L'histoire
Dans une grande maison madrilène vivent trois fillettes, entourées de leur père, leur grande-mère paralytique, leur bonne et leur tante, qui essaient de combler le vide laissé par la mort de leur mère. L'une des soeurs, Ana, dix ans à peine, échappe à l'atmosphère étouffante en se réfugiant dans un monde de rêves. Un jour, le père meurt dans les bras de sa maitresse. Ana est persuadée que c'est la conséquence de son pouvoir magique. Refusant le monde des adultes, elle continue de s'enfermer dans son imaginaire, en faisant revivre le souvenir de sa mère...`
Critique
Cria Cuervos est réalisé par le grand Carlos Saura à qui on doit des films tels que Le jardin des délices, Ana y los lobos, La cousine Angélique, et dernièrement Flamenco, flamenco. Le titre du film s'inspire du proverbe espagnol "Cria cuervos y te sacaran los ojos" (qui veut dire "Elève les corbeaux et ils t'arracheront les yeux") pour exprimer l'ingratitude des enfants envers les parents/adultes.
L'histoire se déroule sous le régime de Franco, dans un univers bourgeois, enfermé, avec plein d'interdits et de non-dits. La liberté d'expression, surtout celle des femmes est étouffée. C'est dans ce monde restrictif que vit Ana, une jeune fille de dix ans qui doit surmonter la douleur causée par la mort successive de sa mère et de son père. Pour ce faire, elle utilise son imagination, (tout comme le jeune Alexandre de Fanny et Alexandre de Ingmar Bergman) et ses souvenirs pour à la fois échapper au monde triste des adultes, et pour retrouver sa mère avec qui elle était très liée.
Le film met l'accent avant tout sur la relation mère/fille qui apparait comme tout puissante, indestructible, que même la mort ne réussit pas à désunir. Tant dis que le père est insignifiant, il incarne l'autorité, la fausseté, la tromperie, les interdits (tout comme le régime franquiste). Sa mort n'affecte pas du tout la jeune Ana.
La réalisation de Carlos Saura est volontairement "banale", simple, sans effets de style ou de montage particuliers, même pour différencier le réel et le monde imaginaire de Ana. C'est efficace et déroutant dans le bon sens. Et cette absence de frontière volontaire entre l'imagination et la réalité colle parfaitement avec la narration du film qui se fait du point de vue de la petite fille, qui ne fait pas de distinction entre les deux mondes.
Cria Cuervos c'est aussi la chanson thème du film Porque te vas chantée par Jeannette, qui exprime idéalement l'atmosphère de ce film, qui est un mélange de tristesse et de mélancolie recouvert par une mélodie légère et enfantine.
L'un des points fort du film est sa jeune comédienne principale Ana Torrent qui irradie l'écran et nous hypnotise littéralement avec son grand regard qui exprime tellement de nuances d'émotion, sans qu'elle n'ait besoin de prononcer une parole. Géraldine Chaplin qui joue le rôle de sa mère et d'Ana adulte est également parfaite dans son interprétation.
Conclusion
Une fois qu'on a vu Cria cuervos, il est difficile de sortir de son univers, celui de Ana, qui nous hante pendant très longtemps. Et ceci grâce à son actrice principale, la chanson Porque te vas et une réalisation maitrisée de Carlos Saura.
Le Blu-ray est encodé en AVC au format 1.66:1 d'origine respecté. Le Master utilisé date un peu, avec beaucoup de traces d'usure comme les poils, poussière, griffures et le générique du début qui tremble un peu. L'image pellicule semble respectée avec la préservation du grain pellicule. En revanche, on peut, hélas, noter quelques soucis de compression dans certains plans, où des blocs de "bruits" de compression viennent perturber l'image.
La VO (espagnole) et la VF sont toutes les deux encodées en DTS HD MASTER AUDIO 1.0. Les deux pistes jouent jeu égal en offrant une écoute de qualité, très satisfaisante. Aucun artéfact, grésillement, coupure, n'est à signaler.