Formé quelque part au fin fond de cet État agricole du Midwest américain, bercé entre de rudes hivers et de caniculaires étés, qu'est l'Iowa (titre de leur second album), dans la capitale de Des Moines, un jour de janvier 1995 par cinq jeunes (dont M. Shawn Crahan, bruyant batteur, l'évincé Joey Jordison et le regretté Paul Gray à la basse) sûrement moins portés sur la religion que leurs autres concitoyens et qui voulaient « tout casser » avec leur zik, mais refusaient de devenir des putains des rock-stars, avec l'adulation et toute l'euphorie qui va avec, etc, etc (et on ne peut pas dire que ces couillons aient réussi sur ce plan là...), décidant de jouer masqués (Shawn caché derrière ses fûts et un masque de clown, Paul allant se faire connaître avec un masque porcin, Joey un masque du théâtre traditionnel japonais blanc, quand d'autres enfilent des collants sur leur tête, une cagoule de bourreau ou des bandelettes, etc) et de ne rien laisser transparaître sur leurs identités ne se révélant être que des numéros (de 1 à 9) comme indiqué sur leurs combinaisons de prisonniers (orange à leurs débuts), Slipknot s'est depuis fait connaître et reconnaître sur la scène rock internationalement... et bruyamment.
Si on ne peut nier que cette idée de masquer leurs identités (secrètes -comme des super-héros du rock: ce qui aurait pu frôler les super-zéros s'ils n'avaient pas assurer musicalement et scéniquement derrière) a servi à appuyer cette réputation et faire leur légende (et qui a depuis fait écho, même dans la scène rap US, cf. Hollywood Undead pour exemple, alors que leurs poulains de Mudvayne ont abandonné les masques avant de tout abandonner en 2010), les millions d'albums vendus des neuf ou sept (selon la période) poulains de Ross Robinson -producteur de groupes comme Korn (leaders de la scène néo-metal à laquelle sont affiliés Slipknot), Limp Bizkit ou Sepultura et Soulfly, autres groupes représentatifs d'une musique violente destiné à de jeunes excités- ont, eux, assuré le service « après-vente » et appuyé la posture du groupe, oscillant entre un son brutal aussi peu original put-il être critiqué à sa sortie (ces prestations scéniques quasi anonymes n'étant que le seul buzz du groupe prétendront les plus mauvaises langues) pour leurs débuts avant de glisser vers quelque chose de plus mélodique et réussi, quitte à diviser et perdre de leurs fans de la première heure, mais toujours aussi énergique et agressif!
Apparus dans les univers vidéo-ludiques (en tant que persos cachés du jeu d'action « Infected » sur PSP ou à travers des titres à reproduire en presque air guitar sur les plus « classiques » « Guitar Hero » 3 et 6 : « Before I Forget » et « Psychosocial ») et en caméo brutal et musical dans l'actioner remake décérébré « Rollerball » de John McT' en 2002, à l'instar de groupes « kultes » précédents (Kiss, pour qui, entre un leur propre comics-book dessiné de leurs propres sangs selon la légende et des apparitions dans des épisodes de « Scooby-Doo » et un film « Contre les Fantômes » oubliables, on ne compte plus les produits dérivés, les Four Horsemen de Metallica, qui ont eu leur propre « Guitar Hero » ou dont certains membres fondateurs aiment à jouer les guests dans « American Trip » ou divers animes plus ou moins alternatifs, « Metalocalypse » et « Skylanders Academy », oui, oui, ou Ozzy Osbourne qui a eu son propre show de télé-réalité, « The Osbournes » et vient taper des caméos dans son propre rôle ou non chez des amis réalisateurs et acteurs, etc), les clowns de l'Iowa, années après années et albums après albums, se sont donc imposés sur la scène musicale internationale et ont fait plus qu'envahir les murs des chambres d'adolescents en mal de rébellion, les tee-shirts informes et déformés de jeunes en manque de goût vestimentaire, et laisser leur S tribal caractéristique sur les coins de tables de salles de classe, les sacs US d'étudiants végétant sur les marches de leurs établissements ou des places voisines, voire des carrés de peaux juvéniles...
Summum de la reconnaissance -et d'être devenus autre chose qu'un nom qui veut dire plus que « nœud coulant » simplement- comme d'autres avant eux (Ozzy Obsourne et son OzzFest de 1996 à 2013, Korn et leur Family Values Tour de 1998 à 2007, ou l'alternatif et ressuscité Lollapalooza des Janes' Addiction dans les nineties et depuis 2005 et fort d'une édition parisienne désormais...), Slipknot créera à l'été 2012 son propre festival, le KnotFest, entourés des potes de Deftones, Serj Tankian de System of Down, Machine Head et d'autres.
Comme l'annonçait M. Shawn Crahan, l'un des clowns fondateurs du groupe, au magazine « Rolling Stone » à l'époque, il était temps pour eux de s'investir dans ce KnotFest qu'ils contrôleront et leur permettra de jouer avec qui ils veulent, proposant également à leur public acquis (et surnommés par le groupe « maggots », vers) de s'éclater durant ce « sombre carnaval » sous des chapiteaux de cirque, dans d'horribles manèges, d'assister à des performances burlesques, etc, etc, aussi -l'esprit festif et alternatif du festival annuel, Gathering of the Juggalos, des clowns du rap US que sont les anciens catcheurs d'Insane Clown Posse n'étant pas loin (la surveillance accrue du FBI en moins).
Multipliant encore et toujours les scènes pour accueillir un maximum de groupes amis pour le plus grand plaisir et les acouphènes de leur public, et après une précédente édition japonaise, nos (super) héros masqués débarquèrent donc avec leur pyrotechnie et tout ce bardas démoniaque détourné et grand-guignolesque pour cette troisième édition dans la capitale mexicaine cette nuit d'hiver sud-américain en 2015.
Concert final d'une journée de festivités mexicaine (à la veille de leur traditionnelle fête de la Vierge Notre Dame de Guadalupe fériée la semaine suivante) ayant réunis, entre autres, sur les deux scènes proposés à ce public de vermisseaux (« Gusano » signifiant en espagnol vers) sautant et headbanguant des groupes comme The Dillinger Escape Plan, Ill Nino, Atreyu, Trivium, HIM (et le love-metal des finnois e dénoter dans cette programmation me diront les connaisseurs), ou Megadeth, et face aux black metalleux romantico-satanistes de Cradle of Filth sur l'autre scène, cette « journée des vers »pourra désormais s'achever autant de fois que vous le désirez en plein cœur de cette nuit mexicaine une fois que vous aurez glisser cette galette (ce taco composé de bruit, de fureur, de dévotion, de passion et de pyrotechnie?) dans votre lecteur de salon !
Leur public chaud comme un adolescent devant le strip-tease alcoolisé et onduleux de la bomba latina Salma Hayek dans « Une nuit en enfer », il était évident que ce soir-là les musiciens stars de Des Moines n'allaient pas recevoir la pauvre dépouille d'un lapin sur la gueule comme lors de leur désastreuse prestation (suite aux débordements incompréhensibles d'un public rageux et haineux qui aurait mieux fait de quitter le show que le pourrir) en juin 2004 au FuryFest du Mans (ancêtre du renommé HellFest que Slipknot a depuis refait en tête d'affiche et plébiscité) : les milliers de têtes brunes devant eux allant faire sauter leurs cojones et presser leurs opulentes poitrines contre des dos suants et détrempés quasi-religieusement durant toute cette prestation, ici, focalisée sur le show des membres, Corey Taylor (numéro 8) derrière son masque de visage humain écorché et recousu en tête.
Concert de l'hydre du nu-metal devant une foule gigantesque, « Day of the Gusano », témoigne de l'expérience et de la maturité de ce groupe vieux (alors) de vingt ans et qui, tout en se relevant de la disparition de l'un des leurs (le fondateur bassiste Paul Gray alias Porky ou 2, mort d'une overdose accidentelle de morphine), continue d'enchanter son public acquis, l'enthousiasme et l'amour des leurs transpirant sous ces masques, à mesure que s’enchaîne cette setlist composée de titres regroupant toute leur discographie... mais que se sont, par contre, essoufflés le chaos scénique et la subversion belliqueuse des débuts après toutes ces années : ce concert en famille pouvant sembler un peu trop statique pour ce qu'il est et à quoi on pouvait s'attendre, concentré sur la scène, si le montage et les jeux de caméras ne compensaient pas l'âge et le professionnalisme du groupe.
S'il peut être à réserver aux fans de films d'horreur (leurs titres « My Plague » et « Vermilion » apparaissant dans les béo de deux « Resident Evil », mais certains masques des membres semblant puiser leur inspiration directement dans ce registre : « HellRaiser » avec les clous démesurés du clavier et guitariste Craig Jones, « Vendredi 13 » avec le masque de hockey du guitariste Mick Thomson, « Blade Runner » avec le masque blanc au long nez du batteur Chris Fehn, « The Crow » pour le guitariste James Root ou quelque chose entre « Halloween » et « Massacre à la tronçonneuse » pour le chanteur Corey Taylor) et fans purs et durs du groupe, ce concert peut être aussi une très bonne plongée et découverte pour les curieux que vous devez être.
Oreilles sifflantes et torticolis plus assurés que des cauchemars...