Un compositeur en mal d’inspiration, qui vient de quitter femme et enfants, pense trouver refuge dans une vieille maison à flanc de falaise, sur une île bretonne déserte. Dans ce lieu étrange et isolé, il ne va trouver qu’un piano désaccordé et des visiteurs bien décidés à ne pas le laisser en paix.
Un film né d’une pandémie, c’est un cas qui risque de se répéter souvent. Mais pas pour y mettre la crise sanitaire au centre de l’intrigue, mais plutôt pour se forcer à créer autrement. C’est le cas de « Lui », ce nouveau film de Guillaume Canet, né par accident d’une situation qui l’a forcé a se recentrer à partir dans une autre direction. La genèse de ce film remonte à 2020, alors que le réalisateur voit le tournage de son nouveau film : « Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu » $être stoppé par cause de la pandémie, il se met a écrire trois lettres : L.U.I. » qui seront le point de départ d’un scénario qu’il mettra trois semaines a écrire, sans structure narrative défini, mais qui vont, au final, donner naissance à un film surprenant, à la fois sorte de développement involontaire d’un poème persan du XIIIème siècle et analyse d’une crise identitaire, qui pourrait faire suite au précédent film.
Avec une douceur et une détermination qui ne cesse de se confirmer de film en film, Guillaume Canet déconstruit la psyché de l’homme, à travers ses crises identitaires, son âge qui avance inexorablement. De la même manière qu’avec « Rock’n Roll » (2016), Guillaume Canet se met en scène, cette fois-ci dans le rôle d’un compositeur en manque d’inspiration et en pleine remise en question, qui plaque Femme et enfant pour s’isoler sur une ile bretonne afin d’y retrouver la créativité qui lui fait défaut. Seulement, la solitude laisse apparaître une foule de personnage qui ne le laisse pas tranquille. A la manière d’un « Scrooge » chez Dickens, Canet tisse une toile dans laquelle se prend inlassablement son personnage qui va y laisser sa propre analyse psychologique d’une existence autocentrée qui n’a pas suffisamment laissé de place aux autres et particulièrement à sa femme et à ses enfants.
Au lieu de filmer un couple dans la tourmente de façon assez classique, avec ses disputes et ses phrases assassines, le réalisateur filme la solitude, la tentation du vide, celle d’une vie qui se heurte à ses tourments. Jamais là où on l’attend, le film se construit comme un Blier, époque « Trop Belle pour toi » (1989) avec ses réflexions sur l’existence, la place du personnage ou encore la culpabilité, mais également un clin d’œil assumé à « Tenue de soirée » (1980) notamment dans la scène de la chambre. Guillaume Canet signe une œuvre intime et intimiste dans laquelle il a mis de lui et a fantasmé certains rapports et certaines questions que tout un chacun se pose.
Comme d’habitude, la distribution se pose ici en valeur incassable du réalisateur. Une grande partie de l’équipe technique, engagée sur le projet « Astérix et Obélix : L’empire du Milieu », se retrouve à mettre en lumière, à soutenir les dialogues ciselés qui vont si parfaitement à Virginie Efira (Adieu les Cons) qui confirme, décidemment, son goût et son talent pour les personnages en souffrance morale ou physique. Matthieu Kassovitz (Amen) signe une prestation apaisée et en même toute en subtilité. Il y a aussi les duo Nathalie Baye (La Balance) et Patrick Chesnay (La Liste de mes envies) dont l’intervention apporte une touche de folie, et d’émotions plutôt bien dosée.
En conclusion, « Lui » est un film sorti directement du manque créé par le confinement et qui confirme toutes les qualités de Guillaume Canet pour décrypter les sentiments humains et particulièrement les crises existentielles des hommes à mesure que l’âge progresse et que les relations de couples et d’amitié avancent. Le moment où chacun fait le bilan devient alors le personnage central d’une galerie déjà bien fournie.