Enragé
Unhinged
Sortie:
19/08/2020
Pays:
USA
Genre:
Durée:
90 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Enragé

Verdict: Chef D’oeuvre

par: Emmanuel Galais



Mauvaise journée pour Rachel : en retard pour conduire son fils à l’école, elle se retrouve coincée au feu derrière une voiture qui ne redémarre pas. Perdant patience, elle klaxonne et passe devant. Quelques mètres plus loin, le même pick up s’arrête à son niveau. Son conducteur la somme de s’excuser, mais elle refuse. Furieux, il commence à la suivre... La journée de Rachel se transforme en véritable cauchemar.


Après une comédie dramatique sur la famille (La famille Jones) en 2005 et une biographie de Joe Strummer des Clash (London Town) en 2016, Derrick Borte tient peut-être enfin son premier hit avec un film particulièrement stressant : « Enragé ».
Dans ce thriller, dont le scénario a été signé par Carl Ellsworth, qui avait déjà été à la manœuvre avec « Paranoïa » en 2007, nous suivons le parcours de Rachel qui va se retrouver aux prises avec un automobiliste particulièrement énervé d'avoir été klaxonné par la jeune femme, et qui va lui pourrir l'existence, a un niveau rarement atteint. Évidemment avec un résumé comme celui-ci, impossible de ne pas penser à « Duel » de Steven Spielberg (1973), film dans lequel un homme est poursuivi par un camion dont le conducteur semble ne pas avoir apprécié que le héros l'ait doublé. Sauf que le film de Borte vient dépoussiérer le genre avec une efficacité saisissante.


Car après un début assez classique qui vient tout de suite planter les grandes lignes d'un psychopathe particulièrement violent, le film s'ouvre sur un générique extrêmement anxiogène qui vient placer, en utilisant des images de télésurveillance, le spectateur, non pas dans la position de voyeur, mais dans la désagréable position de l'identification à l'héroïne dont la journée ne semble pas partie pour bien commencer.
Et des lors que les deux personnages se rencontrent, la mise en scène de Derrick Borte prend tout son sens. Le réalisateur signe des plans d'une efficacité rare, maintient le spectateur dans son étau pour ne plus le relâcher durant les 1h30 que dure le film. Énergique, dynamique, angoissant et surtout parfaitement maîtrisée, la mise en scène de Borte plante ses crocs dans notre mental et ne nous lâche plus. Avec une aisance visuelle, il parvient à nous surprendre en dépoussiérant les codes du genre, notamment lorsque la jeune femme tente d'échapper à son harceleur dans une ville encombrée.


Et puis évidemment, il y a Russell Crowe.
L'acteur a déposé ses costumes de gladiateur, de Robin des bois ou d'autres hommes d'exception pour devenir ce psychopathe épouvantablement inquiétant qui, comme le dit son personnage, n'est pas prêt de quitter notre mémoire. Le charisme de l'acteur, son physique imposant et son regard sombre viennent nous hanter même après le générique de fin. L'acteur australien prouve, une fois de plus, qu'il est à l'aise dans tous les registres et particulièrement lorsqu'il s'agit de devenir inquiétant. Face à lui Caren Pistorius (Mortal Engines) joue la carte de la détresse avec beaucoup de brio et son opposition avec l'acteur forme l'un des duos les plus réjouissant de cette dernière décennie.


En conclusion « Enragé » est un thriller redoutablement efficace, qui vient dépoussiérer un genre tenue depuis 50 ans par Steven Spielberg.
Derrick Borte signe un film anxiogène comme rarement et plonge le spectateur dans une angoisse si palpable qu'il ne l'imaginait pas. Russel Crowe n'y est pas étranger bien évidemment.  Le premier vrai choc de cet été bien morne.