Étrange petit garçon de dix ans, à la grosse tête toute noire et encapuchonnée sur un tout petit corps, Joris Jurgen, bien qu'orphelin, coule pourtant des jours très heureux aux côtés de son vieux « Papycha » de Kerubim Crépin, un vieil Ecaflip (chat humanoïde) brocanteur dans cette majestueuse cité de Bonta et un brin affabulateur avec tous ses récits d'aventures passées (les téléspectateurs de la série « Dofus : Aux Trésors de Kerubim » me comprendront).
Mais, à la veille de la commémoration du dixième anniversaire du sacrifice du héros local pour défendre Bonta contre la folie destructrice de sa propre femme, Julith, et du match de Boufbowl qui doit clôturer la soirée, auquel doivent se rendre Joris et Kerubim pour y rencontrer la méga-star Khan Karkass, tout bascule : Julith, « la bouchère » que tout le monde croyait morte, est de retour... et veut prendre sa revanche !
Avec l'aide de ses amis (de toujours et nouveaux), Joris arrivera-t-il à sauver cette cité (qui pourrait bien lui révéler quelques secrets) ?
Présenté par Anthony « Tot » Roux (co-scénariste du film et créateur historique et directeur artistique d'Ankama) comme quelque chose d'épico-burlesque, poursuivant l'esprit des MMROPG d'Ankama et des deux séries animées en étant issues (« Wakfu » et ce « Dofus : Aux Trésors de... » que le film poursuit), qu'on se le dise tout de suite « Julith » ne sera pas un grand n'importe quoi à la limite de la crise d'épilepsie, comme a pu être critiqué un truc comme « Pokémon », mais bel et bien une réussite, qu'elle soit technique, graphique et d'un point de vue scénaristique et animé, ne s'adressant pas qu'à ces kidultes de la « Génération Dorothée » (cf. certains bonus et profils des artistes) mais aussi et surtout à leurs enfants.
S'il ne vous sera pas obligatoire d'avoir joué à l'un des deux titres vidéo-ludiques développés depuis 2003 par la société Lilloise et/ou d'avoir vu au moins l'un des épisodes de l'une des deux séries évoquées plus haut pour vous plonger dans cette très belle aventure, il serait plutôt préférable que vous soyez déjà réceptifs aux romans d'héroïc-fantaisiste du regretté Terry Pratchett, avec son « Disque-Monde » (plat et circulaire, soutenu par quatre éléphants eux-mêmes juchés sur la carapace d'une tortue gigantesque naviguant lentement dans le cosmos et dans lequel La Mort lui-même n'arrête pas de croiser un mage foireux et va vivre ses propres aventures) plutôt que de connaître par cœur la géographie de la Terre du Milieu de J.R.R. Tolkien pour vous sentir à l'aise dans les ruelles chamarrées de cette superbe Bonta.
Non, ce film ne sera pas n'importe quoi mais, au contraire, un récit épico-burlesque bien construit sachant habilement mêler et équilibrer l'action, la comédie et l'émotion, nous faisant passer des cris de joie, aux rires (avec ce personnage de Khan Karkass qui n'est pas sans rappeler celui de Tristepin dans « Wakfu », héroïque figure de l'idiot de la confrérie à plusieurs reprises) et larmes ou vice-versa, aisément.
Mais, il faudra déjà en accepter certains concepts de base...
Si les enfants (biberonnés aux films Disney et leurs héros animaliers anthropomorphisés) à qui est offert ce film (comme les séries) accepteront très facilement de voir de vieux chats défendre des orphelins et des petites chiennes, avec l'aide de puissantes souris quand d'étranges créatures, leurs parents devraient accepter et comprendre plus facilement certaines autres allusions de ce long-métrage non dénué de morale pour autant -et je ne pense pas qu'au nom tendancieux de la cité ennemie Brâkmar ou le jeu de séduction entre Bakara et Khan, etc.
D'influence nipponne et avec l'aide du directeur invité de l'animation « Yoshi » Tamura (apportant à l'équipe de plus d'une centaine d'animateurs ses dix années d'expérience Disney) sur un tel défi, quelques éléments de culture pop US pointent pourtant aussi le bout de leur « nez », il me semble, que ce soit dans la puissance de la cape de Julith (qui rappellera à certains celle de Spawn ou celle téléportrice du mutant Marvel, Cape) ou l'un de ses messages du film : de grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités. Des valeurs que l'oncle Ben a inculqué à son neveu et fils adoptif Peter Parker (un autre orphelin célèbre) avant que celui-ci ne devienne Spider-Man (un autre héros adoré des enfants) et que l'on retrouvera ici ou presque, pour exemple, dans le discours du Dragon d'Ivoire lorsqu'il doit choisir un nouveau gardien.
Héroïque récit cherchant à apprendre à nos petits l'importance des valeurs tout en les initiant à ce qu'est la morale (que même « la bouchère » Julith semble retrouver une fois l'un des secrets révélé) « Julith » leur apprendra aussi à appréhender les événements sous différents angles : les flashbacks nous donnant finalement une autre vision que celle de départ du terrible événement qui a poussé Jahash à se sacrifier.
Sacrifice étant l'un des autres maître-mots de ce récit... du début à la fin, quitte à sacrifier sa famille ou du moins son bonheur au sein de celle-ci pour les sauver ou sauver tout le monde, plus simplement.
Et si, comme je l'ai écrit plus haut, ces orphelins chers à Jules Renard (l'auteur de « Poil de Carotte ») semblent être fréquemment de possibles héros et super-héros, ce film est aussi et surtout un véritable message familial : Lillote répétant assez régulièrement à notre jeune héros que sa famille ce sont eux en fait, Papycha et elle, et non celle que ce petit garçon orphelin se fantasme (deux joueurs de Boufbowl) ou retrouve. Sa famille étant autant celle que l'on s'est composée que celle dont est issue, celle de cœur comme celle de sang.
Tot (qui s'sest composé sa propre famille professionnelle : Xavier « Xa » Houssin, directeur artistique d'Ankama depuis plus de quinze ans, Camille « Kam » Chafer et Olivier Comte (les co-fondateurs d'Ankama) et d'autres collaborateurs) rappelant que, pour lui, l'un des grands sujets de son univers multimédia est la famille et les relations qui la composent, que cela soit entre frère et sœur, avec la perpétuelle comparaison à des frères aînés trop exemplaires, voire les personnages de Bakara et Atcham, ou au sein d'un couple, comme Jahash et Julith...
Alors, en pleine période de cet UEFA, n'hésitez pas à vous diriger vers les arènes centrales de Bonta pour peut-être assister à un magnifique match de Boufbowl mais surtout à la fin de la série « Aux Trésors de Kerubim » et ces révélations sur les personnages Papycha et Joris, tout en vous offrant une séance de rattrapage à un beau et grand spectacle (les entrées en salles mettant, pour le moment, à mal les éventuelles suites) qui vous fera réviser Corneille (et je ne parle pas du chanteur) : « Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années ».