Pacific Rim
Sortie:
06/08/2013
Pays:
USA
Genre:
Durée:
2h10 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Pacific Rim

Verdict: Chef D’oeuvre

par: Guillaume Simon

"Je pense que l'un des facteurs clés de cette réussite est que c'est un film positif. Il y a des bons et des méchants et ça en fait essentiellement un film divertissant à regarder. Il y avait longtemps que les gens n'avaient pas pu aller au cinéma pour voir un bon vieux film d'aventure, sain et amusant." Ces quelques mots, sortant de la bouche d'un George Lucas alors pressé d'analyser à chaud le succès surprise de Star Wars (c'est à dire au moment où il avait encore de la suite dans les idées plutôt que l'idée des suites) résument parfaitement ce qu'est Pacific Rim : un film de pur divertissement, un grand spectacle, un rollercoaster grand luxe, un hommage.



En ces temps où tout un chacun peut donner son avis sur un film en se servant de la toile
(comme votre serviteur), la mode actuelle est de tomber à bras raccourcis sur le premier blockbuster venu afin de lui faire subir les pires outrages. Par le passé, l'appellation "geek" était une insulte, aujourd'hui elle est revendiquée et considérée comme une preuve de contre-culture teintée d'intelligence. Il semble que désormais le seul moyen de la prouver au yeux du monde est la pratique de la critique destructive plutôt que constructive. Prometheus avait déjà souffert d'un bashing outrancier lors de sa sortie (principalement orchestrée autour d'incohérences (réelles) du script, mais occultant le métrage en lui-même), c'est maintenant au tour de Pacific rim, majoritairement boudé au mieux, voir détesté, sur les forums de fans. Ce traitement est-il mérité ? Non, cent fois non, mille fois non.
Pacific rim est le premier projet concret réalisé par Guillermo Del Toro depuis son Hellboy 2 voici déjà 5 ans. C'est en effet suite à l'échec cinglant de l'aventure du Hobbit (duquel Del Toro fut, selon les rumeurs, démissionnaire pour cause d'emploi du temps chaotique ou débarqué pour mésentente massive avec Peter Jackson) que le réalisateur surprend tout le monde en ne choisissant non pas de se lancer dans l'un de ses 857 projets en cours mais plutôt de se laisser confier un film "clé en main". Malgré cet état de fait, Pacific rim porte indéniablement la marque du réalisateur ibérique (il a d'ailleurs participé à la réécriture du scénario) tant au niveau des thématiques que du visuel.



Au cœur du film, l'action, bien sûr.
Dantesque, spectaculaire, inventive (on sent constamment les niveaux d'échelles - énormes - des monstres et robots se mouvant à l'écran) elle se révèle de haute volée. Le défi technique lié au film est non seulement surmonté, mais va encore plus loin. Rarement de mémoire de spectateur on aura eu droit un travail de composition de l'image aussi réussi et cohérent (difficile ici, lors de scènes de dialogues, de différencier les portions de décors réelles et celles numériques au sein d'une image). La cohérence visuelle sonne juste (on ressent d'ailleurs la patte Del Toro d'emblée - mécanismes, rouages, couleurs primaires et abondances de gros plans à l'appui). Le gigantisme des scènes d'action est d'ailleurs offert au spectateur sans préambule, l'ouverture du film offrant déjà une scène faisant faire pâlir sans grande difficulté les climax de la plupart des blockbuster actuels. Des scènes par ailleurs disséminées avec un timing adéquat durant tout le film, jusqu'à un final proprement dantesque. Le film est une réussite artistique tant sur le plan des effets spéciaux, de la mise en scène ou de la direction artistique. Mais tout cela n'en fait pas un bon film, il reste l'histoire...

Pourquoi chercher compliqué ? C'est un peu la question qu'a dû se poser le père Del Toro. Il est inutile de le nier, la trame de Pacific rim est classique, pour ne pas dire basique, complètement prévisible, téléphonée et sans grandes surprises. Dans un mauvais jour on pourrait pester contre ce manque d'investissement de fond, contre cette paresse scénaristique. Pourtant, Star wars, pour reprendre l’exemple (pas du tout innocent) de début de critique était-il différent ? Le premier opus de la saga galactique était en effet extrêmement simpliste lui aussi (avant que George Lucas essaye de justifier une histoire plus complexe à posteriori en y accolant les suites). Le scénario de Pacific rim a beau être simple et prévisible, il n'en est pas moins bien écrit, fluide et efficace. C'est d'ailleurs le mot juste : tout dans le film sert l'efficacité. Tout est prévu pour qu'à aucun moment le spectateur ne sorte de son état de béatitude pour "sortir" du film et se lancer dans des hypothèses et autres réflexions. On pourra toujours se gausser du "coup de l'épée" par exemple, mais ce genre d'"incohérences" est toujours parfaitement volontaire et assumée comme telle. Pacific rim est un film de ressentit qui ne gagne absolument pas (comme beaucoup d'autres films...) à être analysé ou intellectualisé, car souvent, expliquer, c'est amoindrir. Il restera toujours des thèmes, évidents eux, qui ressortent de l'intrigue et qui font malgré tout du film un divertissement certes, mais un divertissement intelligent (comme celui de la connexion des deux pilotes, qui doivent s'unir, eux et leurs différences, pour vaincre - à l'image des deux scientifiques du film, antagonistes et opposés, qui, une fois alliés, trouvent leurs réponses).



Un casting au service d'un film. Risque supplémentaire pour une entreprise déjà sur le fil du rasoir, pas de stars dans Pacific rim. La distribution est ainsi aisément dominée par le charisme d'Idris Elba dans le rôle du Obi Wan Kenobi local. Le reste du casting ne démérite pourtant pas et offre de beaux moments de comédie. Bien écrits, les dialogues dosent le mélange gagnant habituel de ce genre de grosse production familiale : un zeste d'humour, une louchée d’héroïsme, une pincée de romantisme, un soupçon de rivalité... Encore une fois, classique, mais efficace.

En conclusion : Pacific rim, c'est un spectacle total. Un plaisir coupable de deux heures dix durant lesquels l'âge mental chute sévèrement mais duquel on ressort le sourire aux lèvres. Il ne s'agit surtout pas ici d'un film à aller voir comme on va voir le dernier Malick. Ce n'est pas d'un 2001, l’odyssée de l'espace qu'il s'agit. Le film ne vise absolument pas dans cette cour. C'est un grand, très grand divertissement qui, contrairement à nombre d'autres films du même genre, ne prend jamais son spectateur pour un abruti mais au contraire le respecte. Pacific rim est aussi une preuve, s'il en fallait encore une, qu'un film peut être un grand film, voir même ce que certains appellent un chef d’œuvre sans pour autant disserter sur la condition humaine et au contraire utiliser les émotions et les réflexions les plus basiques.