Février 1916. La Première Guerre mondiale dure depuis deux ans. Elle a déjà fait plus de 3 millions de morts. Et pourtant, aucun des belligérants ne parvient à prendre l’ascendant sur l’autre.
Un seul mot suffirait à résumer « Apocalypse » : Exceptionnelle. La série réalisée par Isabelle Clarke et Daniel Costelle adopte le parti de narrer de manière brut et sans concession, l’histoire de cette bataille sanglante et meurtrière où des milliers d’hommes en sortirent brisés, défigurés ou psychologiquement abîmés pour le reste de leur existence. Car Verdun, ce n’est pas seulement le nom d’une bataille, c’est la représentation même de ce que fut la guerre de 14-18 : un conflit meurtrier où les canons déchiquetaient les corps et éparpillaient les chaires de soldats perdus dans un conflit qui les enterrait vivant.
« Apocalypse », n’est pas seulement un documentaire sur Verdun, c’est une nouvelle vision de cette part de l’histoire de la première guerre mondiale, où rien n’est oublié, qu’il s’agisse de l’horreur des combats, des décisions des Etats ou encore du rôle de Pétain, à ce moment encore considéré comme un dirigeant humain et sensible, avant qu’il ne montre un tout autre visage 30 ans plus tard. Ne cherchant jamais à sur-diaboliser les faits, les réalisateurs se sont attelés à rendre le plus proche de nous possible, cette bataille qui fut marquante dans tous les esprits d’historiens aux écoliers sans jamais réellement imaginer la réalité de ce que vécurent ces soldats. A l’aide d’images inédites, pour certaines colorisées et pour d’autres prises sur le fait dans les tranchées et autour, on assiste avec une certaine brutalité à la réalité de ce conflit.
Et bien sûr, parfois cela fait mal, cela dérange ou rebute, tant la cruauté de certaines images est parfois insoutenable, mais la bataille de Verdun, ce n’était pas seulement des phrases dans des livres d’histoire, une date ou un repère, c’était le symbole même d’une guerre qui fit des millions de morts pendant les 4 années que durèrent son conflit et qui vit pour la première fois l’utilisation de l’artillerie lourde. Et cela les réalisateurs l’ont bien compris et « Apocalypse : Verdun » sort subitement du lot des documentaires traditionnels. Ici les regards humidifient les yeux et la détresse fait couler des rivières de larmes matinées de honte. Car même installé confortablement dans notre fauteuil, on ne parvient pas à retenir une certaine honte d’oublier parfois cette blessure profonde dans l’histoire de la première guerre mondiale, ces hommes qui furent ensuite surnommés : Les gueules cassées. Et lorsque le corps n’était pas brisé, beaucoup y perdirent l’esprit.
Et même si la narration de Mathieu Kassovitz se fait parfois en retrait, elle parvient à nous faire comprendre, l’état d’esprit de l’époque, les raisons et les choix des généraux, l’impact sur les soldats, le rôle des femmes dans le conflit, les victoires, les défaites et surtout les conséquences sur la population de soldats et de civils. Le texte sobre, contraste avec la férocité des images mais finit très vite par capter l’intérêt du spectateur.
En conclusion, « Apocalypse Verdun» est un documentaire exceptionnel qu’il faut se procurer d’urgence, afin que la mémoire ne s’efface pas et qu’au contraire, elle parvienne à nous rappeler que Verdun ce fut bien plus qu’une bataille, ce fut le symbole même de l’horreur de la première guerre mondiale. Que des centaines de milliers moururent sur ces terres, par les canons ou par la boue, par la maladie ou par la boue. Une bataille qui marqua les survivants de toutes les manières possibles. Une superbe leçon d’histoire, qui agit en miroir avec nos contemporains.