Suicide Squad
Suicide Squad
Sortie:
03/08/2016
Pays:
USA
Genre:
Durée:
2h05 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Suicide Squad

Verdict: Médiocre

par: Sebastien Keromen

Après un Batman v Superman décevant, DC Comics avait une bonne chance de se refaire avec un méchant film de méchants qui devait renouveler le genre, et qui donnait envie. Donnait.

Suicide Squad
Titre original : Suicide Squad
USA, 2016
Réalisateur
 : David Ayer
Acteurs : Will Smith, Jared Leto, Margot Robbie, Viola Davis, Jai Courtney, Cara Delevingne, Ben Affleck
Adapté des comics de John Ostrander
Durée : 2h05

L’histoire
Quand une mission est désespérée, autant envoyer des soldats dont la mort ne serait pas regrettable. Donc les pires ennemis publics numéro 1 (et 2, et 3, et…). Mais bien sûr ça ne sera pas aussi simple…



La critique

Avant que le film ne sorte, on avait grave envie d’appeler le Suicide Squad. Bandes annonces super alléchantes, personnages décalés, promesse d’un ton plus noir et moins héroïque, et série d’affiches absolument somptueuses (et quand on sait à quel point les affiches se ressemblent habituellement toutes, c’est un exploit). Pour vous faire plaisir, et consoler un peu de ce qui va suivre, je vous ai remis la quasi-totalité des affiches collectives et individuelles ici, ne me remerciez pas, ça me fait plaisir.



Après avoir vu le film, on a encore envie d’appeler le Suicide Squad. Mais pour une autre raison. Pour dézinguer la plupart des gens qui ont participé à créer cette catastrophe ambulante. Mettons qu’on leur demandera d’épargner sans doute à peu près Margot Robbie, qui incarne une Harley Queen complètement déjantée. La performance n’est sans doute pas inégalable, et on est sans doute indulgent du fait de la satisfaction intense de voir enfin ce personnage à l’écran, mais elle s’en tire sans déshonneur, avec une bonne énergie. Si c’était tout ce que vous veniez chercher dans le film, vous serez le seul spectateur au monde à être satisfait.
On a envie d’appeler le Suicide Squad pour buter le directeur photo. Après des affiches pleines de couleurs, on s’attendait à quelque chose de sans doute un peu criard, mais aux couleurs vives. Sauf que finalement, les trois quarts du film se passent dans l’obscurité, et on ne voit rien. Sérieux, les scènes d’action ne sont pas montées plus cut que d’habitude, mais sont par contre encore moins lisibles que d’habitude, tout simplement parce qu’on ne voit tellement rien qu’on ne comprend pas ce qu’on nous montre. Vu l’obscurité, fuyez les séances en 3D qui n’apportent absolument rien (même le plan vertigineux sur l’escalier en colimaçon n’a pas d’effet de profondeur notable), et assombrit le film. Et quand la scène a un minimum d’éclairage, on rajoute de la pluie, ou de la fumée, ou n’importe quoi qui permet qu’on ne voit toujours rien. Le générique de fin commence sur fond verdâtre radioactif, et en 5 secondes on se dit qu’on a eu plus de lumière que dans tout le film cumulé.



On a envie d’appeler le Suicide Squad pour éliminer le réalisateur. Mélanger une histoire plate avec des flash-back ennuyeux, exposer rapidement les personnages, puis en ré-exposer certains, essayer de faire le malin avec des plans calculés puis du grand n’importe quoi… Tout le reste de l’emballage est tellement mauvais que c’est pas évident d’identifier bien ce qu’on peut imputer au réalisateur, mais clairement il n’a rien fait pour sauver l’entreprise.
On a envie d’appeler le Suicide Squad pour faire disparaître le responsable sonore. D’un côté des musiques complètement transparentes, dont on ne s’aperçoit pas vraiment qu’on les entend (probablement parce que dans l’ensemble on se fout de tout ce qui se passe à l’écran). De l’autre côté, des chansons intégrées de façon beaucoup trop voyantes, comme si on était dans un enchaînement de clips sur MTV. Le début du film, qui commence par quelques vignettes sur les héros, remet une nouvelle chanson à chaque vignette, on dirait des courts-métrages sans rapport avec une musique envahissante. Et le reste du film n’améliorera pas cela.



On a envie d’appeler le Suicide Squad pour descendre le scénariste. Je ne sais pas ce qui est pris dans les comics ou ce qui a été créé pour le film, donc je descends le tout sans distinction. Pas de souci avec un groupe de méchants qu’on envoie en mission suicide, jusque-là j’étais toujours partant. Mais d’abord, côté groupe, aucune construction, aucune formation, même pas la conviction que les méchants vont convenir, on a besoin du groupe, allez, on les appelle tous. La dynamique de groupe fera sembler de s’installer déjà loin dans le film, et sans convaincre. Sans compter que bien sûr, tous n’auront pas un rôle de la même importance. Je plaignais Jubilee dans ma critique sur X-Men Apocalypse, mais j’ai trouvé plus à plaindre : Slipknot, je vous jure qu’on le voit plus sur les affiches que dans le film. La plupart des autres ne font qu’une maigre figuration, un effet spécial pourrave et puis s’en va. Pour revenir au scénario, n’oublions pas les nombreux il-est-mort-mais-en-fait-non, le gros méchant aux pouvoirs cosmiques contre lequel ils n’ont aucune chance mais heureusement le gros méchant préfère les affronter avec sa forme humaine qui leur permet de le défoncer, et des sacrifices inutiles de gens qui étaient censés être sans foi ni loi. C’est d’ailleurs le défaut général principal du scénario : la méchanceté des héros est à peine anecdotique, on voit bien que chacun a un cœur qui bat sous leur carapace de salaud, et finalement on aurait pu avoir le même film avec des vrais héros (heureusement qu’ils rappellent eux-mêmes régulièrement qu’ils sont méchants, sinon on l’oubliait). Encore du gâchis, quand on imagine ce qu’un studio audacieux aurait pu faire en n’essayant pas d’être consensuel et grand public… Et j’ai failli oublier les dialogues, absolument pitoyables, qui donnent une fois sur deux l’impression qu’une réplique ne répond pas du tout à la précédente, tant tout est abscons. En général, les phrases sont tellement sans sens ni intérêt qu’on a oublié ce que disait le début avant qu’elle ne finisse. Et manque de bol, les dialogues il y en a pas mal, quand les méchants se racontent leur vie pitoyable de façon ennuyeuse, vous allez adorer.






On a envie d’appeler le Suicide Squad pour exploser le responsable des effets spéciaux. Tant par leur qualité que le design des créatures, les effets spéciaux sont pourraves, et les créatures lambda à affronter sont les plus moches et les plus lambda que j’aie jamais vues. Sans compter des effets ratés, et la pauvre Cara Delevingne peut faire tout ce qu’elle veut pour être crédible en Enchanteresse, quand les effets spéciaux la font bouger avec des à-coups, ça ne ressemble à rien.
On a envie d’appeler le Suicide Squad pour abattre le directeur du casting. Pour un film DC Comics aussi high-profile, j’imagine que les acteurs se sont bousculés. Autant certains choix se défendaient et la faute incombe à l’acteur, comme vous le verrez plus bas dans des chapitres où je les entretiendrai de mon courroux, autant certains rôles ont été filés à n’importe qui, qui en a fait n’importe quoi. Face à tous ces monstres, il fallait que leur chef désigné ait du charisme, de la poigne, de la présence, du magnétisme… Soit exactement tout ce dont le Créateur a privé Joel Kinnaman, dont je pense que personne ne le reconnaîtrait à 50 centimètres même si on venait de passer une journée entière avec lui, et même sa famille je suis même pas sûr. Les autres acteurs pas connus sont dans l’ensemble fades, et n’importe qui d’autre aurait fait au moins aussi bien. Dommage pour un film qui se devait d’être tranchant.



On a envie d’appeler le Suicide Squad pour faire la peau à Will Smith. Ce n’était pas un mauvais choix a priori. Sauf que Will Smith a décidé de faire du Will Smith, c’est-à-dire qu’il joue exactement comme d’habitude, et donc un gars qui tue des gens mais très sensible et bon à l’intérieur et qui ne tue ni enfant ni femme parce qu’il est bon à l’intérieur. Soit au choix un putain d’hypocrite ou un psychopathe ennuyeux, et de toute façon en fait c’est juste Will Smith. C’est le même problème pour Viola Davis qui joue un personnage complètement linéaire et dont la seule ligne de jeu est de serrer la mâchoire et d’avoir l’air dure.
On a envie d’appeler le Suicide Squad pour démonter Jared Leto. Son Joker paraissait intéressant quand on le voit dans les bandes annonces, mais au final ça ne passe pas. Parce qu’on a l’impression que Jared Leto joue quelqu’un qui joue le Joker. Comme si le Joker passait son temps à se dire qu’il devait agir comme le Joker. Quelque chose de complètement construit, au lieu d’être horriblement spontané comme l’était notamment Heath Ledger. Un coup pour rien.
On a envie d’appeler le Suicide Squad pour éradiquer Jai Courtney. Souvenez-vous, c’est le gars dont vous ne vous souvenez pas dans Jack Reacher et les Divergente, c’est le fils complètement fade de John McLane dans Die Hard 5, et c’est l’insupportablement transparent Kyle Reese de Terminator Genisys. Cette fois, au lieu d’être transparent, il est juste complètement insupportable. On dirait une imitation ratée de François Damiens, c’est dire s’il est complètement à côté de la plaque dans un film comme ça. Sérieux, le Suicide Squad, si vous répondez pour de vrai à mon appel mais ne me laissez choisir qu’une cible, ne cherchez pas plus loin.



Au final, on a surtout envie d’appeler un autre Suicide Squad, qui serait aussi réussi que celui-ci est raté. Décidément, autant DC Comics en séries c’est une réussite, autant au cinéma c’est l’échec à chaque fois. Et à chaque fois, le film pâtit de sa comparaison avec la série. Ici, comparez juste le chef du Suicide Squad avec celui de Legends of tomorrow. Même équipe de bric et de broc de méta-humains et autres guerriers, mais un chef nul au cinéma, et un chef très attachant à la télé. N’allez pas me dire que le film n’a pas autant de moyens que la série… En attendant, si vous voulez du Suicide Squad, autant revoir les quelques épisodes d’Arrow où il apparaît, plutôt que d’aller vous faire du mal à voir ce maelström nocturne et idiot qui au mieux vous ennuiera et au pire vous mettra en colère contre le cinéma, le pop-corn, Hollywood, et même si ça se trouve le gars qui a écrit la critique que vous êtes en train de lire. Alors évitez de prendre le risque, croyez-en les autres qui vous disent à quel point le film est nul, et n’allez pas voir par vous-même.

À voir : vraiment non
Le score presque objectif : 3,5/10
Mon conseil perso : résistez à la tentation de voir si j’ai raison, faites-moi confiance, vous me remercierez quand vous jetterez un œil sur le film à la télé, avant de zapper

Sébastien Keromen