Mon Crime

Verdict: Excellent

par: Emmanuel Galais



Dans les années 30 à Paris, Madeleine Verdier, jeune et jolie actrice sans le sou et sans talent, est accusée du meurtre d’un célèbre producteur. Aidée de sa meilleure amie Pauline, jeune avocate au chômage, elle est acquittée pour légitime défense. Commence alors une nouvelle vie, faite de gloire et de succès, jusqu’à ce que la vérité éclate au grand jour…


Un film de François Ozon c’est toujours une sorte d’évènement pour les fans.
Et même si le film ne répond pas toujours à la demande, il recèle toujours des petites pépites d’écriture ou de mise en scène. Et après quatre films plutôt sombres : « Grace à Dieu » (2019), « Eté 85 » (2020), « Tout s’est bien passé » (2021) et « Peter Von Kant » (2022), le réalisateur revient à la comédie, avec un projet plus léger, mais qui garde l’essence même d’un film de Ozon. De la même manière que son précédent était une adaptation d’une pièce de Fassbinder, ce « Mon crime » est une adaptation d’une pièce de théâtre de Georges Berr et Louis Verneuil qui fut l’un des plus grands succès de l’année 1934.


Et le réalisateur y trouve là l’occasion de reprendre des thèmes qui lui sont chers comme Les rapports de pouvoir, d’emprise dans les relations Hommes/Femmes. Comme il l’avait fait avec « Potiche » en 2010, François Ozon utilise une époque pour nous parler de la nôtre. Et ici, les femmes semblent soumises au pouvoir des hommes, mais les cartes sont soudainement rabattues lorsque le meurtre est commis et que la désignée coupable semble maitresse d’un jeu de bluff dont on ne connaitra les ficelles que seulement à la fin du film. François Ozon, maitrise sa mise en scène et exerce une sorte de parallèle malin être théâtre et justice, car nous le savons, une cour de justice c’est un théâtre où la verve des avocats est déterminante pour le destin de leur clientèle.


Retrouvant le principe de la « Screwball Comédy », un principe de théâtre avec des répliques à la « Mitraillettes » et des situations cocasses et burlesques où les personnages inventent des astuces pour se tirer de situations dramatiques. Ici, un meurtre, une fausse coupable et une quantité de possibilités. Le réalisateur soigne sa photographie, maitrise le jeu des comédiens et laisse exploser leur talent. Le film est d’une fraicheur folle et ne tarde pas à provoquer des fous rires en cascades. Jamais avare d’idées qui vont mettre ses comédiens à contre-sens de ce pourquoi ils sont réputés, le metteur en scène va pousser ses acteurs dans les moindres recoins de la comédie et forcer le trait de théâtrale pour ne jamais plonger le spectateur dans un film trop classique et garder cette atmosphère si particulière.


Et puisque nous parlions des comédiens, François Ozon a décidé d’opposer deux inconnues à des stars confirmées Nadia Tereszkiewicz, qui n’est pourtant pas une débutante puisque nous l’avons vu dans « Les Amandiers » de Valéria Bruni-Tedschi en 2022, ou encore dans la série « Dix Pour Cent », et Rebecca Marder, saisissante dans « Les Goûts et les couleurs » de Michel Leclerc en 2022 ou encore « Simone » d’Olivier Dahan également en 2022. Les deux comédiennes se retrouvent à porter sur leurs épaules un film dans lequel elles font face à : Isabelle Huppert (La Pianiste), Fabrice Luchini (Un Homme Pressé), Dany Boon (Joyeux Noel), André Dussolier (Le Torrent) et d’autres comédiens de la nouvelle génération : Félix Lefebvre (Eté 85) et Edouard Sulpice (Des Hommes). Avec une telle disparité, le réalisateur pousse les anciens à contre balancer avec la nouvelle génération, bien décidée à ne pas se laisser prendre en faute. Les acteurs sont merveilleux de drôlerie (Motion spéciale pour Isabelle Huppert, incroyable de folie pendant tout le film), et les deux comédiennes principales sont impressionnantes de précision et justesse dans des rôles faussement difficiles et nous embarquent dans cette histoire rocambolesque.


François Ozon signe avec « Mon crime », son retour à la comédie et cela lui va si bien. Le réalisateur signe une mise en scène précise et inventive, qui n’est pas sans rappeler « Potiche » en 2010 et « 8 Femmes » en 2002. Avec un casting inspiré et qui sort également de sa zone de confort, il nous entraine dans une comédie qui fait du bien alors que le sujet de base est un meurtre. En nous faisant rire, il parvient à aborder des thèmes tellement actuels comme : La relation de pouvoir entre Hommes et Femmes. Un film a voir absolument.