Les Brigades du Tigre

par: Sebastien Keromen



Après le très raté Arsène Lupin, la nouvelle adaptation ciné d’une série française s’appelle Les Brigades du Tigre. Et l’équipe a dû en manger, justement, du tigre, pour nous avoir concocté une telle réussite.

Les Brigades du Tigre
France, 2006
Réalisateur
 : Jérôme Cornuau
Acteurs : Clovis Cornillac, Diane Kruger, Edouard Baer, Olivier Gourmet, Stefano Accorsi, Jacques Gamblin, Thierry Frémont, Léa Drucker, Didier Flamand, Philippe Duquesne, Gérard Jugnot, Agnès Soral
Adapté de la série de Claude Desailly… et de l’histoire de France !
Durée : 2h05

L’histoire
1912. La nouvelle brigade d’intervention, créée par Clémenceau et connue sous le nom de Brigade du Tigre, se retrouve face à une affaire dont les ramifications pourraient bien mener jusqu’aux alliances internationales que la France est en train de contracter…


La critique


Poum, pou poupou poupoum, pou poupou poupou poupoum, pou poupou poupoum. Même si je chante un peu faux, vous avez tous reconnu le célèbre générique des Brigades du Tigre (bon, vous êtes pas con, même si vous avez pas reconnu, vous avez deviné, c’est marqué juste au-dessus). Maintenant que la France s’est également mise à adapter ses séries en film, voici le tour des Brigades du Tigre. Dans les années 1974 et suivantes, quand ça passait, j’étais plus occupé à apprendre à marcher et à parler qu’à regarder la télé, et vous ne m’en voudrez donc pas de ne jamais avoir vu la série, et d’être absolument incapable de vous dire si l’adaptation est fidèle. Étant de plus une bille en histoire, je ne saurais pas non plus vous dire la part d’exactitude dans la reconstitution des événements d’époque. Voilà, les précautions d’usage de cette critique édictées, passons à son contenu. C’est qu’il y a du bien à en dire, de ce film.


Un film français, avec de l’histoire à la française, des personnages à la française, et de l’action à la française. Et ce n’est même pas dépréciateur.
Parce que Les Brigades du Tigre arrive à être un film irrémédiablement et intrinsèquement français, sans avoir à pâlir devant ses congénères d’outre-Atlantique. Citer ses qualités revient un peu à énumérer tout ce qu’il y a dans un film, mais comme on est là pour ça, allons-y. Commençons donc par l’ensemble, et l’ambiance historique. C’est le point fort du film. Mêlant habilement grande et petite histoire, le scénario brasse des noms et événements dont on a entendu parler à l’école (et plus si affinités), comme la bande à Bonnot, les emprunts russes, la triple entente… Comme en plus l’histoire n’oublie pas de faire la part belle aux personnages en leur laissant (à peu près) le temps de se développer, et qu’elle n’hésite pas à casser des œufs (traduisez : des personnages) pour faire monter l’omelette, et qu’elle ne se gêne pas pour complexifier tout ce qui se passe (entre magouilles, enquêtes et cachotteries, il y a de quoi faire, même un peu trop), on obtient un film sans temps mort, qui ne prend pas ses spectateurs pour des imbéciles, tout en laissant aux acteurs des rôles à défendre. Il lui manque juste d’être un peu moins emberlificotée, et des dialogues un poil plus percutants pour être parfaite.


Vous avez vu la distribution ?
On dirait la liste des invités à une cérémonie de remise de prix. Impossible de les citer tous, et leurs performances sont toutes tellement nickel que je n’en citerai pas un ou une sortant du lot. Chacun son style, chacun son caractère, chacun son histoire, chacun ses motivations, chacun son destin, c’est beau quand des personnages bien écrits sont bien interprétés. C’est le point fort du film. Côté musique, on retrouve un peu la musique d’origine, d’abord telle quelle pendant quelques passages, mais surtout comme influence majeure pour le reste de la musique. Celle-ci est pour beaucoup dans l’ambiance vieillotte sans être ringarde du film. C’est le point fort du film.
Bon, et l’action ? C’est comment, l’action à la française, de nos jours ? Ben très bien. Si on pouvait craindre un peu des poursuites en voiture à 30 km/h, ou des combats pré-kung fu, n’ayez aucune inquiétude. Rien n’a été altéré, pour conserver l’époque, les voitures ne vont pas aussi vite que dans Fast & furious, et les combats à la savate (l’art de la boxe qui s’appelle la savate, hein, ils se battent pas avec des pantoufles) n’ont rien de Jackie Chan, et pourtant les scènes d’action sont très intenses. Pas vraiment grâce au montage, un peu trop nerveux par moment, rendant l’action pas toujours très lisible (tiens, ça c’est pas le point fort du film). Mais plutôt grâce à un traitement sonore choc, avec des pistolets qui font un boucan de tous les diables, et des coups qui frappent fort. Des bruitages secs et qui claquent. C’est le point fort du film. Comme en plus l’histoire n’a pas oublié de donner une motivation à chaque scène, on s’implique d’autant plus. Les scènes d’action arrivent en plus à s’inscrire naturellement dans l’histoire, sans casser le rythme et sans paraître parachutées. Du beau boulot. C’est le point fort du film.


Ça en fait des points forts pour les Brigades du Tigre.
Et c’est vrai qu’il cumule le meilleur du cinéma d’action comme on savait plus le faire et du patrimoine français qu’on ne savait plus mettre en valeur. Et si on a parfois un peu de mal à suivre (et aussi à se motiver au début, car si l’enquête doit éclaircir un certain nombre de points, on ne voit pas trop ce que ça peut nous apporter), on appréciera tout de même un scénario qui nous tient en éveil tout en nous ayant tout expliqué à la fin. Seul petit regret, Les Brigades du Tigre reste un film assez dur, assez sérieux, assez dramatique parfois, empêchant ainsi une jubilation que le casting de choix aurait pu apporter. Mais c’est juste moi et c’est juste que ce n’est pas ce film-là. Ce film-là est un film qui ose ne pas toujours caresser le spectateur dans le sens du poil, pour lui apporter un film sans concession, inscrit dans l’Histoire comme peu de films peuvent s’en vanter, et n’ayant que des points forts. Trop fort.

A voir : pour voir ce que le cinéma français est capable de faire, de nos jours
Le score presque objectif : 8/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +3, du solide, du vrai, du bon

Sébastien Keromen