Dans les Pyrénées, un loup attise la colère des villageois. Teddy, 19 ans, sans diplôme, vit avec son oncle adoptif et travaille dans un salon de massage. Sa petite amie Rebecca passe bientôt son bac, promise à un avenir radieux. Pour eux, c’est un été ordinaire qui s’annonce. Mais un soir de pleine lune, Teddy est griffé par une bête inconnue. Les semaines qui suivent, il est pris de curieuses pulsions animales…
Les frères Ludovic et Zoran Boukherma avaient fait sensation en 2016 avec le premier film : « Willy 1er », dans lequel les réalisateurs suivaient le parcours initiatique d’un personnage un peu lunaire mais surtout inadapté qui va vouloir prendre son envol après la mort de son frère jumeau. Passionnés de cinéma populaire et particulièrement de Spielberg et Stephen King, les deux frères, biberonnés également à la série « Charmed » dont ils disent avoir vu toutes les saisons, ont décidé de se lacer ans le cinéma de genre et particulièrement au Loup-Garou. Comme d’habitude les deux frères ont écrit à quatre mains cette histoire très ancrée dans la culture locale et dans laquelle un jeune homme, un peu en marge du village dans lequel il vit, comme Willy 1er, en marge.
Comme dans leur premier film les deux réalisateurs, n’appuient pas les traits de façon trop grossière, bien loin de là, ils dessinent un personnage attachant qui cherche un idéal, se projette dans le futur et doit faire avec un présent pas forcément rose tous les jours. A la fois sociale et populaire, l’écriture et la mise en scène des deux frères n’en n’oublie pas pour autant d’être divertissant et de s’amuser à créer de l’intention plus que d’en attendre. Ainsi, certainement faute de moyen, le film va jouer des ombres, des lumières et nous apporter beaucoup de suggestivité pour mieux nous faire plonger dans cette histoire qui surfe entre comédie et film d’horreur, incarné par un loup garou dont on ne distingue jamais les contours mais dont on sent la présence en permanence.
Très inspirés des films des années 80, dans lesquels, fautes de moyens, mais aussi d’évolution des effets spéciaux, les réalisateurs devaient jouer des perspectives ou des mouvements pour mieux insuffler une ambiance ou créer une émotion, Zoran et Ludovic Boukherma font de leur « Teddy » un tour de force qui brille par des idées simples mais efficaces qui offrent toutes les sensations voulues, comme, par exemple, lorsque Teddy se fait attaquer par le loup : Rien n’apparaît à l’écran mais tout est mis en œuvre pour faire monter la tension. Même chose avec l’une des scènes finales qui n’est pas sans rappeler le trauma du Bataclan. A des années lumières d’une œuvre hautement intellectuelle et pesante, « Teddy » est un film remarquable, une œuvre soignée réalisée par des amateurs de cinéma et des professionnels à l’œil averti et à l’inspiration profonde.
Majoritairement interprété par des comédiens amateurs, le film est porté par l’acteur Anthony Bajon, dont la carrière ne cesse de prendre de la hauteur depuis son interprétation saluée par un Ours d’Argent à Berlin en 2018, dans « La prière » de Cedric Khan. Le comédien, plutôt habitué à des rôles taciturne, rayonne, ici, avec un jeu solaire parfois et tout en nuances à mesure que le film progresse et que son personnage prend conscience de ce qu’il lui arrive. Puissant et précis, Anthony Bajon confirme son talent inné pour colorer ses personnages, pour leur donner une puissance, tout en les ancrant toujours un peu plus dans un environnement populaire.
« Teddy » est donc un film de genre français particulièrement réussit et français de surcroit, ce qui vient prouver une nouvelle fois que la nouvelle génération est bien décidée à s’inspirer des maitres du cinéma américains et international pour revenir à du divertissement sans pour autant sombrer dans le pauvre visuellement et scénaristiquement. Une nouvelle génération de réalisateur qui sait donner envie de voir des films et qui sait les réussir et ne rougit de honte pas devant le terme populaire. Une génération de réalisateur qui sait également s’entourer d’une génération d’acteurs instinctifs mais puissants qui n’ont jamais peur de prendre des risques et savent se tracer une carrière sans oublier leur âme et leur public.