Dans l'ombre de Mary - La promesse de Walt Disney
Saving Mr Banks
Sortie:
05/03/2014
Pays:
USA
Genre:
Durée:
125 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Dans l'ombre de Mary - La promesse de Walt Disney

Verdict: Très Bon

par: Emmanuel Galais

Lorsque les filles de Walt Disney le supplient d’adapter au cinéma leur livre préféré, « Mary Poppins », celui-ci leur fait une promesse... qu’il mettra vingt ans à tenir ! Dans sa quête pour obtenir les droits d’adaptation du roman, Walt Disney va se heurter à l’auteure, Pamela Lyndon Travers, femme têtue et inflexible qui n’a aucunement l’intention de laisser son héroïne bien aimée se faire malmener par la machine hollywoodienne. Mais quand les ventes du livre commencent à se raréfier et que l’argent vient à manquer, elle accepte à contrecœur de se rendre à Los Angeles pour entendre ce que Disney a imaginé... Au cours de deux semaines intenses en 1961, Walt Disney va se démener pour convaincre la romancière. Armé de ses story-boards bourrés d’imagination et des chansons pleines d’entrain composées par les talentueux frères Sherman, il jette toutes ses forces dans l’offensive, mais l’ombrageuse auteure ne cède pas. Impuissant, il voit peu à peu le projet lui échapper... Ce n’est qu’en cherchant dans le passé de P.L. Travers, et plus particulièrement dans son enfance, qu’il va découvrir la vérité sur les fantômes qui la hantent. Ensemble, ils finiront par créer l’un des films les plus inoubliables de l’histoire du 7ème art...

Sur le papier, l’idée est particulièrement réjouissante : Raconter l’histoire de la création du film « Mary Poppins » en insistant, notamment, sur les rapports difficiles entre Walt Disney et Pamela Lyndon Travers l’auteur du roman, dont le patron du studio voulait acquérir les droits. Une idée particulièrement réjouissante, donc,  à condition que les auteurs du scénario aillent au fond des choses et ne se laissent pas freiner par les infranchissables images d’Epinal de la Walt Disney Company.

Et c’est exactement ce qui se passe : Le film de John Lee Hancock, déjà réalisateur du monstrueusement pénible : «  The Blind Side », nous dépeint avec justesse, certes des relations tendues, parvient avec beaucoup de sensibilité à explorer les frontières du subconscient  de la romancière pour nous livrer une seconde lecture beaucoup moins naïve de « Mary Poppins ». Mais le scénario, se limite beaucoup trop à des clichés de genre entre la culture traditionaliste Anglaise et le faux libéralisme américain des années 50-60. On y voit ainsi un auteur anglais rigide, refusant les règles d’une entreprise dépeinte avec beaucoup trop d'idéalisme, que l’on peut encore voir actuellement dans les reportages que le studio autoproduit pour se vendre. Mais qu’en était-il réellement ? Walt Disney était certes un visionnaire, mais il avait également une part d’ombre, liée à son époque,  à ses idées (Voir les commentaires de Meryl Streep lors de la cérémonie des derniers Golden Globes) ? Est-ce ternir le personnage que de le montrer sous tous les angles, avec toutes ses nuances ? Pas si sûr, car il est évident que le film aurait pris encore plus de hauteur en étant moins « huilant » sur le personnage du créateur de Mickey Mouse, en montrant une image moins stéréotypée, qui aurait donné plus de sens au rapport conflictuelle, mais aussi à la capacité de persuasion de  « Monsieur », la réticence de Pamela Lyndon Travers n’en n’aurait été que plus forte et plus palpable.

Ici, dans le film, le sujet tourne en permanence autour de l’enfance de l’auteur, et du rejet qu’elle fait de l’univers de l’animation et des comédies musicales. Elle considère son personnage, comme bien plus qu’une simple nourrice aux pouvoirs magique, « Mary Poppins » est une partie d’elle-même, un pan de sa vie, une sorte de douleur qu’elle exorcise à travers une histoire moins haute en couleur que ce qu’aimerait en faire Disney. Mais le réalisateur et les scénaristes ne semblent pas vouloir rentrer sur le terrain du rejet de l’homme. Et même si certaines scènes parviennent à montrer les difficultés de rapport notamment dans les séances de travail, elles ne parviennent pas à nous montrer un réel conflit de personnes entre les deux protagonistes. Pamela Lyndon Travers était une anglaise d'origine Australienne, rigoureusement ancrée dans les traditions, comme cela était souvent le cas à l'époque, elle voyait d'un mauvais oeil les adaptations de Disney qu'elle jugeait néfastes pour les oeuvres littéraires, par un aspect trop édulcoré. Mais surtout Walt Disney représentait à ses yeux, le prédateur qui attend la faiblesse de sa proie pour s'approprier son bien et le cuisiner à son envie. Et le film se garde bien d'insister sur le sujet.

Mais le film n’est toutefois pas un ratage total, loin de là ! Car si la réalisation reste toutefois classique, la distribution se donne à fond dans la restitution des émotions et du mimétisme des personnages. A commencer par Emma Thompson, qui ne cesse de nous émouvoir avec beaucoup de justesse. Jouant parfaitement de ses origines pour marquer la distance entre son personnage et ses interlocuteurs américains. Poussant l’émotion au plus loin, elle nous tire littéralement les larmes des yeux, dès lors que le film pénètre dans l’intimité de l’auteur et de son roman. Quand à Tom Hanks, il se révèle un Walt Disney de façade idéal. Jouant le mimétisme au maximum, il reprend les séquences filmées du patron du studio avec beaucoup de précision et nous dupe radicalement. 

En conclusion, « A l’ombre de Mary : La promesse de Walt Disney » est un film familial réussit, qui joue énormément sur l’émotion et y parvient, offrant en même temps l’un de ses plus beaux rôles à Emma Thompson. Mais le traitement de l’histoire reste encore beaucoup trop contrôlé autour du personnage de Walt Disney et de sa société pour être totalement honnête et réussit. Mais en même temps un film sur Walt Disney produit par The Disney Company, à quoi s’attendre ?