Dans un monde en proie à une vague de mutations qui transforment peu à peu certains humains en animaux, François fait tout pour sauver sa femme, touchée par ce phénomène mystérieux. Alors que la région se peuple de créatures d'un nouveau genre, il embarque Émile, leur fils de 16 ans, dans une quête qui bouleversera à jamais leur existence.
La crise sanitaire à fait naître bien des inquiétudes chez les cinéastes et scénaristes de tous horizons. Mais a aussi fait naître une envie de pousser les codes et particulièrement en France où la production ne semble toujours pas prête à sortir de sa zone de confort. Et pour peu qu'elle le fasse le couperet des Haters ne tarde pas à tomber. C'est le cas de Thomas Coillay qui après avoir réalisé « Les Combattants » en 2014, nous plonge dans un univers fantasmagorique où un mal inconnu fait muter les humains en animal. Un mal que la médecine a bien du mal à soigner et les autorités bien du mal à contrôler. Et lorsque la sacro-sainte vindicte populaire s'y met, les victimes de ce mal sont exclues et sont, soit parquées dans des centres où elles sont étudiées et soignées ou condamnées à fuir dans les forêts par peur d'être prises pour cible.
Et pourtant « Le Règne Animal » de Thomas Cailley ne veut pas parler d'un virus comme n'importe quel film, dont la crise sanitaire à donner des envies d'apocalypse. Le réalisateur a trouvé dans le scénario de Pauline Munier, l'occasion d'y développer des thèmes que la crise écologique, traversée par notre planète, impose comme la transmission : que voulons nous laisser à nos enfants et petits-enfants ? Qu'avons-nous hérité et quels peuvent être les remèdes ? Ici, le réalisateur tisse une intrigue puissante où la partie animale de l'homme ressort en sorte de mutation hybride. L'homme revient à son état premier et cette hybridation n'est pas vue, par le réalisateur, comme une dégénérescence fatale, mais comme un renouveau de cette nature qui ne cesse de se réinventer. Et pour cela, il va rester collé à ses personnages, se laisser porter par leurs évolutions et ne pas venir se faire parasiter par des effets de démonstrations technologiques qui seraient venues pervertir son propos.
Et sa mise en scène va suivre ce schéma inlassablement sans jamais en démordre. Tout est fait pour que les acteurs soient au centre de l'attention et non pas la technologie. La caméra s'efface presque pour laisser parler le jeu des comédiens. Utilisant la caméra portée pour se mettre au cœur de l'action, ou des plans plus serrés pour voir les changements subtils chez les personnages hybrides ou non. Alternant en permanence entre drame, action, comédie et contemplation, « Le Règne Animal » n'est pas un film fantastique comme les autres. Ses inspirations sont aussi variées que Clint Eastwood et son « Monde Parfait », ou encore « A bout de Course » de Sidney Lumet en passant par « Thelma et Louise » de Ridley Scott. Des cinéastes et des œuvres qui aiment se jouer des codes narratifs pour mieux captiver leur audience. Le réalisateur soigne son propos et nous cueille par son inventivité et par sa précision.
Et puis bien sûr, il y a l'interprétation de Paul Kircher, qui s'était déjà fait remarquer par sa prestation dans « Le Lycéen » de Christophe Honoré, l’année précédente, et qui livre ici une composition physique et précise dans une personnalité complexe. A la fois gauche et rigoureux, le jeune acteur est de tous les plans et nous hypnotise par son jeu. Face à lui Romain Duris (Les Trois Mousquetaires D’Artagnan) n'a rien à prouver mais porte son personnage dans une palette d'émotions toutes plus subtiles les unes que les autres.