1945. Danemark. Fin de la Seconde Guerre Mondiale. Plusieurs soldats allemands, à peine sortis de l’adolescence, sont faits prisonniers par l’armée danoise et envoyés en première ligne pour désamorcer les mines enfouies le long de la côte. Pour eux, la guerre est loin d’être terminée. Inspiré de faits réels, Les Oubliés raconte cet épisode tragique de l’Histoire.
La seconde guerre mondiale fut le théâtre d’une tragédie mondiale qui fit des ravages de chaque côté des camps opposants, car si après les chants de la victoire ont suivi en sourdine ceux de la désolation et de l’envie d’effacer ces quatre années de conflits sanglants et d’épuration ethniques, il y avait aussi une envie de vengeance qui se nourrissait du gout du sang de l’ennemi et faisait perdre toute humanité dans l’esprit de ceux qui furent opprimés pendant le conflit. S’il est difficile de porter un jugement sur les actes ou les pensées des uns ou des autres, on peut toutefois ouvrir son esprit en acceptant l’idée que tous les allemands n’étaient pas convaincus du bien-fondé de leurs dirigeant et encore moins ces jeunes hommes enrôlés de force dans une armée qui les abandonna aux mains des vainqueurs pour supporter l’humiliation du perdant dans des conditions souvent inhumaines.
Et le film de Martin Zandvliet (The Model) s’intéresse justement à ces jeunes hommes qui furent envoyés sur les plages du Danemark pour déminer les plages en l’absence de détecteurs que l’industrie n’est pas en capacité de produire à cette période. N’étant plus humains aux yeux des vainqueurs, le symbole de l’oppression défaite pour les habitants, les jeunes soldats allemands fait prisonniers lors de la Libération furent envoyés sur les plages pour déceler et désamorcer à mains nues les mines abandonnées par l’ennemi. Avec une sobriété et un sens de l’émotion qui force le respect, le réalisateur nous entraîne dans les dessous d’une page passée sous silence pour mieux nous amener à comprendre la détresse de ces jeunes qui : « appellent leur mère lorsqu’ils ont peur ou qu’ils ont mal ». Avec une sobriété évidente mais aussi un sens de la narration évidente, pour mieux amener le spectateur à comprendre ce que peuvent ressentir les jeunes héros de l’histoire mais également les habitants et les geôliers chargés de les conduire chaque jour sur les plages.
Jamais dans la surenchère de jugement, le scénario de Martin Zandvliet s’intéresse à ce mécanisme qui transforme les victimes en bourreau aveugles. Mais loin de porter l’hallali sur les uns ou sur les autres, le scénario expose les faits et fait évoluer les personnages au fur et à mesure que les événements apportent une modification de la routine qui s’impose petite à petit, avec toujours cette petite subtilité qui pousse les uns et les autres à modifier son jugement et à redevenir humain ou au contraire à se rendre plus implacable.
Le tout est évidemment porté par une distribution remarquable qui compose des personnages aussi différents les uns que les autres mais plongés dans la même horreur quotidienne. Dont un qui n’est pas sans rappeler un personnage de Pasolini dans « Salo ou les 120 journées de Sodome », qui va tenter de séduire ou de tenir tête à ses bourreaux pour mieux les imprégner. A la différence qu’ici le personnage de Sebastian, magnifiquement interprété par Louis Hoffman (Seul dans Berlin) cherche avant tout à protéger ses collègues de traitements désastreux et en même temps à trouver un dialogue constructif avec son geôlier. Face à lui Rolland Moller (Atomic Blonde) impose une justesse impressionnante dans le rôle de ce Sergent qui doit accompagner chaque jour ces jeunes prisonniers vers une mort certaine.
En conclusion, « Les Oubliés » lève un voile tout en nuance sur une page à la fois honteuse et nécessaire de l’histoire de la seconde guerre mondiale. Porté par une mise en scène et un scénario tout en nuance, le film s’impose comme une véritable réussite sur la narration de cette période sombre de l’histoire européenne.