Après Virgin suicide et Lost in translation, Sofia Coppola dépeint une nouvelle fois la difficulté de grandir pour une jeune fille, mais dans un cadre XXL : Versailles. La vie de Marie-Antoinette et sa difficile intégration à la Cour, comme si vous y étiez, avec le même ennui.
Marie-Antoinette
Titre original : Marie-Antoinette
USA, 2006
Réalisateur : Sofia Coppola
Acteurs : Kirsten Dunst, Jason Schwartzman, Rip Torn, Asia Argento, Marianne Faithfull, Judy Davis, Steve Coogan, Aurore Clément
Musique de : Air
Adapté du livre d’Antonia Fraser
Durée : 2h05
L’histoire
Encore adolescente, Marie-Antoinette arrive d’Autriche pour épouser le dauphin de France, qui deviendra Louis XVI. Son parcours à la Cour où elle aura bien du mal à se sentir chez elle.
La critique
Arrivera-t-on un jour à faire un film sur l’ennui qui n’ennuie pas ? Sofia Coppola s’y risque avec tout le faste de Versailles, et échoue. Elle avait pourtant adopté une approche moderne, un regard contemporain et une mise en scène dynamique. Mais rien n’y fait, l’histoire patine tellement que le spectateur cherche le bouton Avance rapide. Pourtant, ça partait bien. L’arrivée en France de Marie-Antoinette, où on ne lui permet de rien garder qui vienne d’Autriche – même pas son petit chien – nous fait nous attacher immédiatement au personnage et à sa vie non souhaitée, entourée de gens qui la considèrent comme une étrangère. Réunie avec un Louis XVI qui n’a pas vraiment eu son mot à dire et a l’air un peu paumé, obligée de suivre le rituel de Versailles (la première scène du lever est irrésistible), elle provoque la sympathie du spectateur. Malheureusement, la première moitié du film se met rapidement à tourner autour d’une seule question : quand le roi Louis honorera-t-il la reine ?
Vous y croyez, vous, à un jeune homme qui dort dans le lit de Kirsten Dunst et ne fait rien ? Moi pas vraiment, et la répétitivité de ce problème (chacun y va de son conseil, s’enquiert de l’avancement, et la pauvre Marie-Antoinette qui tente de se montrer plus entreprenante) finit par me désintéresser complètement de l’affaire. Entre deux, Marie-Antoinette s’ennuie beaucoup et a du mal à supporter la vie à la cour. Le spectateur, toujours plein d’empathie, s’ennuie beaucoup et à du mal à supporter les scènes de vie à la cour. Et ce ne sont pas les quelques montages cut avec musique rock qui, même s’ils sont plutôt réussis, sauveront le tout. Au bout d’une heure, le film bascule enfin vers d’autres sujets, dont enfin un épanouissement relatif de Marie-Antoinette. Le film commence alors un peu à se réveiller, pour partir dans toutes les directions sans rime ni raison. Comme pendant la première partie, les événements historiques sont quasiment absents, et on continue à ne suivre que Marie-Antoinette. À vous d’aller vérifier dans un bouquin d’histoire pourquoi, tout à coup, la Cour la bat froid, parce que ce n’est pas le film qui vous donnera les clés (quelques indices peut-être, mais sans connaissance historique on peine à savoir si ce sont les seules raisons).
Pourtant, le film a d’indéniables qualités, et pour commencer des images superbes. Le tournage à Versailles n’a pas été fait en vain et, même si pas mal de plans collent au plus près des visages et ne laissent pas apparaître les décors, le film regorge de scènes splendides, filmant tout le faste de Versailles comme si on y était. Sans compter les costumes qui ne dépareillent pas. On peut aussi parler des acteurs qui, à part Rip Torn qui joue un Louis XV qui parle comme un texan, sont très bons. Kirsten Dunst incarne parfaitement la reine telle que la décrit Sofia Coppola, et Jason Schwartzman est très juste en roi Louis XVI maladroit et discret. Je ne saurais dire s’ils sont conformes à leurs modèles historiques (de ce que j’ai entendu, le film fait plutôt s’étrangler tous les historiens), mais ils rendent leurs personnages et leur couple tout à fait crédibles. Si tout était réuni pour faire un film superbe, il y manque cette fois-ci de quoi donner à s’intéresser au spectateur. Les deux précédents films de Sofia Coppola distillaient un charme infini mais infiniment discret et ténu, qui est cette fois-ci absent ou tellement discret que je ne l’ai pas ressenti. Et si comme moi vous ne le ressentez pas, ces deux heures vont vous sembler aussi longues que la vie de Marie-Antoinette en temps réel.
Un dernier mot : le film use et abuse des banquets. Alors prévoyez qu’à la sortie vous ne vous contenterez pas d’un MacDo, et prévoyez plutôt un grand repas avec petits fours, gibier, fruits rares, le tout arrosé au champagne !
A voir : pour les images, pour les acteurs, si on se moque de s’ennuyer 2h
Le score presque objectif : 6/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : -2, pourquoi s’ennuyer quand on peut ne pas s’ennuyer ?
Sébastien Keromen