Frank Harris souhaite à tout prix briser la monotonie de sa vie de réceptionniste au Grand Hôtel de Chicago. Il rêve de devenir Cow-Boy, mener une vie d’aventures dans de grands espaces. Aussi, lorsque Tom Reece, riche éleveur de bétail, fait une halte dans son hôtel, Harris saute sur l’occasion : Il parvient, non sans mal, à le convaicre de faire partie du prochain voyage. Hélas, la vie de cow-boy n’est pas aussi attrayante que Harris l’imaginait.
« Cow-Boy » est certainement l’un des films le plus marquant de la carrière du réalisateur Delmer Daves (Les Passagers de la nuit). D’abord parce que le réalisateur s’illustre dans un style qu’il affectionne particulièrement et qu’il lui donne ses lettres de noblesse par une narration surprenante. Le réalisateur signe ici une œuvre dans laquelle le cow-boy sort de son habituel image d’Epinal entre romance et duel, ici le quotidien de ces hommes des grands espaces apparait beaucoup moins idyllique que dans les grands films de John Ford et consorts. Le ton est rigoureusement moins caricatural que dans les westerns classiques. Ici, pas de duel, ni de bagarre avec des indiens, pas de justiciers ni de code d’honneur ou de morale pesante. Les personnages apparaissent rugueux, avec des manières peu orthodoxes un code de vie parfois brutal et beaucoup moins exemplaire qu’il n’y parait.
Porté par un scénario de Edward H. North (Patton) et Dalton Trumbo (Johnny Got His Gun) le film suit presque de manière obsessionnelle l’évolution d’une intrigue plus proche du documentaire que du film d’aventure à destination des familles et plus particulièrement des enfants. On y retrouve pourtant tous les codes du genre : Des cow-boys en bande qui dirigent des troupeaux, une femme amoureuse qui attend le retour de son homme et même les rodéos présentés comme des corridas ‘un autre genre On comprend alors immédiatement que le réalisateur a toutefois voulu y mettre une touche plus personnelle avec des personnages moins caricaturaux qu’ils n’y paraissent, sans pour autant briser les valeurs du genre. Ainsi, les personnages sont d’abord présentés comme des gens de redoutablement normaux, mais dont la vie n’est pas du tout telle que l’on pouvait l’imaginer avec des attitudes parfois choquantes. Le scénario a toutefois l’intelligence de ne pas nous assommer de grands monologue, comme il était fréquent à l’époque, mais au contraire, il donne des répliques assez justes et parfois touchantes aux personnages, comme lorsque que Frank Harris s’offusque qu’un des membres de la troupe récupère les bottes de son collègue mort d’une morsure de serpent.
Mais « Cow-Boy » brille surtout par une distribution qui suit une logique précise dictée par le réalisateur. A commencer par un Glenn Ford (Cow Boy) saisissant de vérité et de lyrisme en chef de bande sans état d’âme mais à l’honneur intacte. Le comédien assume un style très nuancé entre charisme et froideur. L’acteur affine son rôle et impose un personnage inquiétant et charmant à la fois, tout en ambiguïté et en force. Et puis bien sûr il y a Jack Lemmon (JFK) dans l’un de ses premiers films. L’acteur est remarquable de précision et de sensibilité dans ce personnage idéaliste et rêveur qui voit ses ambitions biens malmenées par une vie beaucoup moins enrichissante qu’elle n’y paraissait.
En conclusion, « Cow Boy » est assurément, un film réussit qui brille par une mise en scène précise et minutieuse, dont le réalisateur est injustement oublié des grandes heures d’Hollywood, alors qu’il signe certaines des grandes réussites du genre. La distribution est remarquable d’inspiration y compris les seconds rôles.