« Heaven adores you » est une enquête intime et méditative de la vie et de la musique d’Elliott Smith (1969-2003). A travers son œuvre importante, malgré son jeune âge, qu’il a composé, souvent isolé dans des villes importantes dans son existence telles que Portland, New-York City et Los Angeles, « Heaven Adores you » offre un voyage visuel et une réflexion sérieuse sur ce chanteur prolifique et l’impact qu’il continue d’avoir auprès de ses fans, amis et musiciens.
Bon, alors « Heaven Adores you » est un film qui met autant en colère qu’il n’émeut le spectateur. Il émeut parce qu’il parle d’un artiste de talent qui vécut pour la musique, avec passion, parfois avec excès mais toujours avec brio. Pas très connu par chez nous, il n’en demeure pas moins un compositeur de talent qui a su marquer les années 90 par une sorte de schizophrénie artistique remarquable. Porteur d’une musique rock intense, énergique, et parfois violente au sein de son groupe « Heatmiser », dont la musique est cataloguée dans un style plutôt Punk et Grunge, lorsqu’il se lance en solo, c’est pour signer des morceaux épurés, acoustiques et d’une profonde mélancolie.
« Heaven Adores you » permet aux fans de mieux comprendre la force créatrice de l’artiste et les doutes et combats qu’il a dû mener tout au long de son existence. C’est surtout une opportunité incroyable pour les néophytes de découvrir un artiste tout en nuance, d’une grande franchise, mais également d’une remarquable pudeur qui l’empêche de trop se livrer sur ses fêlures et sur les inspirations qui l’on amené à composer et écrire des chansons aussi intenses et marquantes. Du coup, le néophytes, dont je faisais partie, ne peuvent s’empêcher de courir se plonger dans la musique d’Elliott Smith et de se laisser porter par ses chansons simples et épurées mais en même temps d’une complexité rare. Comme un pied de nez au destin, l’artiste pose une voix planante presque liturgique sur ses mélodies et crée ainsi une œuvre enveloppante et cotonneuse.
Seulement, le réalisateur Nickolas Rossi, se laisse prendre au piège de la nostalgie et peut-être de la mélancolie d’une vie inachevée, puisque son film est une succession d’interviews qui revient sur la vie (trop courte !) du musicien, avec un environnement visuel, sur les lieux emblématiques de son parcours : Portland, New-York City et Los Angeles, mais un mixage surprenant efface les musiques d’Elliott Smith. C’est visible et choquant dès les premières images lorsque le documentaire parle de la chanson « Miss Misery » présentée lors de la cérémonie des Oscars. On a l’image mais pas le son. Les voix off prennent le pouvoir et si la surprise est accompagnée du doute et de questions, on se rend très rapidement compte que tout le film suivra cette étrange logique. Des morceaux effacés qui force à pousser le volume quasiment à fond pour les entendre. Incompréhensible ! Une question de droit ? Une volonté artistique ? Le résultat est là ! Du coup le spectateur s’enferme dans une profonde frustration qui fera, au final, de ce film une épreuve.
Si le propos est passionnant, puisqu’il permet de découvrir un artiste et donne l’envie de le découvrir musicalement, la réalisation soigne son effet visuel, mais se lance dans une très longue homélie en oubliant de mixer à sa juste valeur la musique du chanteur qui se retrouve quasiment effacée durant tout le documentaire. Une hérésie révoltante !