Un étudiant pauvre et tourmenté, René Brunel, tue une vieille usurière, Madame Orvet. Il ne touche pas à l'argent volé mais subit une torture morale de plus en plus insoutenable. Le commissaire Gallet le soupçonne mais n'a pas de preuves, d'autant plus qu'un jeune peintre à l'esprit faible, André Lesur, vient d'être arrêté et a avoué. Lili, une jeune prostituée à la foi peu commune influencera René qui ira libérer sa conscience chez le commissaire.
« Crime et Châtiment » est certainement le film le plus marquant de la carrière du réalisateur Georges Lampin (Les anciens de Saint Loup). D’abord parce qu’il est une nouvelle adaptation d’une œuvre de Dostoïevski, mais également par sa distribution impressionnante : Jean Gabin, Bernard Blier, Robert Hossein et Lino Ventura. Le réalisateur signe ici une œuvre dont l’atmosphère baigne dans une sorte de chemin entre la satire sociale de l’époque et la retranscription presque religieuse d’une œuvre d’un écrivain russe marquant par le regard sombre et précis qu’il portait sur son pays. Considéré injustement comme un metteur en scène tout juste de qualité, Georges Lampin signe tout de même une mise en scène précise, presque théâtrale qui met en valeur tout le talent de sa distribution, sans faire dans l’exagération.
Porté par un scénario de Charles Spaak (Cartouche), le film suit presque de manière obsessionnelle le déroulement de l’œuvre du romancier. On y retrouve tous les thèmes : L’alcoolisme, la famille, la pauvreté, la richesse, a pitié et le remords. Mais réactualisé à une époque plus contemporaine, l’œuvre prend subitement une autre dimension, les personnages devient plus proches du spectateur, moins noyé dans l’histoire. On comprend alors immédiatement que le réalisateur a voulu toucher l’opinion en montrant finalement un jeune homme de bonne famille qui se retrouve pris au piège d’une impulsion créé par l’amour et la tristesse. Le scénario a l’intelligence de ne pas nous assommer de grands monologue, comme il était fréquent à l’époque, mais au contraire, il donne des dialogues justes et touchants aux personnages, y compris les plus sombres comme celui d’Antoine Monestier, antiquaire riche et frustré d’un physique qu’il a appris à accepter mais qu’il n’assume pas. Un personnage sombre qui préfère payer l’amour que lui donne de très jeunes filles.
Mais « Crime et Châtiment » brille surtout par une distribution qui suit une logique précise dictée par le réalisateur. A commencer par un Robert Hossein saisissant de vérité et de lyrisme. Le jeune comédien assume un style très torturé par sa situation personnelle dans la vraie vie tout aussi tourmentée que celle de son héros (le meurtre en moins). Il y a aussi Gabin, magnifique, ombrageux et charismatique. L’acteur affine son rôle de commissaire de police déterminé et intuitif, qui attendra avec patience que le jeune homme trouve la force de s’avouer. Et puis bien sûr il y a Bernard Blier qui amorce avec ce film, une galerie de personnages ambigus, torturés et malsains qui feront sa réputation et la force de son jeu. L’acteur est remarquable de précision et de sensibilité dans ce personnage qui masque ses vices par une apparente bonhomie et une évidente richesse.
En conclusion, « Crime et Châtiment » est assurément, un film réussit qui brille par une mise en scène précise et minutieuse, injustement boudée par les critiques de l’époque qui recèle notamment de véritable bonnes trouvailles notamment dans la direction d’acteurs. La distribution est remarquable d’inspiration y compris les seconds rôles comme Lino Ventura par exemple.