The Crossing
Guo Chun Tian
Sortie:
12/08/2020
Pays:
Chine
Genre:
Durée:
99 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

The Crossing

Verdict: Excellent

par: Emmanuel Galais



Peipei est une lycéenne de 16 ans qui vit avec sa mère à Shenzhen et étudie à Hong Kong. Avec sa meilleure amie Jo, elles rêvent de vivre un jour de Noël sous la neige au Japon. Alors que Peipei cherche du travail pour financer ce voyage, le petit ami de Jo lui propose de se faire de l’argent en passant illégalement des téléphones portables par la frontière. D’abord craintive, Peipei prend de l’assurance quand les entrées d’argent se font plus importantes…


Pour sa première réalisation, la réalisatrice chinoise Bai Xue, nous entraîne dans une peinture sociétale que nous connaissons mal, par nos contrées occidentales et lointaines. Celle de Hong Kong et de la Chine. Ou plus précisément de ces deux peuples qui se côtoient en opposant leurs cultures qui devraient être si proches, mais sont pourtant si éloignées. D’un côté il y a cette liberté insolente et de l’autre une société, longtemps autarcique qui s’ouvre avec grand peine à un monde qui ne le devance pas tant que ça. D’un côté de la frontière il y a l’apparente insouciance, un signe extérieur de richesse et de l’autre une humilité poussée à l’extrême, comme si avoir de l’argent devait être une honte. 


Et puis il y cette jeunesse, ces milliers de Peipei qui passent la frontière chaque jour pour aller étudier à Hong Kong, y découvrent une vie, qui semble faite d’argent facile et de liberté, pour ensuite revenir dans un milieu plus rigoureux et plus dominateur. La réalisatrice filme son héroïne comme elle tournerait ses souvenirs d’enfance, avec nostalgie, mais aussi avec recul pour ne pas appuyer trop là où cela fait mal, mais plutôt pour lever un voile sur une réalité dont nous n’avons pas forcément conscience. Forte d’une documentation qu’elle s’est forgée en rencontrant les gens, en les assimilant à ses souvenirs, puis en lisant beaucoup, la réalisatrice qui signe également le scénario, livre une œuvre remarquable qui plonge le spectateur dans l’envers d’une mégapole qui ne dort jamais et vit parfois au rythme de ses néons colorés qui lui donne des airs de cinéma réel.


Et comme pour mieux appuyer son propos, la réalisatrice a choisi d’utiliser autant que faire se peut, les lumières naturelles et artificielles de la ville. Un choix qui permet de mieux imprégner le spectateur de cette ambiance irréelle qui peut être lugubre parfois mais qui donne cette couleur propre à la ville, telle que nous la fantasmons. Car Hong Kong c’est avant tout un fantasme, pour nous, bien sûr, mais aussi pour les chinois qui voient cette ville comme une exception sociétale et culturelle dans cette empire réputé pour sa rigueur. Avec une mise en scène soignée et inspirée, Bai Xue parvient, parfois avec quelques longueurs, à nous permettre de mieux comprendre la singularité de la région et cette différence surprenante, qui soulève bien des rêves et des ambitions au cœur de ses habitants.


D’une peinture de sa jeunesse, de cette région de la Chine qui lui fut rétrocédée en 1997, la réalisatrice tire une œuvre touchante et captivante surtout lorsque l’insouciance se confronte aux trafics en tout genre qui naquirent de cette singularité. Depuis la Chine a renforcé ses contrôles et sa lutte contre la contrebande a porté ses fruits, mais la réalisatrice montre avec « The Crossing » que Hong Kong et la Chine sont définitivement deux membres de la même famille qui ne parviendront jamais à se comprendre, tant les différences sont marquantes.