1999 - Olloy - Les Ardennes belges. Un enfant vient de disparaître. La suspicion qui touche tour à tour plusieurs villageois porte rapidement la communauté à incandescence. Mais un événement inattendu et dévastateur va soudain venir redistribuer les cartes du destin…
Voilà un film à la genèse peu orthodoxe : Ce fut l’écrivain Pierre Lemaitre (Au revoir là-haut) qui prit contacte avec Nicolas Boukhrief (Made in France) afin qu’il adapte au cinéma un scénario qu’il venait d’écrire d’après son roman paru en 2017 : « Trois jours et une vie », qui racontait l’histoire d’un village des Ardennes dans lequel un enfant disparaissait et où la population du village va subitement se retrouver à vivre dans la suspicion et la douleur. Seulement l’un des personnages va vivre différemment cette tragédie et c’est surtout de son point de vue que l’intrigue va s’installer doucement. Efficace dans son écriture, Pierre Lemaitre tisse une intrigue originale, sous des aspects de déjà vu : Un village dans les Ardennes Belges et une disparition d’enfant. Mais l’auteur aime la psychologie des personnages. Plus qu’un aspect voyeuriste, il cherche avant tout à mieux comprendre ce qu’il se passe dans l’esprit de ses héros.
Et cela, le réalisateur Nicolas Boukhrief l’a bien compris. Il n’a d’ailleurs pas hésité à signer une mise en scène pour laquelle il a puisé ses inspirations dans les films de Duvivier et Chabrol pour leurs adaptations respectives d’œuvres de Simenon. Des œuvres qui puisaient plus dans la psychologie des personnages et dans le jeu des acteurs, que dans des effets scénaristiques. Même chose avec Fritz Lang et Truffaut qui ne cherchaient jamais la facilité narrative, mais laissaient au contraire la force des personnages prendre le dessus et captiver le spectateur. Si avec « Trois jours et une vie », Nicolas Boukhrief assume ses influences, il parvient tout de même, et ce, malgré quelques longueurs, à apposer une signature et à donner à son film une atmosphère qui ne cesse de se partager entre pression et légèreté, pour que le spectateur, comme le héros oscille dans ses sentiments envers l’affaire.
En cela le casting est capital et la prestation de Pablo Pauly (Patients) est à la hauteur de l’attente. L’acteur souffle constamment le chaud et le froid et parvient à se fondre dans un personnage complexe pris entre plusieurs feux. Les vétérans que sont
Sandrine Bonnaire (Sans Toit ni loi), trop rare ces dernières années,
Charles Berling (Marvin ou la belle éducation), tout en violence et en fureur, mais aussi en émotions mal contrôlées, et enfin
Philippe Torreton (Intime conviction) tout en retenue et en charisme, viennent tous apporter leurs pierres à l’édifice et posent toutes les nuances nécessaires à ces personnages, qui ne se dévoilent réellement qu’à la fin.
En conclusion, malgré quelques longueurs, « Trois jours et une vie » est un film remarquable par sa qualité d’écriture et sa mise en scène toute en souplesse et en suspension, qui impose une ambiance pesante et sombre dans une intrigue qui plonge les personnages au cœur d’un drame. A l’instar de son personnage principal, Nicolas Boukhrief signe une œuvre entre lumière et enfer, sans jamais sombrer dans la facilité scénaristique.