L’histoire« Ohwon » n’avait rien qui le destiné à devenir un des plus fameux peintres de l’histoire de la Corée. Il naît mendiant, mais grâce à ses talents pour le dessin, il se fait vite remarquer. Assez rapidement il arrive à vivre de son art et devient le peintre amoureux des femmes et de l’alcool qui disparut en 1897, à l’âge de 57 ans.
CritiqueEst-ce que le 98e film de Im Kwon-Taek est à la hauteur des précédents chefs-d’œuvre auxquels il nous a habitués ? Et bien sans avoir eu le même écho international que "Sopyonje", son film le plus récompensé, "Ivre de femmes et de peinture" apparaît comme un de ces magnifiques films qui touche de par sa beauté et la sensibilité qu’il dégage. Il a tout de même reçu le prix de la mise en scène à Cannes en 2002, chose qui n’était encore jamais arrivée pour un film coréen.
Une récompense qui semble toute naturelle aux regards du travail fourni par toute l’équipe du film et le résultat s’en ressent. L’histoire de ce peintre qui a inspiré particulièrement le réalisateur, une réalisation « classique », sobre et efficace qui dépeint une corée en plein bouleversement politique, déchirée entre les réformistes aidés des Japonais et les forces de l’ordre sous la tutelle des Chinois. De plus, la photographie de qualité sur laquelle nous reviendrons plus en détail et une ambiance sonore aux petits oignons nous plonge avec aisance et talent dans cette époque de trouble politique et social.
Le pari n’était pourtant pas gagné d’avance, après une filmographie des plus complète, Im Kwon-Taek aborde l’exercice difficile qu’est le film biographique avec sérénité et inspiration. Telle une composition picturale, il nous dépeint les différents moments de la vie de son personnage avec une précision et une justesse qui rappel qu’il n’est pas forcément nécessaire de se rapprocher pour capter la profondeur des choses. L’évolution du film se calque sur l’évolution de l’art de son personnage, la mise en abîme et parfaitement réussi et aucun plan ne semble de trop. Chaque cadre est époustouflant d’esthétisme et ils s’insèrent dans une structure toute asiatique. On a d’ailleurs l’impression que c’est de cette linéarité que le personnage principal tente de s’échapper, car comme dans ses estampes chaque élément dépend les uns des autres pour créer une composition originale à chaque fois. Le parallèle entre peinture et cinéma n’est même plus sous-entendu, l’un transparaissant continuellement au travers de l’autre.
C’est à ce genre de détails structurels que l’on reconnaît d’ailleurs l’artiste passé maître dans la manière toute particulière de raconter des histoires au cinéma. Certains lui reprocheront peut-être d’avoir adapté la vie de ce peintre maudit de manière un peu trop fantasque, mais est-ce que le cinéma ce n’est pas cela au final ; nous raconter de fantastiques histoires ?
Bien sûr aucun sabre, pas de chorégraphie de kung-fu et aucune explosion spectaculaire ne sont là pour ferrer la jeunesse, mais c’est bien là toute la problématique. Ce film magnifique s’adresse à un public mature passionné par la quête artistique imposée à toutes personnes s’adonnant à un art et ayant un goût particulier pour le drame. Le drame, un genre auquel l’acteur Choi Min-Sik semble apporter pas mal d’affection, puisqu’on le retrouvera quelques années plus tard dans le rôle principal du film « Old Boy ». Quelque part Im Kwon-Taek boucle là une partie de l’histoire actuelle de la Corée en faisant écho à cette époque difficile où la création artistique s’échoue face à une rigidité politique trop oppressante pour ce genre d’activité. A ce titre je vous invite à voir le documentaire choc (présent dans le Dvd) « Shoot the sun by lyric » tourné par le Séoul Visual Collective traitant de la condition des réalisateurs et des gens du cinéma dans ce pays, où bien trop souvent nous nous plaignons en Europe de ne pas avoir assez d’informations valables.
un magnifique site pour plus d'infos :
http://www.chihwaseon.com/