Trois vieux comédiens, sans le sou, minables et au chômage, sont engagés dans une comédie de boulevard médiocre, qui part en tournée. Le spectacle est monté par un producteur escroc, bien décidé à le saboter afin de toucher l’argent des assurances. Mais les trois acteurs se prennent au jeu et s’investissent dans ce qui sera peut-être la dernière chance de leur vie.
Patrice Leconte est définitivement un réalisateur atypique, jamais vraiment là où on l’attend et en même temps, tellement présent, qu’il est tout aussi difficile à cerner. Un peu comme ses personnages dans « Les Grands Ducs », il semble être populaire tout en étant terriblement auteur, presque constamment en paradoxe, entre célébrité et discrétion. Le réalisateur signe pourtant ici, un film, finalement très personnel, qui ne fut pas un succès immédiat, mais le devint finalement, notamment grâce à son casting tout en grands gestes et en exclamation démesurées.
Certains poussèrent l’analyse de ce film en en faisant un parallèle avec la carrière de Leconte, ce qui est, à mon sens parfaitement injuste, tant le réalisateur a su rebondir chaque fois et osciller entre échecs et succès reconnaissables. Ici, le réalisateur sortait du succès critique et public de « Ridicule » qui lui-même sortait de deux échecs successifs que furent « Tango » (1993) et « Le Parfum d’Yvonne » (1994). Mais avec « Les Grands Ducs » il s’amuse de la réunion de ce trio face à un producteur prêt à tout pour « Plomber » le spectacle dont ils sont les vedettes. Avec Serge Frydman (Mon Ange), le réalisateur s’interroge avec humour sur ces acteurs vieillissants qui courent le cachet, autant que sur cette profession qui ne vit que par le regard des autres.
D’ailleurs le trio d’acteurs que forment : Jean Rochefort (Ridicule), Philippe Noiret (Le Vieux Fusil) et Jean Pierre Marielle (Les Galettes de Pont-Aven), participe à cette réflexion intelligente et consciente de ces « Couleuvres » que doivent avaler ces anciens que la jeune génération a relégué au rang de cachetonneux, pour peu qu’ils n’aient pas trouvé la gloire durable. Alors chacun se raccroche à ses instants de brillance dans une voie lactée qui dans laquelle rares sont les étoiles qui brillent infiniment. Avec une certaine folie et un goût pour l’exagération, Patrice Leconte, pousse ses acteurs à s’amuser des caricatures qu’ils sont d’eux-mêmes. Et même s’ils sont très loin d’être des « Has Been », le trio s’en donne à cœur joie. Nous voyons ainsi un Jean-Pierre Marielle, le verbe haut, la colère jamais trop éloignée et cette voix rauque qui fait trembler le moindre recoin de mur. Jean Rochefort joue plutôt les acteurs dynamique et couards qui ne pensent qu’à survivre. Et enfin Philippe Noiret qui porte le geste ample, le regard profond et la déclamation exagérée.
Même Michel Blanc qui, malgré une entente moins cordiale qu’auparavant (Des dires de Patrice Leconte lui-même !) participe à cette folie scénaristique et visuelle dans laquelle, la vie semble une grande scène de théâtre où les acteurs se mêlent, en compagnie de Catherine Jacob (9 Mois), en une farce drôle et tendre qui vient mettre en lumière la difficulté de la vie de ses acteurs, constamment à la recherche d’une gloire et de cette lumière qui les fait vivre.