Sonora, un village mexicain, en 1880. Rio et Dad Longworth pillent la banque locale et fuient, poursuivis par les Rurales. Le cheval de Rio est atteint par une balle, et Dad poursuit sa route après avoir promis à Rio de revenir avec une autre monture. Mais il ne tient pas sa parole...
Unique réalisation de Marlon Brando : « La vengeance aux deux visages » fut d’abord un projet que l’acteur porta pendant des années, confiant notamment l’écriture du scénario à Sam Peckinpah (Pat Garrett et Billy Le kid) dans le but de confier la réalisation à Stanley Kubrick (2001 l’Odyssée de l’Espace). Finalement l’acteur se retrouva derrière la caméra et le scénario en parti travaillé par Peckinpah, fut repris par Guy Trosper (Le Prisonnier d’Alcatraz) et Calder Willingham (Le Lauréat). Très inspiré de l’histoire de Billy The Kid, « La vengeance aux deux visages » surprend autant qu’il ravit les fans de Brando. D’abord, parce qu’il semble impossible de ne pas faire un parallèle entre le personnage incarné par l’acteur/réalisateur et sa propre personnalité. En effet les deux semblent avoir des difficultés avec la figure paternelle. Marlon Brando a souvent parlé des problèmes relationnels qu’il rencontra avec son père et son personnage de Rio lui peut voir en Dad un père de substitution qui finit par le trahir donnant tout son sens à l’intrigue.
Perfectionniste et soucieux de toucher au plus prêt les sentiments et les évolutions de ses personnages, Brando fit énormément de prises et utilisa un nombre incalculable de pellicule. En fait, pour pouvoir obtenir ce qu’il voulait, il privilégia l’improvisation de ses acteurs et film tous les essais pou pouvoir obtenir des moments de grâce perceptibles dans bien des scènes, où les acteurs se laissent imprégner par leurs personnages et trouvent une tonalité que le réalisateur capte dans la douleur ou dans l’épuisement, mais qui donne à son film tout son sens. Marlon Brando nous livre un film puissant, d’une profondeur rarement atteinte avec une mise en scène instinctive et intuitive, qui ont fait la réputation de l’acteur et lui ont permis d’atteindre des excellences de jeu rarement atteintes dans le cinéma mondial. Star unique et charismatique, Marlon Brando fait preuve d’une maîtrise hors norme et domine une histoire de vengeance sombre, un brin machiste et forcément œdipienne.
L’acteur se laisse également porter par son personnage, il lui compose une prestance et une violence contenue qui le rende forcément aussi charismatique qu’énigmatique. Comment va-t-il se venger ? A-t-il seulement envie d’assouvir ce qui le ronge ? La prestation de l’acteur est tellement soignée qu’il parvient à nous faire douter. En face de lui
Karl Malden (Les Rues de San Francisco) est brillant de cynisme et de sadisme. Porté par la mise en scène de Brando il se laisse aller à composer un personnage tout en nuance, forcément mais dont la violence jaillit à l’écran dans des moments de grâce puisée dans les improvisations privilégiées par le réalisateur.
En conclusion, « La vengeance aux deux Visages » est œuvre majeure de Marlon Brando d’abord parce qu’il s’agit de son unique réalisation, mais surtout parce qu’il construit une œuvre puissante et captivante qui, comme on s’y attendait, vient nous surprendre par un ton sombre et violent. Alors que le montage original était de plus de 5 heures, cette version restaurée de plus de deux heures nous embarque dans une histoire de vengeance qui a rarement su trouver un ton aussi juste dans une opposition qui vient chercher dans les racines des personnages.