Dallas Buyers Club
Sortie:
29/01/2014
Pays:
USA
Genre:
Durée:
117 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Dallas Buyers Club

Verdict: Excellent

par: Emmanuel Galais

1986, Dallas, Texas, une histoire vraie. Ron Woodroof a 35 ans, des bottes, un Stetson, c’est un cow-boy, un vrai. Sa vie : sexe, drogue et rodéo. Tout bascule quand, diagnostiqué séropositif, il lui reste 30 jours à vivre. Révolté par l’impuissance du corps médical, il recourt à des traitements alternatifs non officiels. Au fil du temps, il rassemble d’autres malades en quête de guérison : le Dallas Buyers Club est né. Mais son succès gêne, Ron doit s’engager dans une bataille contre les laboratoires et les autorités fédérales. C’est son combat pour une nouvelle cause… et pour sa propre vie.

Les années 80 ont vu naître l’une des plus graves épidémies de notre histoire. D’abord supposée liée à une minorité, elle s’est vite transformée en  un drame humain généralisé. Avec un pitch comme celui de « Dallas Buyers Club », on peut logiquement s’attendre avec inquiétude à une nouvelle version de « Philadelphia », le premier film à traiter du sida de manière frontale. Mais ce serait sans compter sur le talent et la finesse de mise en scène de Jean-Marc Vallée (C.R.A.Z.Y.) qui a préféré pour étayer son sujet s’intéresser au destin hors du commun d’un cow-boy tout ce qu’il y a de plus machiste, dealer de surcroit qui contracte le VIH, et trouve un moyen surprenant de prolonger sa vie, notamment en plongeant à corps perdu dans le deal de traitements parallèles qui feront, au final leurs preuves.

Si le style de réalisation est quelque peu décousu, la narration, elle, l’est beaucoup moins et le réalisateur de nous faire plonger dans l’enfer de cet homme qui lutte autant contre la maladie que contre les hommes et leurs « fichus » préjugés. D’abord, ses amis, ses collègues qui le rejettent, le traite comme un pestiféré, ne comprennent pas, par ignorance surement et par bêtise surtout, comment il a pu être contaminé, les médecins aveuglés par un traitement d’urgence, qui ne fait que tuer un peu plus les patients.  Et c’est toute l’intelligence de ce scénario, que de nous mettre face à l’horreur d’une maladie qui tue encore de nos jours, en se situant du point de vue d’un patient, qui va faire de sa vie un combat, en utilisant ses propres armes, ses propres intuitions, quitte à se battre contre la médecine, contre la puissance de frappe des firmes pharmaceutiques. Ce combat personnel trouve alors l’écho comme une rédemption contre des années de préjugés et d’homophobies, vers d’autres patients.

Le film prend alors tout son sens dans sa distribution, avec évidemment, Matthew McConaughey (La défense Lincoln) qui trouve là le rôle à "Oscar" évident, avec une métamorphose physique impressionnante. L’acteur s’est volontairement enlaidi, créant ainsi l’antipathie nécessaire pour que le spectateur apprenne au fil des minutes du film à aimer son personnage avec autant de douleur, que ce dernier a passé sa vie à la détruire. Le comédien est possédé par son personnage au point de transpirer d’inconscience, de volonté morbide et de violence latente. Autre grande et magnifique surprise, peut-être la plus belle, l’interprétation méticuleuse de  Jared Leto (Mr Nobody). Le comédien ne cherche par à caricaturer, ni à imaginer son personnage, il s’approprie les fêlures, les faiblesses, mais également les forces de ce travesti, providentiel, par qui la rédemption du cow-boy va venir. Rarement un jeu fut aussi juste, que celui de Leto, qui ne surjoue jamais, mais au contraire magnifie son jeu par une retenue assumée qui fait mouche du début à la fin.

« Dallas Buyers Club » est un film dont le sujet difficile trouve ici une mise en scène minutieuse et décousue qui répond en écho à l’existence du personnage principal, dont les excès pas toujours maîtrisés ont finit par donner une marche à suivre aux chercheurs de la lutte contre le sida. Le film est transcendé par les interprétations particulièrement de Matthew McConaghey et surtout Jared Leto, qui a d’ores et déjà reçu un Golden Globes pour ce rôle.