieux qu’un bon
téléfilm (au moins c’est lisible, jamais étourdissant, quelquefois un gag visuel
réussi surgit) et rappelant par touches les pérégrinations des Charlots (ceux-là
même qui auraient pu juste rester d’excellents musiciens mais sont allé jusqu’à
affronter Dracula avec un saucisson à l’ail), les MakaBés road-moovent dans un univers où
rigoler et vanner c’est plus facile qu’affronter le pathos ou la dureté (les situations
graves sont des déclencheurs à l’impact limité), le cœur du récit (le clash des
4) se déroulera donc sans méchanceté ou grands heurs. Leur amitié s’exprimant
jamais mieux qu’en musique, il est possible d’interpréter leur évolution dans
ce sens : la rigidité et le comportement excessif d’un meneur enfermé dans
son style (ainsi qu’un manque de popularité ?) iront jusqu’à menacer l’entente
des 4 camarades. Les épreuves les forceront à s’adapter à des sonorités plus
douces et plus grand public, améliorant progressivement leur visibilité, rapports et
qualité de leur composition.
CONCLUSION :
Plus ça avance, moins cela semble un film sur le métal (qui
s’assume) mais plus une comédie avec des éléments de métal dedans et du flower
power à gogo, destinée avant tout à faire un point sans chichis et avec le
sourire sur 15 ans de rêves d’adolescents.
Sauvé par son bon cœur, son écriture, ses références tout
azimut et sa bande son, Pop Rédemption trouvera sans problème ses défenseurs
parmi qui aime Doré, qui apprécie les arrondissements d’angles des personnes extérieurement
différentes, qui fantasme sans relâche sur un Kaamelot sur grand écran, qui se
souvient avec émotion d’un genre de comédie oublié et bien entendu les metalleu(ses)x
pas difficiles certainement content(e)s qu’on ne les fait pas passer pour de
sinistres individus.