L'histoire
Sa fiancée décédée après qu'il ait mené des guerres au nom de la chrétienté, le conte Dracula renie Dieu et décide d'embrasser le royaume des ténèbres afin de la venger. Plusieurs siècles plus tard, alors qu'il fait l'acquisition d'un domaine près de Londres, il reçoit la visite d'un jeune clerc de notaire dont la fiancée Mina semble être la réincarnation de son amour perdu.
Critique subjective
Au moment où il s'attaque à la réalisation de Dracula, un projet initialement destiné à la télévision que vient lui proposer Winona Rider, Francis Ford Coppola voit sa carrière péricliter. Considéré vingt ans plus tôt comme l'un des plus grands cinéastes vivants, couverts d'éloges et de récompenses, réalisateur de films acclamés comme les deux Parrains, Conversation secrète ou Apocalypse Now, il peine depuis plus d'une décennie.
C'est à partir d'Apocalypse Now, justement, que les problèmes commencent. Si le film est largement acclamé et connu un certain succès commercial, sa conception fut chaotique et marqua durablement le cinéaste. Il investit énormément dans son film suivant, Coup de cœur, qui fut un tel échec qu'il en ressortit presque ruiné. Ses tentatives suivantes, y compris la réalisation d'un troisième Parrain, censé le renflouer, se révélèrent au mieux stables financièrement, mais contribuèrent le plus souvent à creuser ses dettes. Dracula fait donc partie de cette partie de sa carrière où Coppola réalisait des films de commande.
Dracula est, disons le de suite, une réussite. Le choix de Coppola d'utiliser des techniques dites dépassées, parfois même pour l'époque, est plus que payant, renforçant toute l'ambiance baroque du film. Maquillages, effets de reflets, ombres, surimpressions, fausses perspectives, autant d'éléments donnant un cachet assez unique au film. Bien entouré, que ce soit par Garret Lewis aux décors, Michael Ballhaus à la photographie ou encore Wojciech Kilar à la musique, Coppola l'est aussi au casting. Gary Oldman donne tout dans le rôle titre, au point d'éclipser quelque peu un reste de casting pourtant solide, même si il ne s'agit pas ici du plus grand rôle de Keanu Reeves.
Même si Coppola semble moins impliqué que sur d'autres de ses films, il assure une mise en scène spectaculaire et inspirée ou les quelques baisses de rythmes sont rapidement contrebalancées par une situation nouvelle (telle l'arrivée de Van Hesling) ou une scène marquante (et le film n'en manque pas). La beauté plastique du film nous ferait presque oublier l'histoire qui nous est contée. Cette relecture du classique de Bram Stocker mise tout sur un romantisme macabre qui confine à une certaine beauté, son histoire d'amour traversant les siècles se révèle in fine des plus touchante.
En conclusion
Un film de commande que Coppola réussit à magnifier. Cette relecture d'une histoire racontée maintes et maintes fois est aussi passionnante que spectaculaire et n'a rien perdu de son aura.