Lincoln
Lincoln
Sortie:
30/01/2013
Pays:
USA
Genre:
Durée:
2h30 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Lincoln

par: Sebastien Keromen

Un nouveau film de Spielberg, est-ce encore un événement ? C’est pas qu’il soit mauvais, le gars, mais il est prolixe ! Par contre, un nouveau film de Daniel Day-Lewis, là, sûr c’est un événement. Et encore plus quand il incarne si bien Lincoln. Dans un film qui incarne bien l’ennui…

Lincoln
Titre original : Lincoln
USA, 2012
Réalisateur
 : Steven Spielberg
Acteurs : Daniel Day-Lewis, Sally Field, Tommy Lee Jones, David Strathairn, James Spader, Joseph Gordon-Levitt,
Musique de : John Williams
Adapté du roman de Doris Kearns Goodwin
Durée : 2h30

L’histoire
1865. La guerre de Sécession semble tirer à son terme. C’est le moment ou jamais, pour Abraham Lincoln, de faire passer le 13e amendement pour abolir l’esclavage. Mais comment obtenir la majorité nécessaire ?





La critique

Savez-vous comment Abraham Lincoln a fait passer le 13e amendement sur l’abolition de l’esclavage ? Eh bien allez voir ce film, et vous le saurez en long, en large, en travers, en carré, en diagonale à cloche-pied et en 4-4-2. Car le film va prendre le temps de tout vous montrer, de tout détailler, même ce qui n’a pas d’importance. Le temps de citer tous les parlementaires. Le film prend son temps. Ou non, en fait, le film prend votre temps ! À moins d’être passionné d’avance par le sujet, difficile de ne pas vite s’ennuyer devant cette reconstitution trop précise et à la fois pas assez explicative de tout ce qui se passe. Parce que des tas de gens vont discuter avec des tas de gens. Sérieux, je sais pas combien de rôles parlants il y a, mais c’est impressionnant. Et après avoir discuté, ces gens vont rediscuter avec d’autres gens. Ah oui, c’est un film où ça discute. Si deux personnes au fond de la salle avaient cru que la bataille du début annonçait un film d’action, elles ont vite été détrompées.




Pour un film politique, c’est logique, plein de dialogues. L’excellente série The West wing (À la Maison Blanche en VF) repose uniquement sur des dialogues politiques finement ciselés et un rythme impeccable. Rien n’empêchait d’avoir un West wing du XIXe siècle… Sauf que les dialogues vont du plat à l’abscons, que les personnages manquent cruellement d’épaisseur et de personnalité. Mais pas de postiches. Ah ça non. Autant la reconstitution historique est de belle facture, autant c’est un défilé de perruques et de moustaches et de barbes plus improbables les unes que les autres. Et en plus toutes différentes, on croirait parfois un défilé de mode capillaire. Alors peut-être est-ce effectivement ce dont ils avaient l’air à l’époque, mais ça m’a gêné pendant la première moitié du film, et m’a sorti complètement de l’histoire. Tout ça pour des moumoutes et des barbes à velcro… Mais il n’y a pas que ça qui ne fonctionne pas… D’abord, la musique de John Williams est étonnamment atone, et avant d’avoir vu son nom au générique j’ai cru qu’il n’était pas le compositeur du film. Et malheureusement, les acteurs ne sont pas toujours au point. On reviendra sur Daniel Day-Lewis, qui est impeccable. Certains s’en sortent pas trop mal, comme par exemple David Strathairn, ou James Spader (que je n’avais pas reconnu, mince il a pris des joues). On passera sur Tommy Lee Jones qui joue toujours pareil, qu’il soit un parlementaire, un shérif ou un Men in Black. Mais pour le reste, difficile d’y croire. Pas aidés par les perruques et des dialogues assez indigents, presque tous semblent faux. La palme à Sally Field, qui compose un personnage auquel on ne croit pas, plombée aussi par le manque total d’intérêt de l’histoire familiale de Lincoln. Bref, quand des gens pas intéressants et pas crédibles nous débitent sans expliquer des tonnes de dialogues tièdes, ben pas étonnant qu’on s’ennuie.




Mais tout n’est pas noir. Il y a Daniel Day-Lewis. Je suis loin d’être un fan, mais là, il assure grave. Déjà, il ressemble vraiment physiquement à Lincoln tel qu’on peut le connaître. Merci le maquillage et les postiches (les seules réussies du film), mais merci aussi à une interprétation qui tient plus de la personnification que du jeu d’acteur. Il arrive à donner à son personnage un caractère, une légèreté, une conviction, une culture, un humour, un sourire, bref, tout ce qui constitue un vrai être humain, un vrai personnage. Un travail particulier aussi sur la voix, mi cassée et aigrelette, mi autoritaire, et sur l’accent, une performance vocale impeccable (VO obligatoire, bien sûr). Vraiment du beau boulot. Dommage que le film ne soit pas à la hauteur. Car passer 2h30 pour comprendre ce qui aurait pu être résumé, sans perte d’intérêt, en quelques minutes, c’est quand même très long. Et manqué, car on n’arrive même pas à être emporté par l’émotion et l’enthousiasme au vote du fameux amendement. Et de plus incomplet, car, si les américains savent peut-être déjà toute l’histoire, pour nous, Français (et surtout pour moi, nul en Histoire), on aurait bien aimé comprendre par exemple pourquoi ce sont les Républicains qui essaient de faire voter l’abolition de l’esclavage contre les Démocrates. À la lumière de la classe politique américaine actuelle, ça surprend un peu. D’un autre côté, voulait-on vraiment un film de 3h05 pour ajouter cette explication ?

A voir : pour Daniel Day-Lewis
Le score presque objectif : 6/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : -1, vraiment un West wing d’époque m’aurait tenté, mais là c’est fade, redondant, et pas crédible, dommage

Sébastien Keromen