Harry Potter et l’Ordre du Phénix

par: Sebastien Keromen



Harry Potter est de retour sur les écrans, pour la cinquième fois. Il doit cette fois affronter toute la puissance d’une administration en plein déni, en plus des forces du mal, ce qui fait beaucoup pour un garçon de seize ans, même magique…

Harry Potter et l’Ordre du Phénix
Titre original : Harry Potter and the Order of the Phoenix
USA, 2007
Réalisateur
 : David Yates
Acteurs : Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint, Ralph Fiennes, Michael Gambon, Gary Oldman, Robbie Coltrane, Imelda Staunton, Maggie Smith, Alan Rickman, Brendan Gleeson, David Thewlis, Warwick Davis, Emma Thompson, Helena Bonham Carter, Jason Isaacs, Fiona Shaw, Richard Griffiths
Adapté du roman de J.K. Rowling
Durée : 2h20

L’histoire
Lord Voldemort est revenu. Mais le ministère de la magie ne veut pas croire Dumbledore et Harry Potter. Il va plutôt chercher à contrôler Poudlard pour éviter une rébellion. Tant de dangers à affronter.






La critique

De façon presque religieuse maintenant, tous les un an et demi, nous recevons le nouveau Harry Potter au cinéma. Nous voilà maintenant au cinquième opus. L’ordre du Phénix est le plus épais des livres, mais également le film le plus court. Inquiétant a priori, cela peut se justifier (du moins de mon point de vue) par le fait que le livre délaye pas mal des histoires qui auraient pu et dû prendre moins de temps à raconter, ce qui fait que c’est le livre de Harry Potter que j’aime le moins. Le fait que Harry passe son temps à être un sale petit con qui ne veut pas qu’on l’aide et qui prend toujours les décisions les moins intelligentes ne concourait pas non plus en faveur du bouquin, toujours à mon goût. Cependant, le livre contenait suffisamment de bonnes idées et de bonnes scènes pour réjouir tout de même le lecteur, et la perpective d’un film qui resserrerai un peu le tout était plutôt bonne.
Bon, et s’il en venait au film, plutôt que de continuer à nous raconter sa vie avec Harry Potter ? J’y viens, et retombe une fois de plus sur l’appréciation des films de Harry Potter : une superbe mise en images du livre, un bon film, mais pas au niveau du livre. Si chacun des quatre précédents épisodes avait ses points forts et faible, celui-ci n’y coupe pas, avec comme point fort une très bonne réalisation, assise sur une très bonne musique, et comme point faible une relative absence de point de vue, se contentant de raconter l’histoire, ce qui n’est déjà pas si mal. Si comme toujours le livre a subi des coupes sombres (voir à la fin pour le détail), l’histoire restante est cohérente, sans trous d’histoires, et les simplifications ne la dénaturent pas. Du beau boulot d’écriture encore.






Les nouveaux venus font plaisir à voir. À part peut-être Helena Bonham Carter qui surjoue très fortement Bellatrix Lestrange (mais ça s’arrangera sans doute dans le prochain film où son rôle prend de l’ampleur), on a droit à une nouvelle prof et une nouvelle élève dont on imagine difficilement un meilleur casting. Imelda Staunton, en Dolores Ombrage, arrive à se rendre détestable sans être odieuse, à tracer son chemin dans le film en respectant l’image qu’on avait d’elle dans le livre. Quant à la jeune Evanna Lynch, retenue pour le rôle très casse-gueule de Luna Lovegood, elle est parfaite dans le rôle, rendant son personnage aussi lunaire que nécessaire, mais sans tomber dans la caricature. Tous les autres acteurs sont bien sûr là, avec quelques bonnes scènes de Rogue cette fois-ci, trop peu de MacGonagall, un peu de tout le monde en fait car ça commence à faire beaucoup de personnages.
Inutile d’espérer enfin voir apparaître ce qui avait été coupé dans les autres films, comme Peeves ou le professeur Binns, c’est pas encore pour cette fois. Pas la peine non plus d’espérer le retour du quidditch, ça n’a même plus l’air d’exister. Comme toujours, on se prend à rêver d’une version mini-série de Harry Potter, avec tous les détails et un sentiment de vie scolaire au quotidien. Car une fois de plus tout va un peu trop vite, et on a parfois l’impression d’un résumé des événements du livre. Quasiment pas de cours, à part bien sûr celui de Défense contre les forces du mal, et quelques instantanés de cours pendant les inspections.






Par contre, on retrouve la plupart des scènes du livre qui faisaient plaisir à lire, et mises en scène de façon tout à fait satisfaisante. Les séances de l’AD, par exemple, ou, ma scène préférée, la sortie de Dumbledore, sont comme on l’espérait. En conclusion, l’Ordre du Phénix est au niveau des autres films : visuellement parfait (ah, le bureau d’Ombrage…), effets spéciaux impeccables, grande aventure exaltante, un peu raccourci par rapport au livre, mais qui tient debout. Les grandes scènes ne sont pas très nombreuses mais sont réussies (à l’image de la scène d’ouverture, ou du combat final), et le tout passe en un clin d’œil. Plus qu’à attendre 1 an et demi pour le Prince de sang mêlé (mon préféré en attendant le septième), et à s’inquiéter un peu plus sur son adaptation, sa richesse le rendant très délicat à transposer sur grand écran. Mais en attendant, profitez du cinquième opus, qui n’a pas à rougir.

A voir : pour les fans et mêmes les autres
Le score presque objectif : 8,5/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +3, l’univers de Harry Potter est toujours aussi envoûtant







Le jeu des plein plein de différences

Comme expliqué, le film fait l’impasse sur pas mal de données du livre, tant certaines actions importantes que des petits détails négligeables mais qui faisaient plaisir. En voici une rapide liste, faite à partir de notes prises à ma dernière lecture du livre.
Bien sûr, tout cela ne s’adresse qu’à ceux ayant au moins vu le film ou lu le livre, et préféremment les deux pour garder la surprise.

Le début ressemble bien au livre, avec Dudley et sa bande, et l’intervention des détraqueurs. Par contre, commence déjà ici la valse des personnages passés à la trappe, avec l’absence de Mondingus (bon, c’est pas qu’il nous manquera beaucoup). L’amusant ballet des hiboux se succédant à Privet Drive est remplacé par un seul hibou, ce qui fait tout de même court comme ballet, et la beuglante à tante Pétunia (avec l’histoire de la promesse) a disparu.
La libération de Harry par tous les sorciers est présente mais courte, et le vol vers le QG, bien loin de mettre en œuvre les techniques de camouflage du livre, se fait en rase-mottes au-dessus de la Tamise, c’est le ministère qui s’occupe de faire oublier aux moldus les actions magiques qui va avoir du boulot.
La maison Square Grimmaurd est bien présente, mais sa protection par le fait que seuls ceux à qui Dumbledore a donné l’info a disparu, c’est bien dommage. La vie dans cette maison est très écourtée par rapport au livre, mais on retrouve avec plaisir les oreilles à rallonge des frères Weasley pour écouter aux portes. L’audience devant le Magenmagot de Harry pour son expulsion est semblable au livre, avec un ministère de la magie grandiose et les mémos volants dans l’ascenseur bien présents.
Première grosse suppression dans le scénario : Ron et Hermione ne sont pas préfets, personne ne parle d’ailleurs de préfets. Toutes les scènes de jalousie de Harry, de dispute entre les deux préfets, etc., sont donc absentes. Pendant qu’on est dans les grandes coupes, tout le Quidditch a disparu (la coupe du Quidditch, que c’est drôle). Donc exit les matches, exit les auditions, exit Ron gardien, exit Weasley est notre roi, exit l’interdiction pour Harry de jouer, quand même dommage.
L’arrivée à Poudlard et la découverte des sombrals, la rencontre avec Luna Lovegood (un peu raccourcie), ça reste à peu près fidèle. Le Choixpeau magique est toujours absent, mais on s’est fait une raison depuis le deuxième film. Le speech d’Ombrage, interrompant impoliment Dumbledore, est bien là, de même que son premier cours, et la punition de Harry (même si elle ne se produit qu’une fois, alors que dans le livre sa répétition sur plusieurs semaines la rendant d’autant plus inacceptable). Et c’est quasiment tout ce qu’on verra de l’école, on ne parle pas de devoirs, de cours, et juste un peu de B.U.S.E. à la fin (on voit un seul exam). Les inspections des profs, irrésistibles dans le livre, sont réduites à une minute du film.






L’Armée de Dumbledore a par contre été traitée avec beaucoup de soin (et tant mieux, ce sont les séquences les plus fun du bouquin), avec de longues scènes et pas mal de sort, et la salle sur demande est encore plus belle que dans le livre. Au rang de ce qui est réussi, on a également un mur recouvert des décrets de la grande Inquisitrice, impressionnant.
A part le combat final, une bonne partie des éléments de la fin du livre est zappée ou du moins très fortement accélérée. Notamment l’attaque de Mr. Weasley, oh il est blessé, bon on l’a retrouvé, hop il est presque guéri. Pas de voyage à l’hôpital de Sainte-Mangouste, pas de Gilderoy, pas de parents de Neville (même si on évoque enfin ce qui leur est arrivé). L’histoire de Harry et Cho est rachitique, un baiser sous le gui est c’est fini. Peut-être Mike Newell, après le grand bal de Noël du quatrième film, s’il avait dirigé ce film, en aurait-il fait trop, mais on est tombé dans l’excès inverse.
Tout l’épisode de l’interview de Harry dans le journal du père de Luna a totalement disparu, de même que le remplacement de Trelawney (son départ est bien là) par le centaure Firenze. Bien sûr, On croise bien Graup, qui est d’ailleurs plutôt réussi, et prend une place plus réduite que dans le livre. Toute l’aventure de Hagrid auprès des géants est par contre résumée en un " j’ai été voir les géants ".
Dans ce qui reste, on retrouve les leçons d’occlumancie, et le souvenir honteux de Rogue (enfin on commence à parler du passé de James), le départ en fanfare des jumeaux Weasley avec leurs feux d’artifice, mais pas de marais magique. Et ma scène du livre préférée, quand Fudge croit enfin tenir Dumbledore, et que celui-ci lui rappelle qu’il n’a pas l’intention de se rendre tranquillement, est aussi jubilatoire que dans le livre.
Le final est très similaire au livre, avec la vision de Harry, sa capture par Ombrage, son évasion grâce aux centaures, le vol d’ombrals vers Londres, et l’arrivée au ministère de la magie. Celui-ci ne regorge par contre que de peu de salles magiques, plus de salle ronde qui tourne, plus de cerveaux flottants, de trucs bizarres et autres. Les membres de l’AD affronte valeureusement les mangemorts, et s’en sortent beaucoup mieux (entendez avec moins de blessures) que dans le livre.
La mort de Sirius est bien présente, avec toutefois une différence énorme : il ne se contente pas d’être projeté à travers cette arcade (même au ciné, ça fait bizarre), mais se prend un Avada kedavra de la part de Lestrange, ce qui rend assez peu probable son retour dans le septième livre, comme on pouvait l’espérer.
Un beau combat contre Voldemort (qui n’a même pas l’air furieux d’avoir perdu la prophétie), l’arrivée de Fudge qui comprend son erreur, un speech de conclusion de Dumbledore très raccourci, parlant à peine de la prophétie (mais vu son intérêt, c’est pas bien grave) et ne précisant même pas que Trelawney l’avait faite, et c’est tout pour cette fois. Rendez-vous au sixième.

Sébastien Keromen