Le réalisateur américain Peter Bogdanovich retrace la vie et la carrière de l'un des plus prolifiques et influents réalisateurs d'Hollywood : Buster Keaton. Cette plongée très personnelle dans les archives de la famille Keaton révèle un artiste visionnaire qui a tout risqué, même sa vie, pour faire rire les spectateurs du monde entier avec des films précieux comme Sherlock Jr. (1924), Le Mécano de la Générale (1926), Cadet d'eau douce (1928) et tant d'autres.
Longtemps considéré comme un petit génie du cinéma américain, Peter Bogdanovich eut une carrière la M. Night Shyamalan (Sixième sens), d’abord adulé pour son audace et son arrogance, il fut ensuite conspué pour son manque de régularité dans ses œuvres. Disparu en Janvier 2022, ce réalisateur, acteur et critique de cinéma n’en demeure pas moins un acteur majeur de la scène cinématographique américaine, notamment grâce à des films comme « La dernière séance » réalisé en 1971, ou alors « On s’Fait la valise, Docteur ? » l’année suivante. Adulé » ou détesté, Peter Bogdanovich n’en fut pas moins un cinéphile de grande envergure et un amoureux du cinéma qui n’eut de cesse de vouloir se mettre à son service et de mettre en lumière l’importance de certaines gloires passées du cinéma, comme Orson Welles a qui il consacra plusieurs ouvrages, ou encore Howard Hawks ou John Ford qui passèrent sous l’œil et la plume du réalisateur, ou encore Fritz Lang et Allan Dawn.
Il était donc presque normal que ce grand amoureux du 7ème art rencontre, un jour, l’une des figures majeures du cinéma muet : Buster Keaton. Et ce n’est pas sous la forme d’un livre que le réalisateur a décidé de remettre sur le devant de la scène « L’Homme qui ne rit jamais ». Mais plutôt sous la forme d’un documentaire hommage qui retrace le parcours de cet artiste d’exception, dont la carrière débuta très jeune, puisque ses parents, artistes de Cabaret, l’intégrèrent dans leur numéro. Une prestation qui ressemblait plus à de la maltraitance puisque l’enfant était jeté d’un bout à l’autre de la scène. Une expérience qui lui permettra d’apprendre à maitriser son corps et fera sa marque de fabrique dans la manière dont il contrôlait les chutes et autres coups. Keaton dira d’ailleurs, lorsqu’un journaliste lui posa la question : « Mon père ne m’a pas maltraité, il me disait de serrer les fesses avant de me lancer ! ».
Génie de la mise en scène, casse-cou, cinéaste majeur de l’ère du muet du même niveau qu’un Charlie Chaplin, mais avec un style radicalement différent, Buster Keaton fut à l’affiche d’un nombre hallucinant de productions à l’instar de « Sherlock Junior » (1924), « Le mécano de la générale » (1928) ou encore « Cadet d’eau Douce » (1928) pour en citer que les plus célèbres. Avec ce documentaire, Peter Bogdanovich ne fait pas que parler les archives, il fait parler des artistes dont l’influence de Keaton fut importante dans leur carrière, comme Johnny Knoxville des « Jackass », Bill Hader (Supergrave), Quentin Tarantino (Kill Bill), ou encore Mel Brooks (La Folle Histoire de l’espace). Des acteurs réalisateurs qui ont trouvé chez Buster Keaton, toute la matière pour donner un sens à leurs ambitions artistiques.
Rarement un hommage ne fut autant nécessaire pour montrer, à la fois le génie de Buster Keaton mais également les ravages du passage du muet au parlant et les difficultés que purent avoir certains artistes, pourtant majeurs à passer le cap. Dans le cas de Buster Keaton, Bogdanovich nous montre que la personnalité de Keaton, les choix et les alliances furent autant d’éléments qui lui rendirent la vie si compliquée, sans pour autant, ne jamais altérer son génie.