Le succès fou et inattendu d’Easy Rider a marqué ce qui est aujourd’hui considéré comme l’un des tournants les plus importants de l’histoire du cinéma américain, faisant de son acteur-réalisateur Dennis Hopper le roi improbable du Nouvel Hollywood. Alors en plein montage de son prochain film, The Last Movie, méditation profondément personnelle sur la signification du cinéma et son processus de création, Dennis Hopper accepte d’être la star d’un docu-fiction, The American Dreamer, réalisé par Lawrence Schiller et L.M. Kit Carson. L’artiste souhaite que la sortie des deux films soit concomitante afin d’alimenter son statut d’icône de la nouvelle génération. Seulement, Hopper semble plus intéressé par son rôle que par le bouclage de son propre long-métrage. En réalité, il fait face à de sérieux doutes et lutte pour monter The Last Movie...
Loin d’être un documentaire linéaire, « The American Dreamer » de Lawrence Schiller (Marilyn, une vie inachevée) et L.M. Carson (A Bout de Course) c’est avant tout un voyage dans l’univers d’un réalisateur acteur dépassé par son art peut-être même par les substances qu’il s’envoie de façon intensive. Tout le monde connaît, de nom en tout cas, à défaut de l’avoir vu : « Easy Rider », mais personne ne sait réellement tout ce qui en découla, car si le nom de Dennis Hooper en tant que réalisateur est associé à celui de ce film avant-gardiste, son succès semble avoir fait tourné la ^tête de son auteur et celui-ci apparaît dans ce faux documentaire comme une sorte de gourou plus intéressé par le personnage qu’il est en train de composer face à la caméra des deux réalisateurs qu’au montage de son second film « The Last Movie » qui s’avèrera être un naufrage dans tous les sens du terme.
Si l’ensemble peut apparaître comme une sorte de délire psychédéliques réalisé par des Hippies sous influences médicinales, il y a tout de même quelques fulgurances dans ce faux-documentaire, celle de voir un réalisateur se laisser déborder par un autre projet au détriment d’une autre. L’acteur et réalisateur n’arrivent pas à s’entendre et Denis Hooper s’amuse à jouer les personnages à la Manson, avec des filles un peu partout à qui l’on demande tout et n'importe quoi, un personnage principal qui se lance dans des discours psychédéliques et souvent décousues, ou encore se laisse aller à des scènes où on le voit divaguer comme une marionnette mal maitrisée par son marionnettiste.
Pourtant, un détour de plusieurs séquences réussit, nous voyons Hooper au travail, on y découvre un artiste précis, qui cherche à chaque fois à surprendre, comme la scène où il est dans une pièce au milieu de centaines de photos qu’il a prise à chercher celle qui parle le plus. Ou encore lorsqu’il est en train de regarder les séquences de son film alors en tournage, le regard un peu vide comme s’il n’arrivait pas à avoir la fulgurance qui lui permette de lier son œuvre. « The American Dreamer » inspirera à Casey Affleck (Ocean’s Eleven) et Joaquim Phoenix (Gladiator) leur vrai faux docu « I’m Still Here » en 2010.