Dans les derniers jours de la guerre d'Indochine, une jeune Eurasienne se porte volontaire pour aider un groupe de mercenaires à détruire un dépôt d'arme près de la frontière chinoise.
Samuel Fuller, fut un réalisateur majeur qui officia de la fin des années 40 à la fin des années 80, avec une certaine prédilection pour les films de guerre, matière dans laquelle il s’illustra avec des œuvres telles que « Au-delà de la gloire » (1980) avec un certain Mark Hamill (Luke Skywalker, dans la première trilogie « Star Wars »). Un film dans lequel il s’intéressait à la seconde mondiale et notamment aux ravages que peut faire la guerre sur ces jeunes, embarqués dans un conflit dont ils ne maîtrisent pas forcément toutes les nuances. Les champs de batailles, les cadavres, la tension permanente, font de ces hommes des êtres qui resteront en souffrance pour toutes leurs existences. Le film reçu les honneurs du festival de Cannes, où il fut sélectionné, mais repartis sans trophée.
Avec « China Gate », le réalisateur, qui avait déjà abordé la guerre de Corée en 1951 avec son film : « J’ai vécu l’enfer de la guerre de Corée », va nous entraîner dans un autre conflit, celui de la guerre d’Indochine et particulièrement vers la fin de ce conflit où le pays se battait, avec l’aide de ses alliés, contre l’invasion chinoise communiste. Et le premier constat est surprenant pour un réalisateur américain : les héros sont des français ! La légion étrangère pour être précis. Il n’y a pourtant aucun acteur français dans la distribution, mais peu importe, car le scénario, signé de Samuel Fuller lui-même, a pour but de brouiller les cartes de la narration classique dans ce type de film et de livrer un film humaniste, parlant de tolérance, de lutte contre le racisme et contre la guerre.
Avec une finesse rare, le réalisateur signe un film puissant, où la vedette et les véritables personnages héroïques du film sont une femme et un soldat noir. Samuel Fuller brouille les cartes en faisant du personnage principal masculin, un contre héros, qui se trouve être l’ex-mari de la femme dont aura besoin l’escouade de la légion pour aller détruire les tunnels des derniers soldats communistes. Le soldat se trouve devoir faire équipe avec la femme qu’il a abandonné à la naissance de leur fils. Cette séduisante Eurasienne, est la seule à pouvoir approcher le commandant Cham, ultime ennemi des alliés. Nous l’aurons donc vite compris, cette mission sera l’occasion, pour chacun, d’éprouver son courage, mais de se livrer également, avec des scènes d’anthologie, dans lesquels les personnages secondaires vont se révéler et prendre tout l’espace pour mieux mettre en lumière leurs valeurs et leur courage.
Pour incarner son héroïne, le réalisateur a choisit la sublime Angie Dickinson (Ocean’s Eleven), dont l’atout charme est évident, mais surtout dont le charisme va opérer dés la première scène avec son partenaire Gene Barry (La Guerre des Mondes) qui va se prendre une gifle devenue culte. Mais la véritable révolution dans ces années 50 qui arrivent à la fin, c’est la présence dans un rôle majeur et héroïque, pour ne pas dire de référence morale, du chanteur
Nat « King » Cole, qui va littéralement transcender son personnage et dont la seule chanson qu’il interprétera durant une scène remarquablement mise en scène donnera tout son sens, et au film et au personnage.
En conclusion, « China Gate » est un film majeur sur la guerre d’Indochine, réalisé par un maître du genre. Samuel Fuller, brouille les cartes, installe une héroïne, dans un film normalement réservé aux hommes et livre un scénario et une mise en scène porteuse d’un message contre la guerre et le racisme et pour la tolérance. A voir absolument, si cela n’a pas déjà été fait !