Jack, jeune comédien au chômage souffrant de claustrophobie, occupe pendant quelque temps l'appartement d'un ami. Profitant de la vue panoramique, il observe sa charmante voisine, Gloria, dont il ne tarde pas à devenir fou amoureux. A force de l'épier, il assiste un jour à l'assassinat de la jeune femme...
Vers la fin des années 70, des réalisateurs sont venus bousculer les codes de la sacrosainte Hollywood qui ne cessait de s’enfoncer dans on conformisme de façade. Il ya les plus célèbres, les plus « Bankable » : Spielberg et Lucas, les plus courageux : Scorcese et Coppola et le plus iconoclaste : Brian De Palma. Ce dernier après avoir réalisé des chef d’œuvres tels que « Obsession », « Blow Out » ou encore et surtout « Scarface ». Le réalisateur aime utiliser les regards, le rapport sensuel qui peut lier des personnages qui ne se connaissent pas forcément. C’était déjà le cas d’une certaine manière avec « Obssession », ce le fut moins avec « Scarface ». Mais avec « Body Double », Brian De Palma va pousser les codes de la narration un peu plus loin en frôlant les frontières de l’érotisme.
Et ce qui frappe d’avance le spectateur c’est un ton volontairement léger qui force le trait du décalage du personnage principal interprété avec beaucoup d’inspiration par Craig Wasson (The Outsiders). En effet alors que le résumé du film annonce un thriller sensuel, le héros fait sourire, il est presque lunaire, naïf même. Appuyé par un générique qui rappel les vieux d’horreur des années 50 et 60, l’ensemble semble fait pour dérouter le spectateur qui ne sait pas réellement vers quoi il se dirige. Et d’un seul coup, le scénario glisse ostensiblement vers le drame pour ensuite se diriger vers un thriller dont le point d’orgue se trouve dans l’œil de ce comédien raté et voyeur quoi va, dans un premier temps, éprouver une fascination un peu perverse pour sa voisine pour dans un deuxième temps vouloir devenir son ange gardien pour mieux s’en approcher.
Mais Brian De Palma n’est pas un homme qui aime la facilité, il adore particulièrement jouer sur la sensualité des femmes qui fait tourner la tête des hommes, il aime plus que tout les intrigues qui ne sont pas si limpide que ça et enchaîne les fausses pistes, entraîne inexorablement le spectateur dans les méandres d’une enquête qui va le captiver pour ne jamais le lâcher jusqu’à un final déstabilisant. Avec une mise en scène soignée qui utilise autant le décor comme ultime personnage que les environnements artificiels dans lesquels évoluent ses personnages à la fois sobres et caricaturaux. Les mouvements de caméra créent une sensualité rare, que l’on ne voit que chez ce réalisateur, ou éventuellement dans une autre manière chez Scorcese.
Découvrir ou re-découvrir « Body Double » c’est entrer dans une œuvre majeure du réalisateur. Une œuvre dans laquelle il utilise la caméra pour mieux mettre ne valeur, non seulement la beauté des corps, mais la sensualité qui se dégage de leurs attirances physiques ou psychiques. Avec un regard virtuose, Brian De Palma tisse un thriller implacable tout en emmenant le spectateur dans divers styles narratifs. En se reposant sur des compositions précises et bien dirigées de Craig Wasson et bien sûr Mélanie Griffith (Working Girl) qui impose son charisme et sa sensualité assumée dans le rôle d’un personnage déstiné, au départ, à une actrice porno. Le film est une grande leçon de cinéma qu’il est important de voir pour cerner les qualités de ce réalisateur hors pair.