Triste
Joker…
L’histoire
Arthur Fleck est un clown plutôt
triste. Vivant avec sa mère, il fait des représentations de clowns qui ne sont
si amusantes, ni rassurantes…
La critique
Dire que cette interprétation du
Joker
était attendue relevait de l’euphémisme. On a rarement autant attendu un
film adapté d’un comics, on a rarement autant parlé de l’arrivée d’un super
vilain en haut de l’affiche. Et le film de Todd Philips est tout cela à la fois :
une interprétation de folie (le mot est adéquat), un nouveau DC Comics et un
des tous premiers films qui ose mettre en haut de l’affiche un Méchant, un
Vilain, un Bad-Guy, ou plutôt, la naissance d’un Méchant… Et pas des moindres,
un méchant connu pour être l’éternel rival de Batman mais aussi connu pour
être, finalement totalement « inconnu ». Au fond c’est de cela
dont il s’agit : de qui parle-ton ? Finalement d’un méchant très
connu mais dont on ne sait rien, à part
ce rire sinistre et tonitruant en parfait étendard d’une vie qui surfe avec la
folie.
Trop nombreux
Le Joker a été interprété à de très nombreuses reprises à l’écran et à chaque
fois cela correspondait à une époque bien détourée : les années 80/90 dans
les Batman de Tim Burton avec Jack Nicholson dans le rôle du Joker, ensuite
dans les Batman de Christopher Nolan avec Heath Ledger dans les années 2000 et
enfin Jared Leto en 2016 avec
Suicide
Quad… mais à chaque fois, l’apparition
n’était que figurative rien de plus, pas d’exploration des « racines du
mal », pas de travail sur le passé psychiatrique ou d’enfance d’un des
personnages les plus connus de DC Comics. Quel dommage ! Todd Philips
rattrape le tir avec sa propre vision du fou d’Arkham et Joachim Phoenix
explose dans un rôle qui va marquer sa carrière d’une pierre blanche. Pour ce
dernier, il a perdu 25 kilos et de ses mots, une telle perte aussi rapide ne
peut que vous affecter psychologiquement. On le croit sans aucun problème même
s’il affirme avoir eu du mal à trouver le rire du Joker. Un rire glaçant qui
donne une note ténébreuse de parfait Freak au pire ennemi de Batman.
Interprétation
Si vous cherchez un film de super
héros, vous en trouverez autant que nécessaire chez Marvel, premier pourvoyeur
du marché. Non, ici, nous assisterons plutôt à la manière dont le Joker s’est
construit et ce pierre par pierre, bloc après bloc afin d’être celui qu’il
devait devenir. J’ai lu par ci par là que ce film était celui d’une descente
aux enfers, celle d’un homme que la vie n’a pas gâté avec des sévices et traitements
terribles et inadaptés qu’ils aient été administrés dans l’enfance ou dans la
vie d’adulte. Non, comme le dit le Joker, on vous conditionne, on vous
maltraite et une société incapable de vous traiter finit par vous rejeter dans
la rue (désolé pour les puristes du films, je n’ai plus les mots exacts en
tête). Joker est donc né d’une
construction minutieuse, avec un Joaquim Phoenix habité et dans un travail de
composition qui défraierai la chronique. En ce sens, c’est un simple film, très
lent, très sombre (
Taxi Driver sort
de ce corps) mais qui dispose finalement d’un rythme parfaitement adapté à une
métamorphose lente, dégénérescente et infernale qui poussera doucement le Joker
à devenir ce qu’il est. Pour information, le film durait 30 minutes de plus à l’origine.
Peut-être que ces 30 minutes coupées pourront être découvertes lors d’une
future édition blu ray. Sur le plan de la technique, Todd Philips n'est pas en reste, ancrant son action systématiquement dans les lieux les plus pittoresques (le métro, le premier employeur de Arthur, le hlm de Arthur, le grand escalier...) et renonçant à la facilité d'une réalisation trop visuelle jouant sur les contrastes (une facilité avec un thème comme le Joker) mais en allant au contraire dans les tons pastels soutenus, le réalisateur de Road Trip livre un film au rendu esthétique ultra réaliste et donc très marquant.
Joker est aussi un film sur une
société qui ne sait pas quoi faire de ce qu’elle produit, le schéma est évident
mais c’est avant tout un film sur la condition humaine des laissés pour
comptes, de ceux qui sont marginalisés et qui finalement se retrouvent comme…, orphelins
d’un monde dans lequel ils n’ont jamais été vraiment les bienvenus. Joaquim
Phoenix en est le parfait hérault… ! Vive le Joker !
Verdict : 9/10
Une réussite éclatante pour un film qui était attendus par tous. Todd
Philips et Joaquim Phoenix remportent leur pari haut la main, bravo !