Comment faire qu’un biopic ne ressemble pas à un biopic ? Il y a quelques mois, le film Steve Jobs apportait une réponse magistrale. Aujourd’hui, c’est à Jérôme Salle de tenter une réponse en équilibrant vie publique et vie privée, et en ajoutant de la plongée et de poissons. Et ça marche ?
L’Odyssée France, 2016
Réalisateur : Jérôme Salle
Acteurs : Lambert Wilson, Pierre Niney, Audrey Tautou, Laurent Lucas
Musique de : Alexandre Desplats
Durée : 2h00
L’histoire Jacques-Yves Cousteau vient d’inventer un scaphandre révolutionnaire. Ça n’est que le début de sa grande aventure de découverte du monde du silence…
La critique En voilà une bonne idée ! Un biopic sur le commandant Cousteau. Car si tout le monde le connaît, qui connaît sa vie ? Et ce n’est pas la seule bonne idée du film. Notamment, il évite à peu près l’écueil des biopics pesants et scolaires, en mélangeant à l’histoire de Cousteau celle de son fils Philippe. Et ne tombe pas non plus dans le piège de l’hagiographie en dépeignant un Cousteau avec une part d’ombre indéniable. Et pour ajouter à la fête, on profite bien sûr de superbes images de décors paradisiaques, de fonds marins poissonneux, de faune et de flore marine, et de jolis couchers de soleil sur des icebergs. Une ambition qu’il faut saluer, à la fois biopic et de l’aventure. En voilà donc un bon film alors ? Presque.
Car en fait le film a les quelques défauts de ses choix pourtant audacieux. D’abord, le fait de présenter Cousteau comme un homme parfois pas trop recommandable (surtout vers le milieu du film) diminue l’empathie, à tel point qu’au bout d’un moment, on s’intéresse moins. Son fils, même s’il évoluera également, apparaît surtout comme une tête à claques, ce qui fait qu’on a un beau film mais qui ne nous parle de personne dont on voudrait entendre parler… Ça s’arrange sur le dernier quart, mais ça nous sort un peu de film, et c’est là que tombe le second problème. Les acteurs font sans doute bien leur job, mais je n’ai pas réussi à voir d’autres personnages que les acteurs. À force de ne pas vraiment ressembler à son modèle, on finit par ne voir que Lambert Wilson jouer Cousteau, et, même si on ne connaît pas leur modèle, Pierre Niney et Audrey Tautou n’arrivent pas à s’effacer derrière Philippe et Simone. Peut-être le moment où on s’attache moins fait qu’on prend du recul et qu’après c’est trop tard. Peut-être le tout est-il un peu trop guindé pour être réaliste. Je ne sais pas trop dire, mais ça gêne pendant tout le film et empêche de s’y plonger complètement.
Et c’est dommage, car le reste est vraiment réussi, tant l’équilibre entre la vie personnelle et l’œuvre de Cousteau, les scènes de nature et de plongée sont aussi impressionnantes que superbes, la musique très envoûtante, toute l’aventure de Cousteau est passionnante, mais il manque un je-ne-sais-quoi, peut-être de la chaleur, pour qu’on laisse le film nous emmener sans réticence. C’est sans doute assez subjectif, et il est très possible que vous n’ayez pas cette impression, mais finalement j’ai plutôt suivi le film comme un documentaire et non comme une aventure humaine. Ce qui n’empêche pas toutefois des moments d’émotion, de ravissement et d’ébahissement. Un très beau film, c’est sûr. Un bon film, sans aucun doute. Mais pour moi pas plus. Peut-être pour vous…
À voir : pour l’histoire de Cousteau et les décors naturels
Le score presque objectif : 7/10
Mon conseil perso : un film français original et courageux, alors si vous n’avez pas les mêmes réticences que moi, vous allez adorer
Sébastien Keromen
