The Search
Sortie:
26/11/2014
Pays:
France
Genre:
Durée:
134 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

The Search

Verdict: Chef D’oeuvre

par: Emmanuel Galais

Le film se passe pendant la seconde guerre de Tchétchénie, en 1999. Il raconte, a` échelle humaine, quatre destins que la guerre va amener à` se croiser. Après l’assassinat de ses parents dans son village, un petit garçon fuit, rejoignant le flot des refugies. Il rencontre Carole, chargée de mission pour l’Union Européenne. Avec elle, il va doucement revenir a` la vie. Parallèlement, Rai¨ssa, sa grande sœur, le recherche activement parmi des civils en exode. De son côté´, Kolia, jeune Russe de 20 ans, est enrôlé´ dans l’armée. Il va petit a` petit basculer dans le quotidien de la guerre.
Aujourd’hui la Syrie, la Palestine, mais surtout l’Ukraine, il y a quinze ans la Tchétchénie. Un conflit que personne ne voulait réellement croire, aisément masqué derrière l’écran de fumée de la propagande soviétique, cette guerre jeta sur la route des populations entières, victimes innocentes d’un conflit qui ne s’embarrassait pas à distinguer les populations des objectifs militaires, les soldats des enfants et les paysans des terroristes. Tout le monde dans le même bain de sang, dans la même dérive et des soldats russes enrôlés de force dans une armée qui n’avait de valeurs que celles du sang versé.

Michel Hazanavicius (The Artist, Oss 117) sort d’un registre qui lui donna ses lettres de noblesses pour faire une entrée fracassante dans un registre plus sombre, plus moite, comme l’environnement dans lequel évoluent les protagonistes de son histoire. Remake du film « Les anges Marqués » de Fred Zinnemann avec  Montgomery Clift, « The Search » voit son action passée du Berlin de la seconde guerre mondiale, à la Tchétchénie de 1999. Et le réalisateur, parvient aisément à se libérer de l’emprise de son modèle pour faire une œuvre vibrante d’humanisme, profondément réaliste, et dénué de toute caricature alourdissante. Le film se dévoile avec une justesse parfois terrible, sans être voyeuriste. Par une mise en scène qui utilise autant la caméra à l’épaule pour mieux imprégner le spectateur du malaise de la scène et ainsi renforcer son propos, que les plans fixes pour laisser les visages exprimer toute la détresse, Hazanavicius nous fait exploser à la figure l’indifférence parfois oppressante de l’Europe, face au drame qui se passait dans cette région. Un message qui prend forcément une hauteur plus actuelle avec ce qui se passe en Ukraine d’abord, dont l’histoire avec la Russie semble se répéter, mais également dans d’autres pays comme la Syrie.

Alors même si on peut reprocher une sorte de parti prit évident pour la cause Tchétchène et le manque de retenue de ces soldats Russes, transformés en bêtes de guerre sanguinaire, on peut tout de même souligner un scénario impeccablement ciselé qui a aussi l’intelligence de suivre un jeune soldat enrôlé de force dans une armée dont il ne partage pas les valeurs, mais une institution bien décidée à le briser pour le déshumaniser et en faire un boucher soviétique, dont toute la violence terrorisera une population  entière.

Pour donner corps, Michel Hazanavicius s’appuie sur l’actrice Bérénice Béjo, toujours impeccable, rarement hors sujet. Une composition qui vient jouer le décalage entre l’état d’esprit des Européens incrédule et pas forcément décidé à se brouiller avec la Russie et celui des habitants fatalistes et désarmés. Mais tout le mérite de ce film revient surtout aux deux jeunes acteurs Maxim Emelianov et Abdul Khalim Mamatsuiev, le premier d’une justesse remarquable en jeune homme enrôlé de force dans l’armée, qui subit les coups et les humiliations pour être trop humaniste. De la même manière que Logan Lerman dans « Fury », l’acteur compose un personnage terrifié avec une justesse rare. Même chose avec le petit Abdul Khalim Mamatsuiev saisissant de vérité dans le rôle de ce petit garçon perdu dans un conflit qui lui a pris toute sa famille, et qui doit assumer des décisions trop difficile pour un enfant de son âge.

En conclusion, « The Search » est une nouvelle pépite du réalisateur Michel Hazanavicius, qui en plus de bénéficier d’un scénario remarquablement écrit, peut se glorifier d’avoir eu un casting d’une justesse saisissante. Un film a voir pour mieux ouvrir les yeux sur les erreurs de ces conflits que l’on a tendance à un peu trop oublier au profit d’une dinde bien cuite sur une table bien remplie. Un film qui permet de se rappeler que des populations souffrent à quelques milliers de kilomètres de chez nous pour leur religion, ou simplement pour le fait d’habiter un pays convoité par un autre, mais dans l’indifférence quasi générale. A quelques semaines de Noël, il est parfois bon de prendre conscience de la chance que nous avons de vivre en France.