Ce film unique en son genre montre le peintre et génie Pablo Picasso en pleine création. Au gré de son inspiration, l'artiste compose plusieurs œuvres sous l'œil de la caméra du réalisateur Henri-Georges Clouzot.
Réalisateur révéré par les uns et honnit par les autres, Henry-Georges Clouzot n’en n’est pas moins un cinéaste inventif et inspiré qui a signé certaines des plus belles œuvres de notre patrimoine cinématographique comme : « Le Corbeau » (1943), « Quai des Orfevres » (1947) ou encore « Le salaire de la peur » (1952). Toujours à la recherche des méandres de la créativité artistiques, Clouzot rencontre un artiste unanimement adulé : Picasso. Face au génie, le réalisateur essaye de mettre en image la création en marche, fait parler l’œuvre avant le peintre, fait s’effacer l’artiste pour que l’art prenne toute sa place dans l’esprit du spectateur.
Alors dès que le film commence le spectateur se trouve face à un carré blanc qui envahit l’écran, puis une ligne apparait, qui deviendra courbe ou diagonale ou encore point pour se rejoindre avec une autre qui semble suivre une sorte d’anarchie réglementée. Et puis soudains dans un élan frénétiques les courbes s’agitent se multiplient et deviennent corps, femme et hommes, humain ou animal. Le tableau se mut doucement devant nous comme e ferait un papillon au cœur de sa chrysalide. On se laisse porter, par ces deux corps qui apparaissent, puis les courbes et les points s’éloignent prennent le reste du cadre pour signifier les contours, plonger le spectateur dans une chambre entre un peintre et son modèle. On s’extasie, on s’émeut d’une telle beauté si aisément, semble-t-il, interprété devant nous. Et dans ce noir et blanc, volontairement sans âme, c’est la beauté d’une esquisse maître qui est née devant nous.
Et alors que l’on pense la toile achevée, de gros traits épais surgissent, une couleur qui bave ! Horreur, que faut l’artiste ? Il détruit son œuvre ? Il la mutile par un excès de colère ? Non, ces traits, ces bavures sont encore une fois la preuve du génie, car elles trouvent une place précise que l’on n’imaginait même pas. Ce n’est plus une esquisse c’est une peinture, et ce noir et blanc qui semblait nous gêner laisse alors la place à une œuvre en marge dans laquelle les nuance sont en transparence pour mieux toucher le génie. Clouzot ne dit rien, Picasso non plus, ce sont les poils du pinceau qui donnent à l’ensemble le ton juste, les contours nécessaires et l’osmose évidente qu’une œuvre qui se transforme pour atteindre sa mue définitive.
Et c’est alors une succession de toile que le maitre en toute transparence exécute devant nous, on y croise des personnages qui en l’espace d’un instant en deviennent subitement d’autres, ce que l’on prenait pour acquit ne l’ai jamais totalement, et c’est certainement ce qui est la force du génie : voir au-delà que ce que voient les simples. Nous pensions voir naitre un nouveau personnage sans bien savoir quoi, et bien non c’est une partie d’un décor, on croyait une nature morte et bien elle ne l’est jamais totalement chez Picasso, bien au contraire. De cet élément du décor va naitre une toile en hommage à la corrida, autre passion du maître, de personnages que l’on imaginait acquit naitra une toute autre histoire, ou encore d’une scène dantesque entre la bête et son matador naitra une œuvre à l’apparence abstraite, dans laquelle la douleur du taureau se mélange à celle de son bourreau.
« Le Mystère Picasso » d’Henri-Georges Clouzot, n’est pas un film comme un autre c’est une incursion dans l’esprit d’un génie c’est la preuve que la peinture se ressent avant de se comprendre. C’est la preuve irréfutable que le génie visionne au-delà de notre simple imaginaire et qu’il donne aux lignes, aux courbes et aux points une vie après le noir.