Faubourg 36

par: Sebastien Keromen

Après le succès phénoménal des Choristes, Christophe Barratier a pris son temps pour préparer un nouveau film « patrimoine français » avec une distribution prestigieuse : Gérard Jugnot, Clovis Cornillac, Kad Merad, Pierre Richard, François Morel. Tout ça pour quoi ?

Faubourg 36
France, 2008
Réalisateur
 : Christophe Barratier
Acteurs : Gérard Jugnot, Clovis Cornillac, Kad Merad, Pierre Richard, François Morel, Nora Arnezeder, Bernard-Pierre Donnadieu, Julien Courbey
Durée : 2h00

L’histoire
1936. Le Front Populaire vient d’être élu. Trois ouvriers d’un Music-hall fermé décident d’occuper le théâtre et de monter eux-mêmes un spectacle. Un violent homme d’affaire et une jeune beauté douée pour le chant vont bouleverser cette aventure.




La critique

Encore auréolé du succès des Choristes, Christophe Barratier nous replonge dans l’Histoire qui sent bon la France, et réciproquement, avec la période du front populaire, ses petits gars qui font la grève, ses petits gars qui cassent les grèves, et ses petits gars qu’aimeraient juste s’en sortir. Et le film va s’attacher aux hommes, à l’histoire, au quartier, à tout et à vrai dire à un peu trop de choses. Commençons tout de suite par le défaut principal du film : il est trop gourmand, et mêle trop de choses, de niveaux de récit, d’enjeux, de sentiments. Vous avez un beau film qui parle des hommes, et hop plein de grands plans majestueux et tournants sur les décors, où les hommes disparaissent. Vous avez un récit des difficultés des ouvriers et des premières grèves, et hop des séquences musicales dignes des films hauts en technicolor d’Hollywood dans les années 30. Vous avez une comédie bon enfant, et hop le drame, et hop la comédie.




Chaque scène prise séparément est plutôt réussie, mais c’est l’ensemble qui fait patchwork qui a oublié de choisir un ton et un point de vue. Bien sûr, quelques lecteurs ne manqueront pas de me signaler que la vie aussi mélange un peu tout ça. Et c’est vrai, c’est gai quand la vie est gaie, triste quand la vie est triste, drôle quand un mec glisse sur une peau de banane et musical quand je chante en chœur avec mon autoradio, mais justement chaque vie a un point de vue bien défini, le sien, et une cohérence que n’a pas le film. Pour le reste, même si c’est plutôt réussi, c’est quand même assez attendu et un peu plat, avec un film qui met finalement pas mal de temps à démarrer. Puis quelques passages bien jubilatoires, puis ça retombe un peu et c’est fini.




Pourtant, le film est de qualité. La réalisation fait la part belle (un peu trop belle, si vous avez bien suivi) aux décors et plans larges trop travaillés pour être naturels, mais quand même très maîtrisés. La musique n’est pas mémorable tout en assurant l’ambiance et l’époque, mais les quelques chansons sentent le succès populaire à plein nez, et ça fait plaisir. Quant aux acteurs, c’est là un sans-faute. On va pas tous les citer, ils sont tous parfaits, mais un petit mot quand même pour Pierre Richard qu’on adore toujours voir, et qui explose quand son personnage prend de l’importance. Impossible de ne pas parler aussi de Nora Arnezeder, découverte du film, dont on attend un deuxième film pour confirmer qu’il s’agissait ici d’une composition, mais quelle nature, quelle aisance (et quelle voix !). Et un dernier mot pour François Morel, absolument irrésistible dans un rôle de charlot un peu simplet mais heureux, rendant presque un hommage aux films muets drôles et émouvants.




Pour finir, Faubourg 36 est un film réussi dans son détail mais moins dans son ensemble. À force de changer de point de vue, de ton, on suit le film de l’extérieur sans vraiment s’y investir, et donc presque sans émotion. C’est bien dommage, car c’était de la belle ouvrage, mais c’est comme ça…

A voir : pour sa qualité, ses acteurs, mais pas vraiment pour l’émotion
Le score presque objectif : 6,5/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +1, vous ne regretterez pas de l’avoir vu, mais vous regretterez qu’il ne soit pas meilleur

Sébastien Keromen