Middlesex, Iowa, 1988. Donnie Darko est un adolescent de seize ans pas comme les autres. Introverti et émotionnellement perturbé, il entretient une amitié avec un certain Frank, un lapin géant que lui seul peut voir et entendre. Une nuit où Donnie est réveillé par la voix de son ami imaginaire qui lui intime de le suivre, il réchappe miraculeusement à un accident qui aurait pu lui être fatal. Au même moment, Frank lui annonce que la fin du monde est proche. Dès lors, Donnie va obéir à la voix et provoquer une série d’événements qui sèmeront le trouble au sein de la communauté…
Pour son premier long métrage, réalisé à l’âge de 35 ans seulement, le réalisateur Richard Kelly signe avec « Donnie Darko » un chef d’œuvre qui deviendra la signature indépendante de la sortie des années 90, dans laquelle un adolescent lutte contre une hallucination qui se transforme rapidement en amitié imaginaire avec Franck, un personnage masqué dans un costume de lapin effrayant. Ovni génial qui ne cesse d’osciller entre « Teen movie » ou thriller oppressant, « Donnie Darko » devint d’un seule coup la première œuvre réjouissante du début du 21ème siècle post trauma 2001, notamment parce qu’il suit les pas de cet adolescent introverti et émotionnellement perturbé qui vient d’échapper à la chute surprenante d’un réacteur d’avion qui détruisit sa chambre.
De là à y voir une allégorie d’une Amérique qui, en ce début d’année 2002, où le film vient de sortir, panse toujours les plaies encore béantes d'un attentat qui traumatisa bien au-delà de ses frontière, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas, le film ayant été écrit et réalisé avant les événements de Septembre de 2001, mais il y a tout de même un souffrance palpable, une sorte d’errance dans le personnage principal qui peut très vite s’associer à cette Amérique qui vient d’élire une équipe républicaine particulièrement avide de revanche, de pouvoir, de cynisme et qui ne reculera devant rien pour arriver à ses fins. Ici, Donnie, lutte pour retrouver une stabilité, savoir s’il devient fou ou si cet ami imaginaire est réellement un ange de la mort qui vient lui annoncer la fin du monde, cette apocalypse que l’on peut symboliser forcément par la terrible histoire de l’Amérique de ce début de siècle, où le monde ne serait plus jamais la même. Avec un scénario puissant et parfaitement écrit, Richard Kelly explore la psyché de cet adolescent mais également celle de ceux qui gravitent autour de lui et qui tentent coûte que coûte de le soutenir ou font état de leurs doutes et de leurs inquiétudes.
Et c’est avec une mise en scène inventive et précise que le réalisateur va mettre en lumière son histoire. Doté d’un budget serré, il va pousser son inventivité au maximum, pour que le public ressente ce malaise, cherche encore à se positionner entre Thriller ou « Teen Movie », cherche à s’identifier à cet adolescent assez antipathique, il faut quand même le dire, mais dont l’apparence sobre, et en même temps magnétique, portée par son acteur principal : Jake Gyllenhaal (Prisoners). Le réalisateur n’hésite pas à utiliser les plans serrés, les effets de lumières anxiogènes comme le rouge ou le bleu sombre pour appuyer cette atmosphère instable entre folie et prémonition.
Et c’est effectivement grâce au jeu magnétique et introspectif, de l’acteur principal que le film prend tout son sens. Car en plus de signer un scénario magistral et une mise en scène éblouissante d’inventivité, Richard Kelly accompagne ses acteurs afin qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes, et Jake Gyllenhaal en est la preuve la plus parfaite. Son jeu entre intériorité et rébellion donne à son personnage une apparence à la fois mystérieuse et anxiogène et en même temps séduisante et touchante. La distribution, d’ailleurs se complète avec un casting quatre étoile, à commencer par la sœur de Jake,
Maggie Gyllenhaal (Confession d’un Homme Dangereux), ou encore
Drew Barrymore (E.T.) et
Patrick Swayze (Pointbreak).
Première œuvre géniale de Richard Kelly, « Donnie Darko est une véritable réussite, que ce soit sur le plan scénaristique ou de sa mise en scène. Constamment sur le fil du rasoir entre « Teen Movie » et Thriller, le film est une véritable pépite de la satire de la société américaine qui n’a pas encore tourné le dos à sa paranoïa en ce début de 21ème siècle.